Dans l'Essonne, les gendarmes en guerre contre les violences intra-familiales
- Par Pablo Agnan
- Publié le 12 novembre 2021
Pour lutter contre les violences intra-familiales, la gendarmerie a mis en place il y a un an, dans chaque département, des Maisons de confiance et de protection des familles (MCPF). Dans l'Essonne, les quatre gendarmes qui la composent ont mis sur pied une méthode innovante pour lutter contre ce fléau. Reportage.
125. Il s’agit du nombre de personnes tuées en France en 2020, par leur conjoint ou leur « ex ». Parmi les victimes, 67 % avaient signalé ces faits aux forces de l’ordre, selon l'étude nationale sur les morts violentes au sein du couple. Des chiffres inquiétants, que tentent de réduire les gendarmes de la Maison de prévention et de protection des familles (MPPF) de l'Essonne, grâce à une stratégie innovante.
« Chaque matin, nous reprenons toutes les interventions pour « Violences intra-familiales (VIF) » des dernières 24 heures », indique l’adjudant-chef Geoffrey, commandant l’unité.
Pour le sous-officier, l’objectif de cette démarche n’est pas de supplanter le travail de ses camarades en brigade, mais bien d’identifier les victimes au plus tôt, ce qui est la raison d’être des MPPF (le nom de ces unités dédiées à lutte contre les VIF peut changer d’un département à l’autre. Elles sont généralement baptisées MPF, pour Maison de protection des familles, NDLR).
Présumé coupable
Cette démarche est née d’une observation : « Nombre de victimes appellent pour des faits de violences, mais une fois que les gendarmes sont sur place, elles préfèrent se rétracter, invoquant une grosse dispute », rapporte le militaire. Deux phénomènes expliquent cette réaction. Le premier, c’est l’environnement familial, lieu des violences. Dans 86 % des cas, les passages à l’acte se produisent au domicile du couple, de la victime ou de l’auteur. Il faut donc sortir la personne de ce lieu, en tout cas le temps de son témoignage. « Lorsque nous rappelons les victimes le lendemain, nous le faisons en journée, lorsqu’elles sont sur leur lieu de travail, pour justement éviter cet environnement familial. »
Cette méthode porte-t-elle ses fruits ? « La plupart du temps, elles racontent leur histoire », affirme le sous-officier. Car il dispose d’un moyen éprouvé pour amener la victime à se livrer : « On la croit ! C’est notre règle d’or. » En Essonne, le parquet a autorisé les gendarmes de cette unité à enquêter dès qu’il y a suspicion de violence, même si aucune plainte n’a été déposée. « Les investigations nous permettront, a posteriori, de déterminer si la victime en est vraiment une ou non. » Le gendarme précise également que cette directive est générale : « Elle n’est pas exclusivement réservée à la MPPF. »
S’émanciper de l'emprise
Pour l’adjudant-chef, cette technique favorise la confession de la victime : « Cela lui permet de mettre des mots sur ce qu’elle vit. » D’autant que, lorsqu’il est question de violence, cela ne veut pas nécessairement dire qu’il s’agit de coups et blessures. Avant d’en arriver à ces extrêmes, se met en place un schéma pernicieux, où il est souvent d’abord question de domination, de manipulation, puis d’injures et, enfin, de violences physiques. « C’est ce que j’appelle le cycle de violence », indique le sous-officier, qui le qualifie également « d’emprise. » Cette mainmise constitue donc le second phénomène lié à la rétractation des victimes.
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Pour lutter contre cette emprise, les quatre militaires de la MPPF de l’Essonne fournissaient jusqu’alors un appui aux enquêteurs lors des investigations conduites dans le cadre de violences intra-familiales. « Jusqu'à présent, pour toute victime détectée, nous étions obligés d'organiser sa prise en charge par l'unité compétente, faute d'habilitation judiciaire », explique l’adjudant-chef Geoffrey. Mais depuis la mi-octobre, grâce à une loi votée et parue au journal officiel, « nous sommes désormais en mesure de proposer à une victime, que nous détectons grâce à notre analyse des interventions, de pouvoir aller jusqu'au bout de la démarche ensemble, sans rompre le lien de confiance établi lors de notre appel téléphonique, en prenant en charge son audition. »
Des experts au service des victimes de VIF
Dans le cas de victimes mineures, la MPPF dispose également d'une « ressource complémentaire à la compagnie » : la salle Mélanie. Baptisé du nom de la première petite fille auditionnée en France selon le protocole vidéo instauré par la loi de 1998, il s'agit d'un espace protégé et rassurant, qui permet de libérer la parole des enfants confrontés aux violences ou aux agressions sexuelles. Au sein de la MPPF 91, trois enquêteurs sont formés à mener ce type d’audition.
Toutes ces connaissances, couplées à des techniques ainsi qu'une approche novatrice, font des gendarmes de la MPPF 91 des acteurs précieux et indispensables dans la lutte contre les violences intra-familiales. En qualité d'experts dans ce domaine, ils disposent également de prérogatives pour mener à bien des actions de prévention au sein des établissements scolaires, ainsi qu'auprès des familles et des personnes âgées ou en situation de handicap.
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