Des cartes pédagogiques pour sensibiliser sur les violences conjugales entre adolescents

  • Par Doria Belkacemi
  • Publié le 23 janvier 2024
Photo sur la gauche du major De Giacomo, ainsi que l'écrivaine Marie Gervais. Sur la droite, les sept cartes posées sur une table.
© GGD91

Le sujet des violences conjugales entre adolescents reste souvent négligé et difficile à aborder avec les jeunes, qui peuvent se sentir gênés, ou penser qu'ils ne sont pas concernés. Pourtant, il demeure crucial de sensibiliser les adolescents, dès leur plus jeune âge, à cette réalité importante. En 2022, à l’initiative des gendarmes de la Maison de Protection des Familles (MPF) de l’Essonne, et de Marie Gervais, autrice et ancienne victime de violences, des actions de prévention ont été menées dans les collèges du département, en s’appuyant sur des fiches pédagogiques, qui ont déjà permis de sensibiliser 800 collégiens.

Marie Gervais, victime de violences conjugales de 16 à 24 ans, a transformé son douloureux vécu en une puissante source d'inspiration. Aujourd’hui, très engagée pour cette cause, elle témoigne au Centre national de formation à la police judiciaire (CNFPJ), qui forme les experts des mécanismes des Violences intrafamiliales (VIF) en gendarmerie. Elle intervient également à l’École des officiers de la gendarmerie nationale (EOGN), ainsi que dans une trentaine de formations VIF organisées au profit des gendarmes du Groupement de gendarmerie départementale de l’Essonne (GGD 91), auxquelles s’ajoutent diverses conférences locales.

Son livre, intitulé « Il me tue cet amour », dans lequel elle raconte les violences qu’elle a subies de la part de son premier petit ami, a attiré l'attention du GGD de l’Essonne. Le major Geoffrey De Giacomo, commandant de la Maison de Protection des Familles (MPF), spécialisé dans la lutte contre les violences sexistes, sexuelles et intrafamiliales et en charge des formations sur les violences intrafamiliales, a ainsi pris l'initiative de la contacter en 2020.

« Nous avons constaté que les enquêtes de victimation se limitent souvent la population des 18-75 ans. Or, les violences commencent avant et se poursuivent après », indique le major De Giacomo. Selon lui, la principale différence entre les violences entre adultes et celles entre adolescents réside dans le fait que, si près de 85 % des victimes de violences conjugales sont des femmes chez les adultes, et seulement 15 % des hommes, la proportion chez les adolescents est proche de la parité. L’autre différence relève du type de violence, davantage verbale et psychologique chez les plus jeunes.

Ensemble, Marie Gervais et le major De Giacomo ont donc eu l’idée de créer des cartes postales destinées à déconstruire les idées reçues sur ces violences et à fournir des numéros importants à contacter en cas de besoin.

  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin au centre d'un homme à gauche et de deux femmes à droite et le slogan au dessus "On est amis, si elle/il était victime de violences, je le saurais".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un couple bras dessus, bras dessous à droite et le slogan à gauche "C'est pas vraiment de la violence ça... C'est juste qu'on s'aime trop".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un homme et le slogan "Elle/il a raison, je devrais l'écouter plus souvent, elle/il sait mieux que moi ce qui est bon pour moi"..
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un homme sur la gauche et d'une femme sur la droite et au centre, le slogan "Les violences conjugales, c'est chez les couples mariés".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un couple s'embrassant et le slogan "Je lui ai confié le mot de passe de mon téléphone, quand on s'aime on partage tout".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un homme au centre et le slogan à droite "Je ne voulais pas lui faire du mal... Mais c'est elle qui m'a poussé à bout".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'une femme à gauche et d'un homme à droite et le slogan au centre "Si elle/il me quitte, je ne suis plus rien".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin au centre d'un homme à gauche et de deux femmes à droite et le slogan au dessus "On est amis, si elle/il était victime de violences, je le saurais".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un couple bras dessus, bras dessous à droite et le slogan à gauche "C'est pas vraiment de la violence ça... C'est juste qu'on s'aime trop".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un homme et le slogan "Elle/il a raison, je devrais l'écouter plus souvent, elle/il sait mieux que moi ce qui est bon pour moi"..
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un homme sur la gauche et d'une femme sur la droite et au centre, le slogan "Les violences conjugales, c'est chez les couples mariés".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un couple s'embrassant et le slogan "Je lui ai confié le mot de passe de mon téléphone, quand on s'aime on partage tout".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'un homme au centre et le slogan à droite "Je ne voulais pas lui faire du mal... Mais c'est elle qui m'a poussé à bout".
    © GGD91
  • Carte de prévention contre les violences conjugales entre adolescents avec un dessin d'une femme à gauche et d'un homme à droite et le slogan au centre "Si elle/il me quitte, je ne suis plus rien".
    © GGD91

