Martinique : interpellation de sept tireurs mis en cause dans deux fusillades

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 03 mai 2023
Deux gendarmes l'un derrière l'autre, avec l'insigne du Commandement de la gendarmerie de la Martinique sur le polo du premier.
© Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer/O.MARIE

À huit jours d’intervalle, au mois de novembre 2022, deux agressions armées extrêmement violentes ont éclaté en Martinique, dans les communes de Rivière Salée et du Robert. Des faits sur lesquels l’ensemble du Commandement de la gendarmerie (Comgend) de Martinique s’est mobilisé et sur lesquels a enquêté la Section de recherches (S.R.) de Fort-de-France, conduisant à l’interpellation de sept individus.

L’Oasis, première partie

Tout commence peu après 2 heures du matin, dans la nuit du 10 au 11 novembre 2022, lors de soirées privées, organisées dans deux salles des fêtes de Rivière Salée, en Martinique. À l'origine, il est fait état, selon l’avalanche d’appels passés au CORG (Centre d’Opérations et de Renseignement de la Gendarmerie) de plusieurs, voire jusqu'à une cinquantaine de motards encagoulés, et armés pour certains, faisant irruption aux deux endroits et tirant à plusieurs reprises. Aucun blessé n’est à déplorer dans le premier lieu, au contraire du second - l’Oasis -, où huit personnes sont blessées, six par balle et deux lors du mouvement de foule qui s’en suit. Malgré la violence des faits, aucun mort n’est à déplorer.

Un peu plus tard, aux alentours de 3 heures du matin, à Fort-de-France, en zone police, deux personnes circulant à bord d’un véhicule sont prises pour cible par des motards, qui ouvrent le feu à plusieurs reprises. Le conducteur et son passager prennent la fuite et trouvent secours au commissariat de police. Les faits font l’objet d’un rapprochement avec ceux commis plus tôt en zone gendarmerie.

Le dispositif opérationnel engagé dans « l’extrême urgence » par le Commandement de la gendarmerie (Comgend) de la Martinique monte en puissance : le CORG, les unités de la compagnie du Marin - les brigades et la Brigade de recherches (B.R.) locales étant engagées comme primo-intervenantes -, les unités et les moyens spécialisés… toute la gendarmerie de Martinique se mobilise.

Le parquet de Fort-de-France saisit la Section de recherches (S.R.) de Fort-de-France, et un dispositif composé d’une douzaine d’enquêteurs de la S.R., de la B.R. du Marin et de la Communauté de brigades (CoB) de Rivière Salée est mis en place par le directeur des opérations pour mener les investigations. L’hypothèse d’un règlement de comptes entre deux bandes rivales de jeunes Martiniquais est privilégiée.

Les scènes de crime sont immédiatement confiées à un Coordinateur en criminalistique (CoCrim), assisté de deux Techniciens en identification criminelle (TIC) de la SAJ/CIC (Section d'Appui Judiciaire/Cellule Identification Criminelle). Ces Opérations de police technique et scientifique (OPTS) permettront, après les analyses effectuées sur le plateau technique du Comgend, de déterminer le nombre d'armes utilisées et les liens entre les faits. Le travail des TIC permet aux enquêteurs d'échafauder les hypothèses de travail et la stratégie d'enquête.

Le 21 novembre 2022, un groupe de travail, constitué d’enquêteurs de la S.R, de la compagnie du Marin et de la Brigade de gendarmerie des transports aériens (BGTA) de Fort-de-France, appuyé par les moyens du Comgend, est mis sur pied.

L’Ice Pink

Quelques jours après la fusillade de l’Oasis, dans la nuit du 18 au 19 novembre 2022, aux alentours de 2 h 30, une autre bagarre éclate entre deux groupes d’individus, au cours d’une soirée privée dans une discothèque du Robert, l’Ice Pink, puis à l’extérieur de l’établissement. De nombreux tirs d’arme à feu sont échangés. Une femme décède sur place, tandis que sa sœur, blessée, est transportée au Centre hospitalier universitaire de Martinique (CHUM).

