"Avant que ça commence", ou les débuts de la criminologie en gendarmerie

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 03 novembre 2023
Maxime Chattam, à gauche, aux côtés de Marie-Laure Brunel-Dupin (au centre), tenant un exemplaire de son ouvrage, Avant que ça commence, et Valérie Péronnet (à droite), lors de la séance de dédicaces organisée au sein d'une librairie parisienne.
© Sirpa gendarmerie - BRI (R) B. Louvet

Disponible en librairie depuis le printemps 2023, le roman écrit par la lieutenante-colonelle Marie-Laure Brunel et la romancière Valérie Péronnet retrace, à travers l’histoire du personnage principal et de sa première enquête, l’arrivée de l’officière en gendarmerie et, avec elle, celle d’une nouvelle technicité : les sciences du comportement. Un premier livre qui en appelle d’autres. Rencontre avec les autrices.

Il est des livres qu’on ne pose qu’une fois la dernière page tournée. « Avant que ça commence » fait partie de ceux-là. Porté par une écriture enlevée et rythmée, l’ouvrage nous entraîne dans les premiers pas en gendarmerie d’une jeune officière, dépeignant sans concession son arrivée dans un univers (la gendarmerie, et plus spécifiquement la police judiciaire) alors majoritairement, sinon exclusivement masculin, et ses difficultés à faire accepter la nouvelle technicité qu’elle apporte : les sciences du comportement. Ce récit, celui de sa première enquête, a d’ailleurs été adoubé par Maxime Chattam, un des maîtres du roman policier et du thriller français, qui était présent dans l’assistance lors de la toute première séance de dédicace, organisée à Paris, en avril dernier.

Si le roman écrit par Valérie Péronnet et la lieutenante-colonelle Marie-Laure Brunel-Dupin respecte tous les codes du polar, il n’en reste pas moins fidèle à la réalité, se basant sur des faits bien réels, bien que modifiés afin de préserver les protagonistes, et s’inspirant largement de la carrière de l’officière ; le volet personnel étant quant à lui le produit de l’imagination prolifique de sa co-autrice. Dans un entretien croisé, les deux femmes reviennent sur cette aventure à la fois littéraire et humaine.

Comment est née votre collaboration ?

Valérie Péronnet : nous nous sommes rencontrées dans le cadre d’un article que j’écrivais pour Psychologie magazine. J’avais entendu parler de Marie-Laure et j’avais trouvé son profil intéressant, en particulier l’idée fausse que je me faisais du métier de profiler. On a fait connaissance, elle m’a expliqué son métier et j’ai rédigé son portrait. Ce qui a été à la fois passionnant et très frustrant, parce qu’en trois pages, il m’était impossible de raconter tout ce que j’avais envie de raconter. Voilà comment ça a commencé.

Marie-Laure Brunel-Dupin : de prime abord, j’étais réticente pour ce portrait, parce que j’avais eu de mauvaises expériences avec des articles où je ne me reconnaissais pas. Mais en lisant celui de Valérie, c’était la première fois que j’avais un portrait de moi fait à la première personne qui me plaisait. J’ai trouvé exceptionnel qu’elle arrive à me faire dire des choses que je n’avais pas dites, sans rien travestir ; je m’entendais dans ses mots. Je me suis alors dit qu’elle m’avait vraiment percée. Cela m’a complètement emballée.

V.P. : dans notre rencontre, il y a aussi ce que j’ai perçu sans ce que tu me le dises avec des mots, un peu comme quand tu profiles quelqu’un. Il y a ce qui saute aux yeux et aux oreilles, mais aussi tout le reste, auquel tu es toi-même extrêmement attentive et qui sont des éléments importants. En fait, on fait un peu le même boulot, en tout cas dans la manière d’aborder les gens. Nous avons développé toutes les deux, dans notre domaine, une perception très fine, très attentive et très détaillée de ce que l'on observe. À la différence que mon boulot, c’est d’observer les êtres, et pas les scènes de crime, ni les bandits…

Alors comment passe-t-on d’un portrait à un polar ?

V.P. : Parmi mes différents métiers, je suis aussi autobiographe, et à ce titre, je prête ma plume à des gens qui racontent leur vie. C’est ce que j’ai eu envie de faire avec Marie-Laure. Mais très vite, en discutant avec elle, je me suis rendu compte qu’étant tenue par le secret sur beaucoup de choses, une autobiographie tant qu’elle est en poste est impossible. Et même après je pense, car elle fait tellement attention aux familles des victimes qu’elle ne se sentira jamais la parole libre pour raconter son métier. Nous sommes donc parties de ma frustration pour raconter cette histoire passionnante sans la raconter vraiment. L’idée nous est venue grâce à un éditeur avec lequel je travaille beaucoup - mais qui n’est pas le nôtre - de créer un personnage qui ne soit pas Marie-Laure, mais qui s’en inspire. Car depuis le début, ce qui m’intéresse, c’est de raconter la carrière de cette jeune femme culottée, qui écrit au directeur de la gendarmerie, sans se rendre compte que ce n’est pas comme ça qu'on fait, en lui proposant son projet et qui est finalement embauchée.

