70 ans des FAGN : la maintenance aéronautique de la gendarmerie décryptée

  • Par le capitaine Tristan Maysounave
  • Publié le 05 septembre 2023
Photo montrant un militaire du CNaMAG intervenant sur la turbine d'un hélicoptère de la gendarmerie.
Un gendarme du Centre national de maintenance aéronautique de la gendarmerie (CNaMAG) intervient sur la turbine d'un hélicoptère de la gendarmerie.
© GEND/ SIRPA-G/ BRI DOUBLET

Les Forces aériennes de la gendarmerie nationale (FAGN) sont souvent abordées à travers le prisme de leurs unités opérationnelles, plus spectaculaires et plus visibles du grand public. À l’occasion des 70 ans des FAGN, Gendinfo vous fait découvrir une unité moins connue, mais essentielle à leur bon fonctionnement : le Centre national de maintenance aéronautique de la gendarmerie (CNaMAG).

Le Centre national de maintenance aéronautique de la gendarmerie (CNaMAG) est implanté sur la base aérienne 123 d’Orléans-Bricy, à quelques kilomètres d’Orléans, dans le département du Loiret. Sur les 736 hectares de la base, se côtoient les infrastructures de l’armée de l’Air et de l’Espace destinées à accueillir les A400M et celles de la gendarmerie. Placé sous les ordres du Commandement des forces aériennes de la gendarmerie nationale (COMFAGN), le CNaMAG assure une mission essentielle en réalisant, soit exclusivement soit conjointement avec les unités opérationnelles, la maintenance des aéronefs de la gendarmerie.

Un centre unique (ou presque) en France

À l’entrée du site, nous sommes accueillis par le capitaine Loïc Quiévreux, qui assure le commandement par intérim du centre. Officier des armées (O.A.), il dispose d’un bagage conséquent dans le domaine de l’aéronautique, puisqu’il a occupé différentes responsabilités d’encadrement pendant plus de dix ans au sein de l’Aviation légère de l’armée de Terre (ALAT), avant de rejoindre la gendarmerie. Sont aujourd’hui placés sous ses ordres 86 personnels de différents statuts. Ils sont ainsi 72 à Bricy et 14 à Nîmes, où se trouve un détachement du CNaMAG. Militaires ou civils, ils sont avant tout recrutés pour leurs compétences, afin d’être employés dans ce domaine de haute technicité.

L’ensemble des hélicoptères de la gendarmerie transite par le CNaMAG : la flotte des 26 hélicoptères AS350 (Écureuil) et celle des 15 appareils EC135 (Ketoupa) sont ainsi entretenues à Bricy et celle des EC145 (Choucas) à Nîmes, sous la direction du site principal. Il a en effet été décidé de concentrer la maintenance des EC145 du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer en un seul lieu. Les 15 Choucas de la gendarmerie côtoient ainsi ceux de la sécurité civile, les fameux « Dragons », bien plus nombreux dans cette région sujette aux incendies.

Une mission essentielle : garantir la disponibilité des hélicoptères de la gendarmerie

Trois militaires du CNaMAG intervenant sur un AS350 Écureuil à l'occasion d'une opération de maintenance.

Militaires du CNaMAG intervenant sur un AS350 Écureuil.

© GEND/ SIRPA-G/ BRI DOUBLET

L’enjeu est de taille pour le CnaMAG, qui doit agir efficacement et complètement sur les machines, afin de permettre aux unités opérationnelles de les réemployer rapidement dans des conditions de sécurité optimales.

Les équipes du CNaMAG interviennent à différents moments de la vie d’un hélicoptère. De manière systématique, à l’occasion des visites périodiques, au cours desquelles l’appareil est alors entièrement démonté et inspecté sur le site de Bricy ou de Nîmes, en fonction de son type. Mais aussi en appui des Sections aériennes de la gendarmerie (SAG), qui constituent les unités aéronautiques opérationnelles de l’Institution. Ainsi, selon un principe de subsidiarité qui implique que les mécaniciens des unités locales traitent d’abord les défaillances rencontrées sur les appareils, les équipes du CNaMAG interviennent au profit des SAG en leur fournissant les pièces nécessaires et éventuellement une expertise technique. Dans certaines situations plus délicates, des spécialistes du centre sont dépêchés sur place, en métropole ou en outre-mer, afin de résoudre le problème.

Comme l’explique le capitaine Loïc Quiévreux, « l’efficacité de la maintenance aéronautique repose sur cinq piliers abordés au cours de la formation d’officier mécanicien : du personnel qualifié, des outillages vérifiés, une documentation à jour, un aéronef certifié et des pièces de rechange conformes. »

Une organisation en trois départements de haut niveau

Afin d’assurer la maintenance des aéronefs de la gendarmerie, le CNaMAG est divisé en trois départements placés sous la responsabilité d’officiers de gendarmerie.

