En Guyane, les gendarmes de l’antenne GIGN descendent du ciel
- Par le capitaine Tristan Maysounave
- Publié le 08 avril 2024

L’Antenne du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (AGIGN) de Cayenne met régulièrement en pratique l’hélicordage. Focus sur cette technicité particulière à l’occasion d’une séance d’entraînement.
Les militaires de l’AGIGN de Cayenne sont pleinement engagés dans l’opération Harpie menée en Guyane française. L’opacité et l’étendue de la forêt équatoriale limitent néanmoins leur capacité d’action, notamment lorsqu’ils emploient des modes d’action conventionnels (infiltrations à pied, en quad ou en pirogue). Afin de contourner cette difficulté, ils ont recours aux hélicoptères AS350 B2 Écureuil de la Section aérienne de gendarmerie (SAG) de Cayenne et Sud-Aviation SA.330 Puma de l’Escadron de transport (E.T.) 68 Antilles-Guyane de l’armée de l’Air et de l’Espace, capables d’effectuer leur mise à terre depuis le ciel. Deux techniques sont employées : la descente en rappel et celle en corde lisse.
Mise à terre en rappel ou corde lisse
« La corde lisse peut être mise en œuvre depuis les hélicoptères de la gendarmerie comme depuis les Puma de l’armée de l’Air. Les rappels ne peuvent s’effectuer qu’à partir de ces derniers », détaille Romain, que ses camarades surnomment papi. Affecté à l’AGIGN de Cayenne depuis 2020, il est moniteur-formateur en hélicordage, instruction dispensée par le GIGN. « Le rappel consiste à descendre à l’aide d’une corde et d’une assurance nous empêchant de chuter. Nos rappels se font en général entre 40 et 50 mètres, ce qui correspond à la hauteur de la canopée. La descente en corde lisse se fait à la seule force des bras et des jambes. Nous glissons jusqu’au sol à partir du puits ou de la porte latérale de l’hélicoptère. La hauteur se situe généralement entre 10 et 15 mètres, mais nous ne disposons alors pas d’assurance. Nous favorisons cette technique pour les opérations coup de poing nécessitant une mise à terre rapide, type Anaconda. Nous opérons en rappel essentiellement dans le cadre de missions d’infiltration en forêt, visant à détruire des sites d’orpaillage clandestins. L’hélicoptère Puma nous fait descendre avec notre matériel à plus de 8 kilomètres de notre cible (la portée sonore du rotor de l’hélicoptère est estimée à 8 kilomètres, raison pour laquelle les militaires de l’AGIGN sont toujours déposés à une distance supérieure, NDLR). Nous progressons ensuite à pied dans la jungle jusqu’à l’objectif. »
Les descentes en corde lisse peuvent se faire de jour comme de nuit, tandis que celles en rappel ne sont autorisées que de jour. Elles sont systématiquement encadrées par un gendarme qualifié largueur. « Celui-ci s’assure de la sécurité et de la cadence la mise à terre des équipiers, précise Romain. Il doit avoir été spécifiquement formé à ce rôle. »
Si les mises à terre se font essentiellement en forêt équatoriale, dans le cadre de missions dédiées à la Lutte contre l’orpaillage illégal (LCOI), les gendarmes de l’AGIGN peuvent recourir à l’hélicordage dans d’autres situations.
En forêt équatoriale mais pas seulement…
« Nous effectuons des mises à terre en corde lisse lorsque nous sommes déployés dans le cadre de l’opération Titan, visant à sécuriser les lancements de fusée », poursuit Romain. Le centre spatial de Kourou s’étend sur 700 km² et est en majorité recouvert de forêt équatoriale. Les militaires de l’AGIGN agissent donc depuis les airs dans le cadre de la Quick Response Force (QRF) afin de réduire leurs délais d’intervention. Et de préciser : « En cas de suspicion d’intrusion sur le site, nous nous projetons en hélicoptère Puma avec les militaires de la SAED (les Sections d’Aide à l’Engagement Débarqué sont des unités spécialisées des Armées, NDLR) et nous descendons en corde lisse afin d’effectuer la levée de doute. »
« Cette technicité est également employée en Contre-terrorisme maritime (CTM), complète l’adjudant Rémi, mécanicien naviguant sur hélicoptère Puma à l’ET68 Antilles-Guyane. L’objectif est de permettre aux gendarmes de descendre rapidement sur le pont du bateau afin d’exposer l’hélicoptère en stationnaire le moins longtemps possible. La longueur de la corde est en général de 5 à 10 mètres. »
Les gendarmes de l’AGIGN participent régulièrement à des séances d’entraînement afin de maintenir leur technicité.
