Le Groupement de gendarmerie départementale de l'Yonne a mis en place la doctrine « Rouge VIF »
- Par Antoine Faure
- Publié le 09 mars 2025

Afin de monter en puissance dans la lutte contre les violences intrafamiliales, le Groupement de gendarmerie départementale (GGD) de l’Yonne a mis en place la doctrine « Rouge VIF ». Elle s’appuie notamment, au stade de la formation, de l’évaluation du danger et de l’enquête, sur la notion de contrôle coercitif, concept psychosocial qui permet de mieux caractériser les infractions en matérialisant les tactiques déployées par les auteurs pour contrôler les victimes. Explications avec le commandant du GGD, le colonel Nicolas Nanni.
Lorsque le colonel Nicolas Nanni prend le commandement du Groupement de gendarmerie départementale (GGD) de l’Yonne, à l’été 2023, il dresse rapidement le constat d’une constante croissance des faits de violences intrafamiliales (VIF). « Entre 10 et 12 % d’augmentation par an en moyenne, détaille-t-il. Il y avait donc besoin d’aller encore plus loin dans la prise en compte de ces violences. J’ai voulu décliner au niveau du Groupement ce que j’avais mis en place entre 2017 et 2020, comme commandant de la Compagnie de gendarmerie départementale (CGD) de Sens, où nous avions notamment développé les partenariats avec les associations de victimes, mais aussi d’auteurs, afin de mieux comprendre les mécanismes de ces violences. »
La stratégie mise en place au niveau départemental a été baptisée « Rouge VIF », en référence au nom du rapport parlementaire, remis le 2 juin 2023 par la députée Émilie Chandler et la sénatrice de l’Yonne Dominique Vérien à Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice, et Isabelle Rome, ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances.
Le contrôle coercitif, une notion nouvelle à prendre en compte
« Cette stratégie comprend six volets, poursuit le commandant de groupement : la formation et le développement des compétences ; la prévention et la sensibilisation ; l’accueil des victimes ; l’évaluation du danger et la sécurisation ; l’enquête ; l’accompagnement et le suivi avec l’appui de partenaires. Elle s’appuie notamment, au stade de la formation, de l’évaluation du danger et de l’enquête, sur la notion de contrôle coercitif. »
Le 28 janvier 2025, l’Assemblée nationale adoptait en première lecture la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, qui comprenait notamment l’introduction dans le code pénal d’un nouveau délit : le contrôle coercitif. Cette notion avait été mentionnée pour la première fois par les arrêts de la cour d’appel de Poitiers du 31 janvier 2024, la faisant ainsi entrer dans la jurisprudence.
Le contrôle coercitif se traduit par une accumulation d’actes qui visent à isoler, contrôler et intimider la victime : contrôler ses liens avec son entourage, réduire son autonomie financière, surveiller ses activités quotidiennes, manipuler ses droits parentaux... Son introduction dans le code pénal permettra de sanctionner au travers d’une infraction unique plusieurs agissements de nature diverse qui, pris isolément, ne constitueraient pas forcément une infraction. Il était donc nécessaire de former les référents VIF de la gendarmerie à cette notion nouvelle qui va prendre de plus en plus d’importance dans les enquêtes.
Les 69 référents VIF de l’Yonne ont suivi la formation « Rouge VIF »
« En matière de formation sur les VIF, la Gendarmerie nationale est déjà très avancée, estime le colonel Nanni, mais j’ai voulu encore développer les compétences des 69 référents VIF du GGD de l’Yonne, avec une formation « Rouge VIF » qui comprend plusieurs modules. Le premier, qui consiste en une intervention d’un docteur en sciences criminelles et psychopathologie, est destiné à éclairer les enquêteurs sur cette notion de contrôle coercitif, et à les inciter à ne plus seulement se focaliser sur la victime, mais à inverser le champ pour se focaliser sur l’auteur, sur les tactiques d’emprise psychologique, mais aussi technique, comme le fait d’installer un tracking sur un téléphone ou une voiture. Le deuxième concerne la matérialisation des faits relevant de ce contrôle coercitif dans les enquêtes. Pour le troisième volet, j’ai souhaité l’intervention de magistrats du siège, afin que les enquêteurs comprennent bien de quels éléments ils ont besoin pour pouvoir juger un auteur. Le quatrième est consacré à l’accompagnement social en lien avec les partenaires. Enfin, le cinquième volet aborde le partenariat spécifique avec l’Association des maires ruraux de l’Yonne (AMR89), dont le but est de renforcer le réseau entre les référents VIF et les référents égalité diversité (RED) de la gendarmerie, d’un côté, et les Élus ruraux relais égalité (ERRE), de l’autre, et ce afin de former ces élus, présents dans les 419 communes de la Zone gendarmerie, à la prise en compte des signaux faibles. Quatre sessions sont programmées en 2025 et une convention cadre sera signée cette année. »
L’efficacité de cette stratégie « Rouge VIF » sera renforcée par le fait que les 69 référents VIF sont affectés dans toutes les unités du GGD, dans les Brigades territoriales autonomes (BTA) et les Communautés de brigades (CoB), bien sûr, mais aussi dans les unités plus spécialisées, comme la Cellule départementale d’observation et de surveillance (CDOS) et la Section opérationnelle de lutte contre les cybermenaces (SOLC). « Cela permet d’être plus précis pour matérialiser les infractions et leur répétition, considère le commandant du GGD. Les faits les plus graves sont repris par les Brigades de recherches (B.R.), avec l’appui des unités spécialisées, par exemple les SOLC pour travailler sur le téléphone ou la voiture de la victime, afin de vérifier qu’elle ne fait pas l’objet d’une surveillance numérique. Mais cette surveillance peut aussi être physique, et je peux également décider d’engager la CDOS, une unité habituellement employée sur des affaires de criminalité organisée, mais qui peut aussi permettre de savoir si une victime est surveillée par des membres de l’entourage de l’auteur. »
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