Les investigations se poursuivent sur commission rogatoire à compter du 2 décembre, et une cellule d’enquête, « DISCO 972 », commune avec les enquêteurs du groupe de travail consacré aux faits commis à Rivière Salée, est mise en place à compter du 12 décembre.

L’étude des images de vidéo-surveillance et les auditions des participants à la soirée, confirmées plus tard par les retours d’analyse de Police technique et scientifique (PTS) sur un étui retrouvé au sol, mettant en évidence la présence d’un ADN, permettent d’identifier l’un des tireurs.

Le 18 janvier 2023, à 6 heures, une opération est menée en vue d’interpeller deux des auteurs présumés des tirs commis à l’Ice Pink. Les deux mis en cause sont placés en garde à vue dans les locaux de la S.R. de Fort-de-France. Sur directive de la juge d’instruction, ils sont remis en liberté et repris en garde à vue le 19 avril.

Au cours de l'interpellation, le frère de l’un des mis en cause tente de se débarrasser d’une arme de poing en la jetant par la fenêtre de sa chambre. Celle-ci est récupérée et saisie incidemment par les enquêteurs. L’individu, interpellé dans le cadre de la procédure incidente, est pris en compte par les militaires de la Brigade territoriale autonome (BTA) de Saint-Joseph. Présenté à un magistrat du parquet le 19 janvier 2023, il est condamné à 12 mois de prison ferme.

Au domicile du second suspect, il est découvert une somme de 3 600 euros en espèces et 42 grammes de cocaïne. Ces saisies font l’objet d’une procédure incidente.

À l’issue de cette première phase de l’opération « Ice Pink », les investigations se poursuivent. Une seconde opération est menée le 18 avril 2023. Cinq objectifs sont ciblés aux fins d'identifier les autres tireurs présumés. Quatre des objectifs sont interpellés, avec le concours de militaires de l’AGIGN de Fort-de-France, l’Escadron de gendarmerie mobile (EGM) de Belfort, du Peloton de surveillance et d’intervention de gendarmerie (PSIG) de Fort-de-France et des équipes cynophiles du Groupe d’investigations cynophile (GIC) de Fort-de-France.

À l’issue de cette deuxième phase, quatre des tireurs présumés sont mis en examen, et trois d’entre eux sont incarcérés à la maison d’arrêt de Ducos.

L’Oasis, deuxième partie

Identifié par l’un des blessés par balles, et recherché pour des faits de vols à main armée, l’un des tireurs présumés de l’Oasis est interpellé par la police nationale, à la suite d’un nouveau vol à main armée commis le 18 janvier 2023. Il est incarcéré le 24 janvier, puis extrait de la maison d’arrêt et placé en garde à vue. Il reconnaît être l’un des tireurs de l’Oasis et fournit l'identité d'une partie des autres tireurs. Présenté devant un juge d’instruction, il est mis en examen et placé en détention provisoire.

Un deuxième tireur est interpellé le 19 mars 2023 par l’AGIGN de Fort-de-France et les enquêteurs de la S.R., à l’aéroport Aimé Césaire, alors qu’il tente de se rendre en métropole. Placé en garde à vue, il nie toute implication dans les faits. Il est présenté le 21 mars devant la juge d’instruction, mis en examen et incarcéré.

Un troisième tireur identifié est interpellé le 22 mars par les policiers du commissariat de Fort-de-France pour détention d’arme. Il est remis aux enquêteurs de la cellule « DISCO 972 », avec deux armes de poing saisies, et placé en garde à vue. Présenté à la juge d’instruction le 23 mars, il est mis en examen et incarcéré.

« Ces règlements de compte violents reviennent régulièrement, de manière cyclique, en Martinique, observe le colonel B., qui commande la S.R. de Fort-de-France. On constate, depuis quatre ou cinq ans, une prolifération des armes de poing, qui entrent par petites quantités, en lien avec le trafic de stupéfiants. »

Grâce au travail remarquable mené par les unités du Comgend de la Martinique, en appui des enquêteurs de la S.R. de Fort-de-France, les dossiers « Ice Pink » et « Oasis » sont en voie de résolution. Six individus sont sous les verrous. Les investigations se poursuivent sur commission rogatoire.

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