Je ne suis pas du tout lectrice, ni écrivaine de polars, je préfère regarder ce qui est beau dans le monde plutôt que sa laideur. Alors écrire des bouquins où à longueur de pages on lit des abominations, ça ne m’intéresse pas tellement. Et bien souvent, dans les polars, le héros est sombre, parce que justement il est exposé à toutes ces abominations. Or, ce que j’aime chez Marie-Laure, que j’ai repris pour le mettre chez notre héroïne Mina Lacan, c’est la fraîcheur avec laquelle elle est au combat tout le temps. Elle n’est pas cynique, ni désabusée. Elle sait pour qui elle bosse, pour les familles de victimes, pour les vivants en fait, et pour qu’ils puissent continuer d’être vivants, pour qu’ils ne croisent pas les gens qu’elle essaie d’intercepter et qui dézinguent la vie. C’est vraiment ce que j’ai aimé et qui m’a motivée, c’est ce qui fait le cœur de Mina. Et même quand ça va être très dur, cette flamme-là ne s’éteindra pas.

Au milieu des rayonnages d'une librairie, Marie-Laure Brunel-Dupin, à gauche, est assise au côté de Valérie Péronnet, derrière une table recouverte d'une nappe bordeaux, sur laquelle sont déposés plusieurs exemplaires de leur ouvrage : Avant que ça commence.
© Sirpa gendarmerie - BRI (R) B. Louvet

Quelle est la part de réalité et quelle est la part de fiction dans ce roman ?

V.P. : en préambule, pour que tout soit très clair, toute la vie privée de Mina Lacan est sortie de mon imagination débordante et bizarre. Je pense qu’il est important que les gens qui connaissent Marie-Laure le sachent…

M.-L. B.-D. : sur la partie gendarmerie, tout est quasiment réel, en tout cas réaliste. Ce sont de vraies enquêtes, que l’on a transformées, dans le respect du réalisme, par égard aux victimes, pour qu’elles ne reconnaissent pas leurs affaires, parce que notre idée n’est pas de faire un divertissement avec la douleur des familles. Évidemment, les professionnels les reconnaîtront et décèleront les transformations, mais ça, ça ne me dérange pas.

Quant à la partie carrière et gendarmerie, nous sommes très proches de la réalité, sans être bien évidemment fidèles à 100 %. D’une part parce que c’est un roman, et d’autre part parce que je suis toujours gendarme. Certes, cela retrace les difficultés que j’ai rencontrées, qui sont bien réelles, mais ça ne se veut pas un livre règlement de comptes. L’idée était aussi de faire attention à l’Institution, à laquelle je suis très attachée. Elle était certes comme ça au début des années 2000, mais elle a beaucoup changé depuis.

V.P. : Je n’ai rien eu à inventer. Marie-Laure et Mina arrivent à un moment où la gendarmerie est en train de s’ouvrir aux femmes, mais ce n’est pas totalement acquis. Elle arrive avec une technicité nouvelle, mais aussi du haut de ses 22 ans, un petit bout de femme du XXIe siècle qui se trouve aux prises avec des gens presque issus de la fin du XIXe siècle… Les frictions étaient prévisibles. Il faut aussi garder à l’esprit que Marie-Laure voulait avant tout devenir criminologue, pas militaire. Mais quand elle parle de son métier, on sent qu’elle l’adore vraiment et qu’elle fait corps avec la gendarmerie. Ce que j’aime beaucoup dans l’histoire de Mina, et que j’ai vraiment repris de l’histoire de Marie-Laure, c’est que c’est le terrain qui lui a donné raison. Les enquêteurs avaient besoin de cette technicité et quand ils ont entendu parler des outils nouveaux qu’elle pouvait leur proposer, ils ont adhéré.

L’intrigue principale est donc tirée de faits réels ?

M.-L. B.-D. : tout à fait ! C’est le premier dossier, même si le contexte autour de cette affaire est différent. Nous sommes dans le même registre. Toutes nos modifications doivent rester cohérentes jusqu’à la dernière ligne. Le réalisme est fondamental. Il était important pour nous que l’histoire ne vire pas au grand-guignolesque sur des scènes de crime complètement loufoques. Je trouve déjà que l’image des analystes comportementaux est suffisamment loufoque. Dans les séries, les profileuses sont complètement jetées, et dans les bouquins, elles sont le plus souvent dépressives, avec pour meilleure amie une bouteille de whisky. C’est à des années-lumière de moi et de toute l’équipe. Le challenge était donc de raconter la réalité sans que ce soit soporifique.

