En l’an de grâce 1790, il avait été envisagé de baptiser ce territoire « Côtes-du-Sud », par opposition aux Côtes-du-Nord, qui deviendront deux siècles plus tard les Côtes-d’Armor. Mais cette logique géographique implacable avait finalement été écartée pour favoriser un terme bien breton : « mor-bihan », qui signifie « petite mer ».

49 réservistes et 32 gendarmes mobiles

Le Morbihan est l’un des quatre départements de la région Bretagne et, comme ses trois voisins, il possède un littoral, en l’occurrence long de plus de 1000 kilomètres, en comptant le pourtour des îles, ce qui le classe deuxième au niveau national dans cette catégorie, derrière le Finistère. Qui dit littoral, dit vacanciers, et qui dit vacanciers, dit Dispositif estival de protection des populations (DEPP) mis en place par la gendarmerie. « C’est une particularité de la région Bretagne de ne compter que des départements qui ont un DEPP, note le lieutenant-colonel Sébastien Coirier, commandant en second du Groupement de gendarmerie départementale (GGD) du Morbihan. Il n’est donc pas possible pour notre GGD d’être renforcé par des personnels d’autres GGD, comme cela peut se produire dans d’autres régions pendant la saison estivale. »

Dans le Morbihan, la gendarmerie est organisée en quatre compagnies : Vannes, Lorient, Ploërmel et Pontivy. Seules les deux premières ont un DEPP. « Mais il n’est pas non plus envisageable de basculer des forces des deux autres compagnies qui connaissent elles aussi une augmentation de leur activité durant cette période, avec un tourisme vert », poursuit le lieutenant-colonel Coirier.

Pour faire face à l’afflux de population pendant l’été, le GGD du Morbihan bénéficie donc quotidiennement du renfort de 49 réservistes, de 32 gendarmes mobiles répartis en quatre Détachements de surveillance et d’intervention (DSI), à Carnac, Riantec, Quiberon et Saint-Gildas-de-Rhuys, ainsi que d’un Poste à cheval, à Erdeven, armé par des gardes républicains et des gendarmes départementaux. Huit postes provisoires sont ouverts à Damgan, Penestin, Guidel, La Trinité-sur-Mer, ainsi que sur les îles d’Houat, Hoedic, Arz, et sur l’Île aux Moines. La plupart de ces postes sont armés uniquement par des réservistes, sauf ceux des îles d’Houat et Hoedic, avec la présence d’un gendarme d’active du GGD du Morbihan, et même le renfort d’un gendarme mobile détaché sur Houat.

Tenir la presqu’île

Pour le nouveau commandant de la Compagnie de gendarmerie départementale (CGD) de Vannes, le chef d’escadron Fabien Dutartre, le DEPP est un dispositif essentiel qui permet de tenir efficacement le territoire. « Le positionnement est très cohérent, estime-t-il. Les deux postes provisoires de Damgan et Penestin renforcent la Communauté de brigades (CoB) de Muzillac, tandis que les gendarmes mobiles du DSI de Saint Gildas tiennent la presqu’île de Rhuys , au profit principalement de la CoB de Theix-Noyalo. Cela renforce non seulement les brigades de Sarzeau et de Theix-Noyalo dans ce secteur, mais cela évite aussi de devoir y projeter le Peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG) de Vannes, car cela peut être difficile ensuite de le rappeler pour une autre intervention. »

L’apport des réservistes est également essentiel lors des événements sportifs ou festifs qui rythment l’été. « À titre d’exemple, poursuit le commandant Dutartre, lors de la course cycliste du Tour de l’Avenir, qui a traversé le département du Morbihan, 10 des 11 militaires engagés pour le dispositif de jalonnement fixe de l’épreuve étaient des réservistes. Cela permet à la CoB de bénéficier d’une respiration dans l’organisation de son service. »

Ce sont les gendarmes mobiles du DSI qui sécurisent la presqu’île de Rhuys, long bras de 25 kilomètres entre golfe et océan. Sur le port du Crouesty, le plus grand port de plaisance de Bretagne, les gendarmes mobiles patrouillent jour et nuit. « Nous sommes arrivés le 17 juillet, précise le lieutenant Côme, de l’Escadron de gendarmerie mobile 21/3 de Mont-Saint-Aignan, chef du DSI. Nous sommes huit militaires et nous patrouillons à deux, trois ou quatre, sur quatre tranches : matin, après-midi, début de nuit et fin de nuit. En évitant, dans la mesure du possible, d’enchaîner deux créneaux. Les infractions principales sont les tapages nocturnes, des ivresses sur la voie publique, à la sortie des bars et dans les campings, la circulation à vélo sous l’empire de l’alcool ou de stupéfiants. » La mission des gendarmes mobiles s’est terminée le 24 août, pour permettre notamment aux militaires de prendre des repos avant le fort engagement de la coupe du Monde de rugby.

À pied, à cheval et à vélo

À Damgan, le poste provisoire est partagé avec la police municipale, comme les patrouilles, à pied, à vélo électrique, et même à cheval puisque la municipalité a ouvert un poste à cheval, pour lequel la gendarmerie fournit ponctuellement un gendarme équitant, soit d’active, soit réserviste. « Au total, ce sont neuf personnels, cinq réservistes de la gendarmerie, un policier municipal et quatre Agents de surveillance de la voie publique (ASVP) qui travaillent en complémentarité, résume le lieutenant Philippe Pouvreau, qui commande la CoB de Muzillac. Les réservistes offrent à la gendarmerie une proximité avec les commerçants et les estivants qu’elle ne pourrait pas avoir sans eux. Ils sont très investis et tiennent à répondre aux attentes. Il existe une belle cohésion entre les anciens de l’arme et les plus jeunes, renforcée par le fait qu’ils sont logés ensemble dans des locaux mis à disposition par la municipalité. »

Le chef de poste est le major de réserve Éric, qui a quitté le service actif le 31 décembre 2022 et a rejoint la réserve en avril de cette année. « C’est ma première mission comme chef de poste et je suis très content de la manière dont cela se passe. Il y a un excellent contact avec la population et les commerçants. Nous gérons les interventions sur les communes de Damgan et Ambon, souvent en lien avec la PM qui nous rapporte des faits. Nous patrouillons sur les tranches 9h-13h et 15h-19h, avec également des services très fréquents de nuit, lors des fêtes, des marchés nocturnes, etc. » Aux côtés d’Éric, on trouve donc une équipe de quatre réservistes. Parmi eux, l’adjudant Roland, retraité de l’arme et réserviste depuis 2011 : « J’habite dans le coin et je fais souvent des missions dans le Morbihan l’été. On est tous volontaires et donc tous contents d’être là ! » Pour la gendarme de réserve Sylvia, assistante d’éducation dans un lycée, « cet engagement est la concrétisation d’une envie que j’avais depuis toute petite. Quand je suis arrivée en Bretagne, il y a deux ans, je me suis lancée, avec une grande soif de découvrir et d’apprendre. »

« L’été 2023 dans le Morbihan a connu une activité relativement modérée, en comparaison des saisons estivales précédentes, à la faveur d’une météorologie ayant indéniablement tempéré les ardeurs, et limité le nombre de soirées, de barbecues et de sorties dans les bars, relève le lieutenant-colonel Coirier. Pour autant, l’activité reste soutenue, et l’attrait croissant pour les côtes bretonnes une tendance de fond, justifiant pleinement - s’il le fallait encore - le caractère indispensable du DEPP du Morbihan dans son format actuel. »

Prochaine étape de notre tour du Morbihan : le golfe, avec la Brigade nautique (B.N.) et le poste provisoire de l’Île aux Moines.