Indre : les gendarmes mènent avec succès une traque de 46 heures pour retrouver l’auteur d’un grave accident après refus d’obtempérer

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 14 mars 2025
Gendarmes et chien de la gendarmerie sur un chemin de terre lors d'une traque.
© GGD 36

Après 46 heures de traque sur cinq communes de l’Indre (36) situées en zone gendarmerie, un fugitif ayant causé un grave accident sur l’A20 a été interpellé à Châteauroux, mardi 11 mars 2025, mis en examen et incarcéré le jeudi 13 mars. Le fruit d’une mobilisation générale des militaires du Groupement de gendarmerie départementale de l’Indre (GGD 36), renforcés par de nombreux moyens de la gendarmerie : gendarmes mobiles, équipes cynophiles, hélicoptères et drones en complémentarité 3D, unités d’enquête et d’intervention spécialisée. Retour sur une manœuvre exemplaire.

Tout a commencé par un banal contrôle de vitesse, comme les gendarmes de l’Escadron départemental de sécurité routière (EDSR) de l’Indre en réalisent quotidiennement. Ce dimanche 9 mars 2025, un automobiliste est contrôlé à 169 km/h sur l’A20, dans le sens province – Paris. Deux motocyclistes de l’unité le prennent en compte et la voiture en cause est sortie de l’autoroute. Mais au lieu de s’arrêter sur le poste d’interception, le conducteur prend le rond-point à l’envers pour rejoindre l’autoroute… à contre-sens. Après quelques centaines de mètres sur le tube autoroutier, il percute un véhicule circulant avec une personne à bord. Le chauffard sort quasi-indemne du terrible choc et prend la fuite à pied, immédiatement pris en chasse par le lieutenant Simon Corral, commandant l’EDSR par intérim, tandis que deux gendarmes restent aux côtés de la victime, gravement blessée et incarcérée dans l’habitacle. Au terme d’une première chasse intense, le fugitif parvient à s’échapper. Il n’a plus son téléphone, qui se trouve dans sa voiture, et a perdu une chaussure dans le choc. Une traque d’envergure commence.

« Plus exactement, deux dispositifs sont déployés, l’un pour la traque, confié au chef d’escadron Guillaume Fleury, commandant de la compagnie de La Châtre, l’autre pour la gestion de ce grave accident sur l’autoroute, confié à l’adjudant-chef Jordan Druot, gradé supérieur du Peloton motorisé (P.Mo.) d’Argenton-sur-Creuse, avec une désincarcération de la victime par les services de secours et une nécessité de préserver le véhicule accidenté pour les opérations de Police technique et scientifique (PTS) », précise le colonel Julien Faugère, qui commande le GGD de l’Indre depuis l’été 2024. L’officier supérieur avait suivi sur les ondes radio le refus d’obtempérer, le contre-sens sur l’autoroute et l’accident. « Immédiatement, le caractère exceptionnel de l’événement a imposé une montée en puissance rapide, et mes gendarmes ont tous parfaitement répondu présent. »

Il faut dire que les militaires de l’Indre ont eu l’occasion de se « driller » depuis le début de l’année 2025. Le 7 janvier, un individu qui se revendique de Daech menace de faire exploser un train qui se dirige vers Paris. Les gendarmes ne mettront qu’une quinzaine de minutes à se déployer à la gare d’Argenton-sur-Creuse, sur la compagnie de La Châtre, pour l’interpeller dès l’ouverture des portes du train.

Deux semaines plus tard, ils seront également mis à contribution lors de la grande manœuvre de l’enlèvement de David Balland, séquestré à Montierchaume, sur la compagnie d’Issoudun, et libéré par le GIGN.

« Prendre l’ascendant sans délai et le conserver »

Les informations sur le fuyard sont tombées et le profil est sensible. Il est très défavorablement connu des services, dangereux et potentiellement armé. La victime, elle, se trouve alors entre la vie et la mort, « une source de motivation supplémentaire évidente pour les gendarmes que nous sommes », estime le commandant du GGD (NDLR : son pronostic vital n’est à cette heure plus engagé, mais le jeune homme devra suivre une longue rééducation).