V.P. : c’est aussi pour ça que je me suis lâchée sur la famille de Mina. Ce qui m’intéressait, c’était de montrer la réalité du métier de Marie-Laure. Le problème pour une romancière que je suis, c’est que dans ce métier, c’est souvent d’une lenteur incroyable, jusqu’au moment où les choses se précipitent, qu’il faut aller choper un mec, essayer de le faire parler. Mais entre les deux, il ne passe rien de dramatique, rien de visuel, surtout sur cette première enquête, travaillée uniquement sur dossier. Là, je dois avouer qu’on a un peu triché, parce qu’on l’a fait se déplacer sur la scène de crime, ce qui n’est pas arrivé. C’est pour cela que mes confrères auteurs en rajoutent et prennent le profil de quinze criminels pour n’en faire qu’un et obtenir un monstre absolu. Tandis que ce que je trouve intéressant dans ce que me raconte Marie-Laure, c’est que la plupart des individus qu’ils ont attrapés avec son équipe sont des gens quasiment normaux. L’idée était donc de conserver toutes les articulations réalistes d’une enquête. Dans cette première affaire, c’est le lien entre les gens.

On ressent d’ailleurs dans le livre un lien très fort avec le terrain !

M.-L. B.-D. : ça aussi, c’est bien réel. Les gens avec lesquels je travaille sont des passionnés à 200 % : ils vivent pour leurs enquêtes, ils travaillent pour leurs enquêtes, ils dorment avec et ils se réveillent le matin pour recommencer. Et quand ils ont cette flamme et qu’en plus on leur donne un outil pour les aider à mieux faire leur travail, ils sont à fond. Finalement, c’est ce terrain qui a propulsé les sciences du comportement à la place qu’elles occupent aujourd’hui en gendarmerie. La méthode n’est pas magique, elle ne donne pas le nom des assassins, mais elle aide les enquêteurs à voir plus vite et mieux.

L’adjudant du livre, s’il est transformé lui aussi, il a bien un nom, une existence. À chaque échange avec Valérie, c’est à lui que je pense. Le lien avec lui est fort parce que c’est avec lui que tout a commencé. Je l’ai contacté à la sortie du livre. Je ne l’avais pas vu depuis 18 ans et il m’a envoyé un petit mot pour me dire qu’il était fier de ce que j’avais fait jusque-là. Mais ce que je ne veux surtout pas, c’est que mes camarades aillent chercher qui est qui dans le livre. C’est aussi pour ça que c’est transformé de la sorte.

V.P. : D'ailleurs une de mes difficultés, c’est que Marie-Laure ne parle pas d’elle, elle ne parle que de ses équipes et des enquêteurs. En tant que romancière, j’ai besoin d’étayer mon personnage principal et il a fallu qu’elle accepte que Mina Lacan soit au centre, et qu’elle y soit un peu aussi. C’est contre-intuitif chez elle. Son réflexe, c’est toujours de dire nous, l’équipe, de parler des enquêtes…

Concrètement, comment avez-vous travaillé ensemble ?

V.P. : je rédige, mais nous coconstruisons l’ouvrage. J’écris des récits intimes depuis trente ans, je peux donc dire que je sais écouter les gens et les aider à se raconter de la manière qui m’intéresse. On passe des journées ensemble où elle me raconte ses dossiers. Ensuite on réfléchit à la construction de l’enquête et comment la transformer pour qu’elle soit méconnaissable aux yeux des gens impliqués tout en restant réaliste. Puis je me mets dans ma petite usine à écrire et j’envoie les chapitres au fur et à mesure à Marie-Laure. En fonction de sa façon de me répondre, je vois si ça fonctionne ou pas. Ce qui est drôle, c’est que même en sachant qui est le coupable, elle est impatiente d’avoir le chapitre suivant.

Je peux écrire librement parce que je sais qu’elle va tout relire pour être sûre que c’est acceptable et réaliste. Et quand je coince, je l’appelle pour lui demander de me réexpliquer. Alors on réfléchit de nouveau ensemble. Donc même si c’est moi qui écris, nous sommes vraiment coautrices. Mina Lacan, nous l’avons inventée ensemble et nous construisons ensemble ses tribulations.

En revanche, au regard du travail de Marie-Laure, nous travaillons souvent de manière décalée. Il faut slalomer dans les week-ends, les soirs, les matins…

M.-L. B.-D. : souvent, quand Valérie a une question par rapport à un personnage ou une technique gendarmerie, j’enregistre des podcasts que je lui envoie pour qu’elle ait bien plus que des mots, qu’elle ait des explications, avec le ton. Finalement, c’est une interview par messages interposés, avec de multiples va-et-vient.