Le Département du maintien de la navigabilité (DMN) traite les sollicitations techniques des unités opérationnelles et veille au suivi de la documentation des aéronefs. Il contrôle le respect des normes nationales et internationales et constitue donc l’ordonnateur de l’atelier.

Photo présentant plusieurs personnes travaillant sur leurs postes de travail au sein du Département de l'appui opérationnel (DAO) du CNaMAG.

Département de l'appui opérationnel (DAO) du CNaMAG.  

© GEND/ SIRPA-G/ BRI DOUBLET

Le Département de l’appui opérationnel (DAO) est principalement responsable de la gestion des contrats avec les industriels, en lien avec la Direction de la maintenance aéronautique (DMAé) : commande de pièces, prestations particulières, gestion des outillages, transport d’aéronefs. « C’est le centre névralgique du CnaMAG, car sans pièce, pas de maintenance », insiste le capitaine Quiévreux. Pour les équipes du département, une rigueur de tous les instants est de mise dans ce domaine, car le prix de la moindre petite pièce peut rapidement avoisiner plusieurs centaines de milliers d’euros, et l’erreur de commande clouer pour plusieurs semaines un appareil au sol. La tâche est d’autant plus complexe que les trois flottes d’hélicoptères sont régies par trois contrats distincts, qui dépendent de trois industriels différents. « La mise en œuvre d’une solide doctrine et de process détaillés permet d’assurer une traçabilité méticuleuse et de garantir une disponibilité sans faille des pièces aux unités opérationnelles », explique le capitaine Raphaël, responsable du suivi des contrats avec les industriels.

Enfin, fort d’une quarantaine de personnels, le Département production (D.P.) réalise les entretiens importants, les dépannages d’urgence ainsi que les convoyages des aéronefs. Les mécaniciens aéro employés au sein de ce département se répartissent en trois spécialités : cellule et moteur, avionique et réparateur structure.

Rattachée au D.P., une cellule composée de militaires expérimentés est spécifiquement chargée du contrôle de production et de la formation continue. Leur mission est cruciale : intervenir à chaque étape de la production afin de vérifier qu’aucune erreur n’a été commise et que la documentation a été scrupuleusement suivie. Ce contrôle systématique permet ainsi d’éviter la commission d’une erreur qui pourrait s’avérer fatale pour le pilote au moment de reprendre en main la machine.

Une visite périodique à la loupe

Tout comme nos voitures, les hélicoptères sont obligatoirement soumis à des visites périodiques à intervalles réguliers. Les échéances ainsi que les pièces à vérifier à l’occasion de ces visites sont déterminées par le constructeur. Le CNaMAG utilise le logiciel AMASIS (Aircraft Maintenance And Spares Information System) afin d’effectuer un suivi complet des hélicoptères de la gendarmerie. À titre d’exemple, l’AS350 (Écureuil), commercialisé à partir des années 1970, doit faire l’objet d’une visite périodique tous les quatre ans ou 1 200 heures de vol, et d’une visite plus complète tous les 14 ans.

Quatre militaires du CNaMAG réceptionnent un nouveau moteur d'hélicoptère.

Militaires réceptionnant un moteur d'hélicoptère.

© GEND/ SIRPA-G/ BRI DOUBLET

« Une visite périodique fait d’abord l’objet d’une préparation méticuleuse en amont, détaille l’adjudant Steven, chef d’équipe au sein de l’atelier du département production. Afin de préparer l’arrivée de la machine, l’unité opérationnelle transmet une fiche d’observation avec les tâches de maintenance à effectuer. Certains travaux sont immuables, mais d’autres sont spécifiques et dépendent notamment de l’environnement d’emploi de la machine (humidité importante en outre-mer, sollicitations extrêmes en haute montagne, etc.) et de son état de vétusté. » Une réunion de chantier a ensuite lieu avec le département du maintien de la navigabilité, à l’issue de laquelle le département de l’appui opérationnel effectue les commandes nécessaires auprès des industriels avant l’acheminement de l’appareil par son unité.

Un entretien conséquent de l’appareil est alors réalisé. L’aéronef fait d’abord l’objet d’une prise en compte à l’occasion d’un vol d’entrée, qui permet l’enregistrement des paramètres avant sa maintenance. La machine est ensuite démontée et inspectée. Les pièces sont stockées de manière réglementée, afin d’éviter toute usure prématurée. « Les moteurs sont par exemple stockés dans une salle grise, zone contrôlée en hygrométrie et en température, poursuit l’adjudant. Les pièces le nécessitant sont remplacées et des commandes complémentaires peuvent éventuellement être réalisées en fonction des résultats de l’inspection. »

À l’issue, la machine est remontée. Le réassemblage fait l’objet d’un contrôle à chaque étape. « Nous utilisons la technique du contrôle croisé, particulièrement présente dans le domaine de l’aéro. Le dialogue entre mécaniciens prime en cas de doute. Qu’importe le grade, en matière de maintenance aéronautique, il faut être capable de dire non », précise le capitaine Éric, chef de la cellule contrôle production et formation continue du département production.