La nuit tombe sur l’Indre. Le colonel Faugère met en place un bouclage du périmètre en portant effort sur les points clefs du terrain, comme la gare d’Argenton-sur-Creuse. Le mis en cause s’y est d’ailleurs dirigé pour prendre un train, sans succès…

Un sommaire poste de commandement est installé au Peloton motorisé (P.Mo.) d'Argenton-sur-Creuse. « La stratégie est simple, résume l’officier supérieur de gendarmerie. Il faut immédiatement mettre le maximum de pression sur l’adversaire pour le bousculer, prendre l’ascendant sans délai et le conserver. Parallèlement, on doit porter effort sur la population pour obtenir du renseignement ou en susciter à court et moyen terme. » Un porte-à-porte méthodique est organisé, avec un descriptif très précis du mis en cause, qui porte un survêtement de jogging et surtout une seule chaussure… Au cours de la traque, les gendarmes s’appuieront d’ailleurs sur trois signalements de la population très précieux, qui permettront de réarticuler le dispositif en conduite et d’orienter les choix tactiques du commandant de groupement.

Hélicoptère, drones, équipes cynophiles, motos tout-terrain…

Des moyens importants de la Gendarmerie nationale sont déployés, démontrant une fois de plus sa capacité à les mobiliser rapidement. D’abord dans les airs, avec un hélicoptère venu de la Section aérienne de gendarmerie (SAG) de Vélizy-Villacoublay, ceux des sections de Tours et de Limoges n’étant pas disponibles. « L’hélicoptère équipé d’une caméra thermique a été déterminant la première nuit, du fait que les villages et hameaux sont plongés dans le noir en ruralité, pour des raisons d’économies », note le colonel Faugère. À titre d’anecdote, le pilote de l’EC135 a détecté et signalé dans la nuit noire berrichonne un individu armé d’un fusil de chasse qui défendait sa propriété à 200 mètres devant l’équipe cyno-piste d’Issoudun, appuyée par un groupe du Peloton d’intervention et de surveillance de gendarmerie (PSIG) de La Châtre.

En parfaite complémentarité avec l’hélicoptère, des dronistes de la Brigade de gendarmerie des transports aériens (BGTA) de Châteauroux-Déols ont aussi été engagés. Deux équipes des Groupes d’investigations cynophiles (GIC) de Bourges et de Châteauneuf-sur-Loire, renforcées par une autre du Commandement du soutien opérationnel (COMSOP) de la Gendarmerie nationale, situé au Blanc, se relaient. Les militaires de l’Escadron de gendarmerie mobile (EGM) 47/3 de Châteauroux, en format Détachement à résidence (DARe), sont également mobilisés. Enfin, des motos tout-terrain du GGD du Cher voisin sont rapidement convoyées pour évoluer dans la zone d’action très grasse en raison des récentes pluies massives.

  • Hélicoptère de la gendarmerie en survol d'un corps de ferme
    © GGD 36
  • Deux motocyclistes de la gendarmerie avec des motos tout terrain
    © GGD 36
  • Equipage de la Section aérienne de gendarmerie de Vélizy-Villacoublay à l'intérieur de l'hélicoptère
    © GGD 36
  • Hélicoptère survolant la zone de recherches dans la nuit.
    © GGD 36
  • Gendarme d'une équipe cynophile (à gauche avec son chien à côté d'un hélicoptère, à droite avec son chien)
    © GGD 36
  • Ombre d'un hélicoptère devant une zone boisée
    © GGD 36
  • Hélicoptère de la gendarmerie en survol d'un corps de ferme
    © GGD 36
  • Deux motocyclistes de la gendarmerie avec des motos tout terrain
    © GGD 36
  • Equipage de la Section aérienne de gendarmerie de Vélizy-Villacoublay à l'intérieur de l'hélicoptère
    © GGD 36
  • Hélicoptère survolant la zone de recherches dans la nuit.
    © GGD 36
  • Gendarme d'une équipe cynophile (à gauche avec son chien à côté d'un hélicoptère, à droite avec son chien)
    © GGD 36
  • Ombre d'un hélicoptère devant une zone boisée
    © GGD 36

Avec le concours des exploitants agricoles

Lundi 10 mars, 7 heures du matin. Après une nuit très intense de recherches, et dans le créneau du basculement dispositif nuit/dispositif jour, les gendarmes toujours engagés sur le terrain sont au nombre de six – dont trois en civil à la gare routière et ferroviaire d’Argenton sur Creuse – lorsqu’un habitant signale le mis en cause circulant à vélo, sans doute volé. « En moins de trente minutes, et en mode fulgurance, nous sommes remontés à 68 militaires engagés », souligne le commandant de groupement. Cette capacité exceptionnelle à monter en puissance a d’ailleurs été mise en avant par le préfet de l’Indre, Thibault Lanxade, dans son communiqué officiel.

