JOP 2024 : le groupe de planification de la région de gendarmerie d’Île-de-France à pied d’œuvre, de la préparation de la manœuvre au désengagement des forces

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 18 septembre 2024
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De gauche à droite, le colonel Louis-Paul Le Ravallec, le général Jean-François Morel et le général Patrick Henry.

La grande parade des athlètes, des volontaires et des organisateurs des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024 a sonné le clap de fin d’un été olympique ayant impliqué un engagement des forces de gendarmerie inédit, tant sur le plan de l’ampleur de la manœuvre que de sa durée. De la préparation de la génération de forces et de tous les volets du soutien logistique, au désengagement du dispositif à la mi-septembre 2024, le groupe de planification du Commandement des forces de gendarmerie (COMFORGEND) pour les JOP de Paris 2024 en Île-de-France a été à la manœuvre. Explications avec le colonel Louis-Paul Le Ravallec, à la tête de la structure depuis l’été 2023.

Quel était le rôle du groupe de planification au sein du Commandement des forces de gendarmerie (COMFORGEND) pour les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024 en Île-de-France ?

Une Directive initiale de planification (DIP), signée par le Directeur des opérations et de l’emploi (DOE) le 29 septembre 2023, fixait la répartition des rôles et des responsabilités au sein de la gendarmerie, entre la direction générale de la gendarmerie nationale (DOE, Centre national des opérations /CNO, Direction des soutiens et des finances / DSF, et Direction des ressources humaines / DRHGN), et la Région de gendarmerie d’Île-de-France (RGIF). La DIP soulignait le rôle du commandant de région d’Île-de-France, appelé à exercer le commandement futur des forces de gendarmerie (COMFORGEND) déployées dans le cadre de la sécurisation des Jeux à Paris. Elle mentionnait également la désignation au sein de la RGIF d’un directeur de la planification, fonction confiée au général Benoît Ferrand, en préfiguration de son rôle d’adjoint au COMFORGEND, et la constitution d’un groupe de planification placé sous les ordres d’un colonel, fonction que j’ai occupée à l’été 2023. Ce groupe avait vocation, sous l’autorité du général de corps d’armée Xavier Ducept, à anticiper et préparer les grandes lignes d’opérations, de logistique et de génération de forces pour le dispositif de la gendarmerie pour les JOP.

Quand ce travail a-t-il commencé et quelles ont été les priorités ?

Il s’agissait initialement d’une cellule, la CJOP (Cellule des Jeux Olympiques de Paris), créée dès 2022 par le général Antoine de Boisanger, qui a mené les premiers grands travaux de planification durant une année, avant de rejoindre la Garde républicaine. Durant cette première année, la CJOP a prioritairement travaillé à la constitution des grands blocs de la manœuvre hébergement, notamment la rénovation et l’augmentation des capacités d’accueil des bâtiments UD, la prospection et la signature de conventions avec des internats de lycées privés, ainsi qu’un vaste projet de création d’hébergements modulaires sur la plaque parisienne, qui a permis de faire sortir de terre 3 000 places supplémentaires réparties sur douze emprises. Parallèlement, la CJOP a contribué aux premières réflexions conjointes avec l’officier de liaison au sein de la Préfecture de police (P.P.) de Paris, pour préparer les arbitrages d’attribution des plaques missionnelles, en recherchant autant que possible la concentration des zones d’emploi, afin de rationaliser le soutien et la structure de commandement, ainsi que la visibilité de nos déploiements dans les lieux qui permettaient de valoriser nos capacités.

Pour ma part, j’ai rejoint la cellule le 1er août 2023. Les arbitrages sur l’attribution des plaques missionnelles sont intervenus peu de temps après, et cela nous a permis de développer les grandes lignes d’opérations destinées à garantir la réussite de nos déploiements futurs sur vingt-deux sites olympiques, la sécurisation des transports en commun, le renforcement du plan tourisme à Paris, les missions de circulation et d’escortes, sans oublier les moyens spéciaux. L’ambition portée par la gendarmerie de prendre toute sa part dans cet événement de portée historique nécessitait de monter en puissance sur plusieurs aspects. L’exigence était double : répondre aux nécessités opérationnelles et répondre à l’exigence fixée par le COMFORGEND de garantir des conditions d’emploi et de soutien des militaires qui soient à la hauteur de leur engagement.

