L’antenne GIGN d’Orange conduit un exercice antiterroriste chez les légionnaires

  • Par Pablo Agnan
  • Publié le 19 juin 2020
Un membre de l'antenne GIGN d'Orange sécurise la zone de poser d'un l'hélicoptère EC145.
© GND F. Garcia

Les opérateurs de l’antenne GIGN d’Orange ont réalisé, le jeudi 11 juin, un exercice antiterroriste au Camp de Carpiagne, berceau du 1er Régiment étranger de cavalerie. Un exercice de grande ampleur, qui a rassemblé pas moins de trois hélicoptères et une des unités d’élite des marins-pompiers de Marseille.

Les légionnaires du 1er Régiment étranger de cavalerie disposent certainement d’un des centres d’entraînement les plus beaux de France. Situé à une trentaine de minutes de Marseille, le Camp de Carpiagne s’étend sur 1 500 hectares et dispose d’une situation topographique exceptionnelle.

Au nord, la chaîne du Mont Saint Cyr s’élève jusqu’à 646 mètres. Le Belvédère, un petit regroupement de bâtiments désaffectés situés à la pointe sud du camp, culmine à presque 300 mètres. Ils surplombent les calanques d’En-Vau et de Port Pin et offrent un panorama incroyable sur la Méditerranée.

Une situation presque paradisiaque si une prise d’otage n’était pas en cours. Elle se déroule à l’intérieur du camp, dans des bâtiments désaffectés simulant un complexe universitaire. Le paradis s’est transformé en un enfer ardent. La température frôle les 30 degrés. Au loin, un individu gît au sol, à l’extérieur du complexe, sans que les éléments de reconnaissance puissent savoir s'il est mort ou blessé.

Un hélicoptère EC135 de la Section aérienne de gendarmerie (SAG) d’Hyères survole la zone. Engagé sur l'exercice en soutien des militaires de l'Antenne GIGN (AGIGN) d'Orange, il les renseigne en temps réel sur l’évolution de la situation grâce à sa caméra. Le tireur d’élite embarqué, lui, fait baisser les têtes des terroristes et offre une couverture idéale à ses camarades, pour qu’ils se rendent sur les lieux, sans subir de dégâts.

L’assaut

Alors que résonne au loin le vrombissement des rotors de l’hélicoptère, un second bruit de pales, bien plus proche, vient transpercer le chant des cigales. D’abord invisible, un EC145 fait brusquement son apparition, surgissant des montagnes. Le pilote profite des reliefs avantageux pour masquer son arrivée tonitruante.

Cet aéronef de la SAG d’Ajaccio vient déposer en corde lisse quatre opérateurs de l’antenne GIGN, avant de faire demi-tour pour en déposer quatre autres, pour arriver jusqu’à 12 gendarmes. Ils sont suivis par un hélicoptère AS565, appartenant à la flottille 36F de la Marine Nationale. Le « Panther » amène avec lui une unité de la section opérationnelle spécialisée HELI (Héliportage) du bataillon de marins-pompiers de Marseille.

Depuis la mise en place du schéma national d’intervention en 2016, les pompiers sont directement greffés au dispositif d’intervention. Équipés de gilets par-balles et de casques lourds, ils suivent directement la colonne d’assaut. Leur objectif : récupérer les blessés et créer un corridor d’extraction vers une zone de soutien sûre de tous dangers.

Un hélicoptère EC135 de la Section aérienne de gendarmerie (SAG) d’Hyères survole la zone de l'attaque. Grâce à sa caméra et à son tireur embarqué, il peut renseigner et appuyer le feu les hommes au sol.

© GND F. Garcia

 

Forte de 90 personnels, la section héliportage du bataillon de marins-pompiers de Marseille (BMPM) est spécialisée dans l'intervention sur des feux de forêts, inaccessible via des moyens terrestres.

© GND F. Garcia

 

Le terrain accidenté et la végétation très dense apportent des difficultés supplémentaires dans la progression des gendarmes vers l'objectif.

© GND F. Garcia

Déposé à quelques centaines de mètres du bâtiment cible, l’élément d’assaut de l'antenne progresse d’abord à travers un terrain accidenté recouvert de garrigue. Pour ne pas se faire repérer, il utilise le maquis. La couverture est idéale. Lorsqu’il arrive sur le bâtiment où sont retranchés les terroristes, un premier blessé est récupéré.

Après une phase de reconnaissance, à l’aide d’un mini-robot monté sur roues et équipé d’une caméra, les gendarmes passent à l’action. Une première colonne progresse au centre d’un hangar, ouvert de part et d’autres, tandis que l’autre déborde sur la gauche. Plusieurs opérateurs restent à l’arrière, en soutien de leurs camarades. Le rôle de l’ange gardien est toujours confié au tireur d’élite embarqué, perché à bord de son EC135.