Repéré par les gendarmes, le fugitif abandonne son vélo. À trois reprises il sera pris en chasse par les militaires à pied, dans le même secteur, ce qui va permettre de réussir à le figer dans une vaste zone boisée de 400 hectares sur la commune de Velles. Avec l’aide de plusieurs exploitants agricoles du secteur de Lothiers, qui connaissent parfaitement le terrain et avec qui les gendarmes entretiennent d’excellentes relations, le premier dispositif jeté est d’abord valorisé puis durci. On compte alors une centaine de militaires engagés, toutes unités confondues, déterminés à retrouver le mis en cause. La zone est intégralement fouillée au sol et scannée depuis les airs par la caméra thermique de la SAG de Vélizy-Villacoublay, revenue après un changement d’équipage dans les Yvelines.

La fin de journée approche. Le commandant de groupement opère des bascules de forces, en maintenant un dispositif permanent dans la zone déjà reconnue. Dans la nuit du lundi 10 au mardi 11 mars, le fugitif est signalé à une troisième reprise, dans un corps de ferme à 600 mètres du périmètre. Une des patrouilles sur roue toute proche se rend immédiatement sur la position, rejointe très vite par sept autres. Le mis en cause échappe une nouvelle fois aux militaires et parvient au milieu de la nuit à trouver un moyen de locomotion pour remonter sur Châteauroux, possiblement par des chemins. La traque continue…

Un renseignement de la Police nationale (P.N.) va permettre de confirmer sa présence dans la métropole berrichonne. Des surveillances sont mises en place par la gendarmerie, notamment autour d’un appartement en particulier. Contactée, la permanence du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) valide l’engagement des militaires de l’antenne GIGN de Tours, renforcée par le PSIG Sabre d’Issoudun et les PSIG de La Châtre et du Blanc. La domiciliaire est préparée, l’opération déclenchée, et l’individu interpellé à 16 h 55.

« C’est le résultat d’une mobilisation totale de tous les gendarmes du groupement, des trois compagnies et de l’EDSR, renforcés par des unités et des moyens d’autres départements, sans oublier un état-major dans l’anticipation permanente, insiste le colonel Faugère. Illustration avec mon officier du Groupe de soutien ressources humaines (GSRH) et un Service logistique finances (SLF) ultra-réactifs pour ravitailler les militaires en eau sur le terrain et livrer 86 repas sous court délai, ce qui est tellement essentiel pour le moral des troupes. »

Mise en examen et placement en détention provisoire

Jeudi 13 mars 2025, comme l’a indiqué David Marcat, procureur de la République de Châteauroux, le mis en cause a été présenté en fin d’après-midi devant un juge d’instruction à Châteauroux. Âgé de 19 ans, il a déjà été condamné à de multiples reprises au cours des quatre dernières années pour des délits routiers, des vols aggravés, des violences aggravées, des infractions à la législation sur les stupéfiants… Il faisait l’objet d’un mandat de recherche pour des faits criminels suivis en région parisienne, ce qui semble expliquer sa fuite au contrôle de gendarmerie, d’autant que le véhicule était volé et qu’il ne dispose pas du permis de conduire.

Il a été mis en examen pour les faits qualifiés à ce stade de « blessures involontaires avec ITT supérieure à trois mois par conducteur avec circonstances aggravantes, refus d’obtempérer aggravé, recel de vol, conduite sans permis, non-assistance à personne en danger ». L’ensemble des faits ayant été commis en état de récidive au regard des différentes mentions figurant sur son casier judiciaire. À l’issue des débats, il a été placé en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention de Châteauroux.

Une décision accueillie avec grand soulagement par la famille de la jeune victime, particulièrement reconnaissante envers la Gendarmerie nationale pour sa mobilisation.

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