Il a fallu en premier lieu effectuer un travail d’évaluation préalable à la génération de forces, pour atteindre les objectifs inédits d’effectifs que la sécurisation des J.O. impliquait. Ce travail s’est réalisé conjointement avec le CNO (DGGN) et s’est nourri d’une relation constante avec la P.P., pour façonner l’environnement d’emploi de nos unités.

Il a également fallu développer la manœuvre hébergement, pour passer d’un volume de 8 000 places identifiées à l’été 2023 à près de 15 000 places nécessaires pour soutenir les pics d’activité (18 000 militaires employés le jour de la cérémonie d’ouverture des J.O.), prévenir le risque de rupture capacitaire, anticiper la manœuvre alimentation, concevoir le soutien du « dernier kilomètre » au plus près des lieux d’emploi, créer une chaîne de commandement adaptée à l’environnement de la P.P., avec des Systèmes d’information et de communication (SIC) résilients malgré la grande diversité des unités appelées à être déployées.

Comment s’est cadencée la montée en puissance de la structure ?

La cellule s’est renforcée au fur et à mesure que les arbitrages permettaient d’avancer sur la mise en œuvre des différentes lignes opérationnelles et logistiques. Elle agissait dans une logique très souple, avec une adaptation permanente à des dynamiques très différentes de ce que nous avons l’habitude de rencontrer dans la planification des grands événements. Différences constatées en raison à la fois du caractère singulier des Jeux Olympiques et de l’autorité préfectorale (P.P.) unique en son genre. Naturellement, d’une cellule initiale très compacte, avec l’implication du général Ferrand qui supervisait nos travaux, le groupe s’est densifié pour atteindre un effectif de plus de 30 militaires et personnels civils dans les dernières semaines afin de préfigurer la montée en puissance du Centre des opérations (CDO) en phase de conduite.

Nous avons bénéficié de renforts extérieurs à la RGIF, au regard des compétences particulières qui étaient nécessaires, avec des militaires détachés qui se sont immédiatement révélés d’un dévouement remarquable. Nous avons également pu compter sur une parfaite intégration au sein de l’état-major RGIF, dans une logique de travail partagé et collaboratif, au-delà de la structure elle-même. Par rapport à la dimension de l’événement, c’était essentiel de pouvoir relayer et augmenter les actions menées en s’appuyant sur les compétences et l’expertise de l’état-major zonal dans ses deux composantes, DZOE (Division Zonale Opérations Emploi) et DAO (Division de l'Appui Opérationnel), avec une mention spéciale pour le Centre zonal des opérations (CZO), qui répondait à sa vocation native et bénéficiait de sa maîtrise de l’environnement P.P. Le rôle de la cellule, puis du groupe de planification a donc été de coordonner, d’animer et puis d’amplifier tous les savoir-faire existant au sein de l’état-major de la RGIF. C’est d’ailleurs ce qui a permis de faciliter les périodes de transition entre la planification et la conduite, en jouant sur la continuité de certaines fonctions au sein du centre des opérations, qui a ouvert le 2 juillet 2024, sous l’autorité du chef d’état-major de la RGIF.

Les travaux étaient cadencés par une conférence de planification hebdomadaire présidée par le général Ducept, dans une logique de partage d’information avec la DGGN, représentée par les chargés de mission du CNO, de la DOE, de la DRHGN et de la DSF.

Enfin, il y avait une coordination stratégique haute, principalement dans le cadre du Comité stratégique (COSTRAT), placé sous la présidence du Major général de la gendarmerie nationale (MGGN), et qui s’est réuni de manière régulière de septembre 2023 à juin 2024.

Le groupe de planification de la RGIF avait aussi vocation à mettre en œuvre les orientations du commandant de région dans les nombreux échanges inter-services pris en compte par l’échelon zonal (directions de la P.P., Coordination nationale de sécurité des Jeux / CNSJ et Délégation Interministérielle des Jeux Olympiques / DIJOP).

On peut identifier trois grandes périodes sur cette manœuvre opérationnelle : la planification, la conduite et, enfin, la phase de désengagement, qui est d’ailleurs en cours. Quels étaient les enjeux de chacune de ces phases ?

Nous avons effectivement connu trois grandes périodes. Sur la période de la planification, l’enjeu était de construire des briques, dans les domaines R.H., soutien et commandement, pour ensuite les assembler dans un dispositif suffisamment robuste pour soutenir les 30 000 militaires qui ont été détachés au sein de la région « J.O. Paris », par relèves successives, durant près de trois mois.