Des actions concrètes en milieu scolaire

La collaboration aboutit à des actions concrètes menées auprès des collégiens de 3e. Des interventions de deux heures sont organisées, avec la projection de ces cartes postales au tableau pour renforcer le message. L'approche pédagogique consiste à présenter une idée reçue, susciter le débat, puis déconstruire cette idée.

« J’entends parfois des jeunes dire : “Je ne suis pas une victime, je n’ai pas de traces” », poursuit le major, qui réfute cette idée : « Souvent, lorsque l’on parle de violences conjugales, la première image qui nous vient en tête est celle du visage d’une femme avec un œil au beurre noir. On pense uniquement à la violence physique, et on a tendance à oublier que ça ne se voit pas toujours, qu’il y a aussi la violence verbale et psychologique. C’est pour ça qu’il faut rester attentif aux changements de comportement. »

L'engagement auprès des élèves s’avère fructueux, avec un accueil positif dans la plupart des classes. Les interventions abordent divers aspects : de la violence en général à la notion cruciale de consentement, en passant par le cyber-harcèlement, le respect du corps, de l’intimité ou encore de l’opinion de l’autre. Les élèves sont encouragés à réfléchir sur le rôle fondamental des témoins et à prendre conscience de leur responsabilité envers les victimes.

Une victoire pour la sensibilisation

Le major De Giacomo soutient que l'initiative, initialement pensée pour les collégiens, a le potentiel d'être adaptée pour toucher les lycéens, voire les adultes. Destinées à être largement distribuées, ces cartes postales permettent aux jeunes de repartir avec un support concret et des contacts utiles en cas de besoin.

Lancé en 2022, le projet a été rendu possible grâce au partenariat avec le Conseil départemental de l’Essonne, qui l’a tout de suite validé et a sélectionné sept cartes parmi les quinze proposées, lesquelles ont été imprimées à 50 000 exemplaires. Dans le cadre du suivi de ce projet, la gendarmerie a souhaité que ces fiches soient accessibles au plus grand nombre. Elles seront donc bientôt téléchargeables sur le site du département.

Remise du prix Territoria Or dans la catégorie « Unicef - Action en faveur des enfants et des adolescents » en décembre 2023.
© GGD91

En décembre 2023, l'initiative a reçu une récompense significative lors de la remise des Prix Territoriaux, remportant le prix TERRITORIA Or, dans la catégorie « Unicef - Action en faveur des enfants et des adolescents ». Une distinction qui souligne l'impact positif de l'initiative dans la sensibilisation des jeunes et la promotion de relations saines dès le plus jeune âge.

Poser la question, c’est ouvrir une porte qui va permettre de libérer la parole

Car c’est en agissant dès le plus jeune âge, en déconstruisant les idées reçues et en encourageant la responsabilité collective, que ces initiatives contribueront à créer un avenir bâti sur le respect, la compréhension et l'empathie.

Pour aller plus loin

« Il me tue cet amour » de Marie Gervais, aux éditions Massot

  

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