V.P. : Comme je l’évoquais précédemment, la difficulté c’est que Marie-Laure ne parle jamais de ses émotions. Un réflexe professionnel sûrement. Mais moi, j’en ai absolument besoin. C’est là dessus que je la titille le plus, parce que pour écrire à la première personne, j’ai besoin de me mettre dans la peau de Mina Lacan, un peu comme Marie-Laure, à un moment, car c’est son métier, se met dans la peau du criminel qu’elle poursuit. J’ai donc besoin de percevoir ses émotions pour pouvoir les raconter et que le lecteur puisse lui aussi se mettre dans la peau de Mina. C’est le côté le plus subtil de notre duo. Et je pense que Marie-Laure le fait parce qu’elle a confiance en moi. Notre aventure, celle de Mina Lacan, n’est d’ailleurs possible que si on a une confiance aveugle l’une en l’autre. Je sais que Marie-Laure ne me balade pas et elle sait que jamais rien ne sortira de mon ordinateur sans qu’elle l’ait validé. Ce qu’elle me raconte pour que je comprenne le fonctionnement de son métier ne sortira jamais de mon cerveau ou de nos enregistrements, qui passent à la trappe dès que je les ai traités. Mais ça me permet de comprendre son fonctionnement et de produire quelque chose de juste et de réaliste.

Quelle est aujourd’hui la place des sciences du comportement en gendarmerie ?

M.-L. B.-D. : Il a fallu user de tact et de diplomatie, qui vont de pair avec la technicité, pour la faire accepter. Le chemin parcouru est exceptionnel. Nous avons rattrapé en vingt ans ce que d’autres pays ont mis quarante ans à bâtir. Aujourd’hui, les sciences du comportement occupent une juste place ; nous ne sommes ni surévalués, ni sous-employés. Elles ont démontré leur efficacité et sont durablement inscrites dans le paysage judiciaire de la gendarmerie nationale, comme l’un des maillons d’une chaîne complète et stable. Nous n’avons plus rien à prouver. Aujourd’hui le Département des sciences du Comportement (groupe d’analyse comportementale en 2001) est un des départements de la DIvision des Affaires Non Elucidées (DiANE). Cette Division est une aide aux enquêteurs du terrain pour toutes les affaires complexes d’atteintes aux personnes. Nous pouvons apporter une appui sur les affaires récentes comme sur les affaires anciennes (cold case) de différentes manières ; les sciences du comportement en fond partie. Il y a 20 ou 30 ans, on ne se posait en effet pas la question d’essayer de comprendre le crime pour le résoudre. Aujourd’hui, injecter les sciences du comportement sur un dossier ancien et inactif est intéressant parce qu’on est peut-être passé à côté de quelque chose. La seule limite, c’est d’avoir assez de matériel photo dans les rapports.

Nous pouvons être présents de la scène de crime à la garde à vue, et même jusqu’aux Assises. C’est aussi l’une des forces de la gendarmerie que d’avoir des analystes comportementaux qui sont aussi officiers de police judiciaire. Au final, c’est un outil, qu’on va décider d’utiliser ou pas, au même titre qu’on va choisir utiliser des hélicos, des plongeurs ou autre. Il y a une étape que j’ai bien aimée, c’est quand nous sommes entrés dans l’encyclopédie de la gendarmerie, parce qu’à compter de ce moment-là nous n’avions plus le statut d’expérimentation. C’était un petit encadré, mais je me suis dit que désormais on faisait partie des meubles.

Cet opus s’appuie sur la première enquête. Cela laisse supposer qu’il y a une suite. Vous y travaillez déjà ?

M.-L. B.-D. : on ne peut bien sûr pas en rester là. Mais ce n’était déjà pas une option au départ !

V.P. : mon projet est de raconter toute la carrière de Mina. C’est pour cela que l’histoire commence par la fin, quand elle a 65 ans. L’idée n’est pas non plus de rallonger la sauce et d’en faire quinze volumes, mais de rester cohérent et de montrer l’évolution de cette femme, de sa carrière, avec des enquêtes de plus en plus conséquentes, l’évolution aussi de son univers professionnel… Voir comment, petit à petit, les sciences du comportement, qui n’existaient pas quand Marie-Laure est entrée en gendarmerie, sont devenues un des outils efficients dont la gendarmerie se sert régulièrement. On espère pouvoir sortir le tome II au printemps 2024. Mais cela va aussi dépendre de la capacité de mon cerveau à mouliner vraiment vite.

D.R.

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