La résilience nécessaire reposait sur une manœuvre logistique d’ampleur, qui était active dès la planification, pour constituer des ressources de matériels, de véhicules, d’alimentation et d’eau, ainsi que sur une manœuvre « emploi » basée sur la liberté de manœuvre du commandement pour la remise en condition des unités indispensable au regard des contraintes extérieures liées aux élongations, à la météo, ou au caractère corrosif de certains milieux. Tout était fait pour éviter la saturation d’un dispositif d’une dimension inédite, dans un environnement contraint, en recherchant la simplification et l’homogénéité, tout en déconcentrant les niveaux de décisions lorsque le maillage devenait inévitablement complexe.

L’objectif était également de consolider les fonctions de commandement, en intégrant les chefs au sein des centres de commandement de la P.P., mais aussi en recherchant la résilience des réseaux de communication.

Qu’en est-il des enjeux de la période de conduite des opérations ?

Sur la période de conduite, les échelons de commandement jouaient le premier rôle. L’enjeu était de réussir la mise en musique d’une partition jamais jouée : atteindre les objectifs quotidiens, tenir dans la durée, anticiper les phases suivantes avec la pause de l’inter-Jeux, très relative pour les unités qui ont poursuivi un effort continu de sécurisation des transports en commun et du plan tourisme.

Il y avait pour cela, sous l’autorité du COMFORGEND, la chaîne de commandement intégrée dans les centres de conduite de la P.P. (avec les représentants du COMFORGEND et les Groupements opérationnels de maintien de l’ordre / GOMO), déployée sur le terrain (avec les Groupements tactiques de gendarmerie / GTG et les commandants d’unité), et une coordination assurée par le Centre des opérations (CDO), basé à Maisons-Alfort, et relayée par des bases avancées (base logistique à La Villette, états-majors GOMO-GTG à Montparnasse, poste de commandement du groupement de gendarmerie départementale des Yvelines à Guyancourt, etc.)

C’était à la fois une architecture traditionnelle de centre des opérations, conçue selon la structure d’un état-major niveau brigade/division, et un schéma plus innovant pour tenir compte de la cinétique propre aux Jeux Olympiques en Île-de-France.

Nous sommes donc entrés depuis quelques jours dans la période de désengagement. Qu’implique-t-elle ?

À l’issue d’une opération aussi massive, nous devons d’une part accompagner le repli de toutes les composantes de la manœuvre, d’autre part poursuivre les actions de contrôle financier, et, enfin, réunir et mettre en cohérence les nombreux éléments du retour d’expérience.

Le commandant de région a créé un groupe de désengagement, dont l’ossature est principalement armée par les cellules logistiques et financières, avec des militaires déjà aguerris par les étapes de planification et de conduite. Le corps militaire de soutien est majoritairement représenté dans ces équipes, avec des officiers et des sous-officiers dont la disponibilité et le professionnalisme doivent être soulignés.

C’est donc un travail collectif pour restituer les emprises occupées conformément à nos engagements juridiques, démonter les structures modulaires, stocker et dresser un inventaire complet des matériels. Dans une logique de valorisation postérieure aux J.O., nous recensons par ailleurs les besoins au sein des formations administratives afin de redistribuer et répartir les moyens qui ont vocation à être employés ou consommés, s’agissant notamment de la réserve alimentation.

Le contrôle interne financier accompagne cette manœuvre jusqu’à l’ultime étape de liquidation financière, pour laquelle les équipes J8 de la lieutenante Bailly effectuent un vaste travail d’intégration des facturations, dont vous pouvez imaginer l’ampleur.

Parallèlement, chaque bureau (J) du centre des opérations a désigné un post-curseur pour suivre les résurgences R.H. et administratives. Enfin, le dernier point, et non des moindres dans cet héritage J.O., consiste à finaliser et restituer le retour d’expérience, en distinguant les invariants inhérents aux grands événements et les enseignements plus spécifiques liés à des procédés innovants. Bien sûr, l’héritage des Jeux concerne de nombreux acteurs, nous sommes donc aussi en mesure de pouvoir répondre aux sollicitations de la DGGN pour répondre aux questions et contrôles qui ne manquent pas d’être suscités après un événement de ce type.


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