La Réunion : interpellation de l’auteur d’un périple mortel

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 01 novembre 2023
Photo d'illustration.
© P. Héraud

Un homme de 38 ans a été interpellé ce samedi 28 octobre 2023, au centre-ville de La Possession, sur l’île de La Réunion, par les militaires de l’Antenne GIGN. Dans un périple criminel, le mis en cause venait de tuer trois personnes et d’en blesser huit autres. Des faits d’une ampleur peu commune pour l’île, qui ont nécessité une intervention d’envergure, mobilisant jusqu’à 70 militaires, dont 25 gendarmes du GIGN, afin de répondre aux différents enjeux opérationnels.

Il est 9 heures, soit 7 heures à Paris, ce samedi 28 octobre 2023, lorsque les gendarmes de l’antenne GIGN de La Réunion interpellent un homme retranché dans une agence bancaire du centre-ville de La Possession, mettant ainsi fin à un périple criminel au cours duquel l’individu aura tué trois personnes, dont sa mère et sa nièce, et blessé huit autres, dont un militaire du GIGN.

Double meurtre à La Possession

Tout commence deux heures et demie plus tôt, quand l’individu, âgé de 38 ans, poignarde sa mère et sa jeune cousine, avant de prendre la fuite à bord de son véhicule, non sans avoir menacé son cousin, venu sur les lieux, alerté par les cris et les aboiements.

Vers 6 h 45, le SAMU, arrivé sur place, prévient le Centre d’opérations et de renseignement de la gendarmerie de la survenue de cette agression mortelle. Sur la scène, le médecin n’a en effet pu que constater le décès des deux victimes, âgées respectivement de 69 et 5 ans et demi.

Début d’un périple criminel

Mais l’auteur présumé n’en reste pas là. Sur son itinéraire de fuite, il percute un joggeur, puis un cyclomotoriste qui se portait au secours de la victime, avant de poursuivre sa route en direction du parking du supermarché Leclerc, où il vient percuter deux personnes en train de charger leurs courses dans leur véhicule, roulant même sur l’une des victimes.

Il fait ensuite le tour du parking, mettant en danger les personnes présentes. Un piéton parvient à s’écarter de justesse de sa route. En quittant les lieux, le mis en cause percute alors volontairement un motard, mettant fin à sa course folle, mais pas à ses actes criminels. Il sort en effet de son véhicule et, armé d’un couteau, pourchasse sa dernière victime, avant de se réfugier dans l’agence bancaire jouxtant le supermarché. À peine à l’intérieur, il s’en prend alors à un agent technicien de surface, auquel il assène plusieurs coups de couteau qui s’avéreront mortels. La victime décédera durant son transport à l’hôpital.

Il est 6 h 50. L’homme est désormais retranché au sein de l’agence bancaire.

Mobilisation rapide des forces de gendarmerie

Dès qu’elle reçoit l’alerte (à 6 h 45), la gendarmerie déploie rapidement d’importants moyens pour boucler les différents périmètres, gérer l’urgence et l’intervention, prendre en compte les différentes scènes de crime et débuter les investigations.

Près de 70 personnels sont ainsi engagés afin de répondre à ces différents enjeux opérationnels tout au long du parcours du criminel, mobilisant ainsi progressivement les effectifs de la compagnie de gendarmerie de Saint-Paul, dont la brigade territoriale autonome de La Possession et le peloton de surveillance et d’intervention de gendarmerie, mais aussi les autres brigades ainsi que des réservistes, le détachement de surveillance et d’intervention de l'escadron de gendarmerie mobile déplacé, en l’occurrence le 25/3 de Cherbourg, l’état-major du COMGEND (notamment le commandant et son adjoint, la cellule renseignement, le quart opérationnel, etc.), les forces d’intervention spécialisée (25 militaires de l’A-GIGN) et, enfin, le "bloc" judiciaire, fort de 25 personnels, issus de la brigade de recherches de Saint-Paul, de la section de recherches de La Réunion, de la section d’appui judiciaire, dont la cellule d’identification criminelle, sans oublier l’appui à la mobilité des unités apporté par les militaires de l’escadron départemental de sécurité routière. Aux côtés des forces de gendarmerie, une trentaine de sapeurs-pompiers sont également mobilisés sur l’événement.