Des entraînements fidèles aux conditions opérationnelles
En raison des caractéristiques et des configurations spécifiques à chaque machine, les militaires de l’AGIGN de Cayenne effectuent des exercices avec la SAG et avec l’ET68, stationnés sur la base aérienne 367 – Rochambeau de Matoury.
« La mission LCOI est noble mais peut s’avérer dangereuse, explique Romain. Les garimpeiros (chercheurs d’or clandestins, NDLR) n’ont souvent rien à perdre et nous pouvons être confrontés à des bandes armées au cours de nos opérations. Il nous faut donc considérer le risque au plus haut à chaque fois que nous nous engageons. En conséquence, nous effectuons des entraînements reproduisant le plus fidèlement possible nos mises à terre opérationnelles. À notre affectation à l’AGIGN de Cayenne, nous recevons d’abord une formation initiale composée d’un module théorique et de mises en pratique effectuées depuis un bâtiment, puis d’un hélicoptère. Nous veillons également à la formation continue. Ainsi, chaque militaire de l’unité réalise au moins trois descentes en corde lisse et trois descentes en rappel par an. Monter dans un aéronef n’est pas anodin. Nous rappelons systématiquement les consignes de sécurité et les dangers (rotor de l’appareil, etc.). De nuit, en situation opérationnelle, nous demandons au mecbo (MÉCanicien de BOrd, NDLR) d’éteindre les lumières à bord de l’appareil afin de ne pas être décelés. Nous reproduisons ce schéma lors de nos exercices. Nous mettons alors en œuvre les jumelles de vision nocturne. Celles-ci rendent difficile l’appréciation de la trois dimensions, il nous faut donc compter sur notre expérience. »
« Les entraînements nous permettent de mieux appréhender l’environnement, ajoute l’adjudant Rémi. Dans le cadre de nos opérations, nous survolons la forêt équatoriale à perte de vue. Elle est comparable à la mer, dans la mesure où nous ne rencontrons que très peu d’endroits nous permettant de nous poser. Les zones de mise à terre sont étroites. En soute, nous surveillons les incidents pouvant être causés par le souffle du rotor (arbres qui tombent ou se soulèvent, etc.) et nous nous exerçons à gérer les éventuels accidents et blocages. »
Les gendarmes de l’AGIGN prochainement formés à la grappe de récupération
Les militaires de l’antenne du groupe d’intervention de la gendarmerie de Cayenne seront prochainement formés à la récupération par grappe par le GIGN, qui utilise déjà cette technique. Celle-ci, qui ne peut être mise en œuvre qu’à partir d’un hélicoptère Puma en Guyane, permet la récupération de militaires dans un milieu où un hélicoptère ne peut pas atterrir. Sur la grappe, qui passe par le puits de l’aéronef, se trouvent des pontets capables de transporter des hommes et des équipements après les avoir sécurisés. Jusqu’ici, les missions d’hélicordage menées par les gendarmes de l’AGIGN n’étaient pas réversibles. En cas d’impossibilité pour l’hélicoptère de se poser, les militaires ne pouvaient pas remonter à son bord. Accrochés à la grappe, ils pourront désormais rejoindre des zones permettant à l’hélicoptère d’atterrir et donc de les réembarquer. Cette capacité pourra notamment être mise en œuvre dans le cadre des missions Anaconda.
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