Une remise en service progressive

Photo présentant deux militaires de la gendarmerie effectuant des opérations sur un hélicoptère sur la piste présente à la sortie du hangar du CNaMAG.

Militaires du CNaMAG préparant un hélicoptère pour un point fixe (essai au sol).

© GEND/ SIRPA-G/ BRI DOUBLET

Le protocole des vols techniques définit les étapes de la remise en service de l’aéronef. Dans ce cadre-là, plusieurs points fixes (essais au sol) doivent être réalisés avant tout essai en vol. L’objectif est de se prémunir des dangers les plus courants (incendies ou encore résonance au sol) et de recouvrir les normes déterminées par le constructeur.

Afin de réaliser ces essais, un pilote de vols techniques est affecté au CNaMAG. Il peut être ponctuellement renforcé par les pilotes des unités opérationnelles en cas de besoin. Le gendarme Aldis, ancien pilote de l’ALAT, occupe cette fonction depuis 2019. Il a été choisi en raison de son expérience et a suivi une formation spécifique au Centre national d'instruction des forces aériennes de la gendarmerie (CNIFAG) situé à Cazaux (Gironde).

« Les essais sont réalisés step by step, explique le pilote. Le but est de déceler quelque chose qui ne fonctionne pas avant que ne survienne un problème critique en vol. »

Toutes les opérations de maintenance sont consignées dans le carnet de contrôle des opérations de service courant, communément appelé « carnet de forme de l’aéronef ». La visite périodique d’un hélicoptère est donc une entreprise particulièrement complexe, qui dure plusieurs semaines et qui nécessite un haut niveau de technicité.

Une formation exigeante et continue

Les personnels affectés au CNaMAG sont d’abord soumis à une formation initiale interarmées.

Les officiers mécaniciens effectuent une formation de cinq mois au sein des écoles militaires de Bourges (Cher), avant d’être affectés au CNaMAG.

Les sous-officiers mécaniciens effectuent leur formation initiale à l’École de formation des sous-officiers de l’armée de l’Air et de l’Espace (EFSOAAE). À l’issue de leur scolarité d’une année, ils sont formés sur des qualifications qui sont fonction du type d’appareil sur lequel ils se destinent à travailler.

À l’issue de cette formation, ils doivent obtenir le Certificat technique supérieur (CTS) qui se compose de cinq modules. Les quatre premiers, d’une année chacun, s’effectuent au centre, le cinquième, qui dure deux ans, ne peut se faire qu’en unité opérationnelle. Les mécaniciens acquièrent ainsi progressivement de nouvelles compétences et de nouvelles responsabilités, tant dans le domaine de la maintenance que d’un point de vue opérationnel.

Cette formation est d’autant plus exigeante que les aéronefs de la gendarmerie n’emportent qu’un seul pilote en vol. Par conséquent, les sous-officiers mécaniciens secondent les pilotes en tant que mécaniciens de bord. Au cours de leur carrière, l’effort de formation doit être permanent.

Les mécaniciens de bord sont évalués chaque année par le CNIFAG. Les process évoluent sans cesse. La cellule contrôle production et formation continue assure donc une veille en la matière et forme les mécaniciens à ces nouveaux savoir-faire. La chaîne RETEX (RETour d’EXpérience) des Forces aériennes de la gendarmerie nationale est également fortement sollicitée afin de diffuser les bonnes pratiques aux équipes du CNaMAG.

Entrée du CNaMAG dans une nouvelle dimension

Photo présentant le hangar du CNaMAG accueillant les hélicoptères de la gendarmerie en maintenance. Les portes du hangar sont visibles au fond. Sur la gauche de la photo se trouvent deux appareils, ainsi que des militaires travaillant sur des postes de travail. À droite se trouve un hélicoptère ainsi qu'un véhicule gendarmerie.

Hangar du CNaMAG accueillant les hélicoptères en maintenance.

© GEND/ SIRPA-G/ BRI DOUBLET

Depuis presque un an, le CNaMAG prépare l’arrivée du H160 fabriqué par Airbus Helicopters. À la faveur du plan de soutien à l’aéronautique, présenté en juin 2020 par le Gouvernement, la gendarmerie nationale, en lien avec la Direction générale de l’armement (DGA), a en effet décidé d’acquérir dix machines de ce type, ce qui constitue le plus grand programme de son histoire.

Les personnels du CNaMAG ont donc commencé à se former sur cet hélicoptère, qui représente un bond en avant technologique. Celui-ci présente également des proportions exceptionnelles. Les portes des hangars accueillant les aéronefs en maintenance devront ainsi être rehaussées afin de pouvoir accueillir le H160 dès 2024.

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