Intervention parfaitement maîtrisée de l’A-GIGN

Tout est allé très vite. Seulement 20 minutes se sont écoulées depuis la commission des premiers faits. Le colonel Frédéric Labrunye, commandant de la gendarmerie de La Réunion, se rend immédiatement sur les lieux, à proximité de l’agence bancaire, pour commander la manœuvre, rapidement rejoint par la procureure de la République de Saint-Denis, Véronique Denizot, et le préfet de la Réunion, Jérôme Filippini. « Ma priorité est alors avant tout d'avoir une vue d'ensemble et claire des faits, malgré le délai dans l'alerte - quinze minutes importantes en l’occurrence - et la multiplicité des sites et des signalements liés au périple de l’auteur, relate le colonel Labrunye. Il faut aussi rapidement discerner et comprendre ce qui se passe au sein de l'agence bancaire, et notamment s’assurer que l'intéressé y est toujours retranché, tout en sécurisant la zone, avec une complexité accrue du fait des nombreux badauds présents, mais aussi des nombreuses ouvertures, fenêtres et balcons, donnant sur le site. »

Dans le même temps, les enquêteurs réalisent rapidement l’environnement du suspect afin d’identifier son profil. « Le contexte national et international vient là aussi apporter une pression supplémentaire, précise le commandant du COMGEND. L’éventualité d’une radicalisation, et donc le potentiel caractère terroriste de l’acte, ne peuvent être écartés de prime abord. C’est donc une information nécessaire à la conduite de l'opération, autant que la première attente des autorités. »

Eu égard au profil de l’homme et à l’impossibilité d’entrer en contact avec lui, la carte de la négociation est vite écartée. Les militaires de l’antenne GIGN se préparent donc à donner l’assaut.

La décision de l’intervention est prise, « même si nous n’avons pas toutes les cartes en main et que nous ne savons pas réellement ce qui se trouve dans l'agence bancaire, faute d'avoir pu observer l’intérieur à cause de la configuration des lieux. » Le « GO » est donné à 8 h 45. La progression est assez longue, le mis en cause ayant « préparé son terrain » en disposant des obstacles, avant de résister violemment aux gendarmes, blessant gravement un militaire de l’A-GIGN à la jambe avec une arme blanche. 9 heures s’apprêtent à sonner, quand les gendarmes de l’unité d’intervention spécialisée parviennent à interpeller et menotter l’auteur présumé, sans qu’aucun coup de feu ne soit tiré, « faisant un usage strictement nécessaire de la force », et permettant ainsi de livrer l’homme à la justice, « dans l'intérêt des victimes et de leurs familles ».

Une enquête pour assassinat et de tentatives d’assassinat

Commence alors une phase judiciaire tout aussi complexe  : « deux scènes de crime simultanées à gérer, distantes de plusieurs kilomètres, trois personnes décédées, huit blessés, dont deux hospitalisés, des dizaines d'auditions de témoins et de victimes à recueillir et une garde à vue ultra-sensible à conduire compte tenu de l'émotion générée », résume le colonel Labrunye, soulignant que ces faits sont d’une ampleur peu commune pour l’île.

Immédiatement, un gel des lieux est réalisé sur les différentes scènes d’infraction, afin de permettre à la cellule d’identification criminelle de procéder aux constatations. La direction d’enquête est confiée à la section de recherches, appuyée par la brigade de recherches et les moyens de la compagnie de Saint-Paul.

Placé en garde à vue après examen médical, l’auteur présumé va alors reconnaître les faits, expliquant avoir agi dans le but de tuer l’ensemble des victimes recensées, sans faire état d’un autre mobile. L’intéressé, qui présente un casier judiciaire néant, n’était pas connu pour radicalisation et qui ne faisait l’objet d’aucun fichage, a été présenté ce lundi 30 octobre 2023 devant le Parquet, le juge d’instruction, puis le juge de la liberté et de la détention. Il est mis en examen et placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de Domenjod.

Les investigations se poursuivent désormais dans le cadre de l’information judiciaire ouverte le même jour, des chefs d’assassinats et tentatives d’assassinats, pour l’ensemble des faits commis samedi dernier.

« L'engagement, la réactivité, la lucidité, la solide cohésion, le dévouement et la bravoure des militaires impliqués témoignent du haut niveau d'investissement professionnel de la gendarmerie à La Réunion. La mission était d'une rare complexité. Mais comme elle est sacrée, elle a été accomplie jusqu'au bout et payée au prix fort d'un blessé grave dans nos rangs », a souligné le colonel Labrunye à l’endroit des gendarmes ayant participé à l'intervention et à l'interpellation de l'auteur de ce dramatique périple.

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