Arrive le moment le plus délicat de l’opération : pénétrer dans le bâtiment. Rompus aux tactiques de guérillas urbaines, les terroristes utilisent des équipements certes rudimentaires mais toujours redoutables : les engins explosifs improvisés (EEI) (plus connus sous le nom d’IED pour « Improvised Explosive Device »). « Ils pourraient en avoir placé partout dans les locaux », prévient le chef d’équipe.

Comme le résume l’un des terroristes avant le début de l’exercice, joué par un membre de l’AGIGN d’Orange, « l’objectif, c’est de les fixer (les gendarmes). » En clair, les empêcher d’entrer par tous les moyens. Et ça marche. Alors que les opérateurs progressent lentement et de manière méthodique, des premiers coups de feu éclatent dans le couloir principal.

Lenteur égale précision, précision égale vitesse

C’est un véritable déluge de feu qui s’abat sur l’élément d’assaut. Le barrage est tel qu’il empêche la colonne de progresser à l’intérieur. Le couloir est mince. Il faut trouver une autre entrée. Quelques hommes se détachent pour contourner cette porte. Le bâtiment est bien défendu, mais les militaires sont des spécialistes de ce genre de situation et surtout, plus nombreux.

« La clé, c’est la vitesse », résume l’un des terroristes, joué par un membre de l’antenne, qui souhaite rester anonyme, pour des raisons évidentes. Ils commencent donc à imposer leur tempo en débordant sur le côté gauche. Quelques opérateurs fracassent la première ligne de défense en la contournant. À partir de cet instant, les terroristes, complètement encerclés, sont neutralisés un par un. Trois d’entre eux parviennent à s’échapper in extremis vers un autre bâtiment, grâce à un véhicule.

Une fois le bâtiment complètement sécurisé, les marins-pompiers peuvent prendre en charge les blessés. Mais pour eux, comme pour les 12 hommes de l’AGIGN, pas le temps de se reposer. Les terroristes se sont retranchés dans un autre bâtiment, situé à une centaine de mètres à l’est du premier. Avec son étage supérieur entouré de baies vitrées, la position est parfaite pour repérer des éléments hostiles à plusieurs centaines de mètres à la ronde.

Trois opérateurs de l'élément d'assaut sécurisent l'entrée est du bâtiment.

© GND F. Garcia

 

La descente en corde lisse est l'un des moments critiques de l'opération. L'hélicoptère, alors en vol stationnaire, est très vulnérable.

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Les couloirs étroits ainsi que les nombreuses pièces sont des positions défensives redoutablement efficaces.

© GND F. Garcia

Seule solution pour prendre le bâtiment d’assaut, il faut le contourner. Le chef de groupe amène ses hommes contre la face nord du bâtiment, seul endroit où ils peuvent progresser sans être à découvert. Plaqué contre le mur, c’est d’ici que partira l’assaut final. Quelques hommes sont placés autour du bâtiment pour sécuriser les angles morts ainsi que l’autre porte. Tous les « commandos » sont prêts, ils commencent a pénétrer un par un dans le bâtiment.

Mais les hommes de tête n’ont pas le temps de faire deux mètres avant d’être pris à partie par les terroristes. Plusieurs rafales d’armes automatiques viennent stopper net la colonne. Un membre de l’antenne est blessé. Ses camarades le sortent de l’édifice. Il est immédiatement pris en charge par les marins-pompiers.

Les autres opérateurs restent au contact. Pour neutraliser l’auteur des tirs, ils jettent plusieurs grenades incapacitantes, plus connues sous le nom de « flashbang ». L’effet produit est redoutable : la détonation de 170 décibels et son flash aveuglant permettent de désorienter le terroriste et de le neutraliser dans la foulée.

Une fois le rez-de-chaussée « nettoyé », les marins-pompiers investissent l’intérieur de l’immeuble pour prendre en charge les blessés, tandis que les membres de l’AGIGN se positionnent pour monter à l’assaut du dernier bastion terroriste. Un deuxième piège, presque aussi invisible que le premier, est posé au niveau du pallier. Les hommes de tête le marquent à l’aide de petites capsules rouges et vertes.

À peine la dernière marche franchie, de nouvelles détonations retentissent. Les tirs parviennent à la fois à gauche et à droite de l’élément d’assaut. Les « flashbang » permettent de déloger l’individu situé sur la droite, au prix d’un nouveau blessé chez les gendarmes. Il reste encore un dernier terroriste. Logé dans la pièce du fond, il sera neutralisé après une progression lente et une reconnaissance précise de chacune des pièces.

Un opérateur de l'antenne GIGN sécurise la progression de ses camarades, avec son fusil d'assaut HK G36.

© GND F. Garcia

 

La grenade incapacitante, en plus de produire un son de 170 décibels, émet un flash aveuglant de 6 millions à 8 millions de candelas (unité de mesure de l'éclat perçu par l'œil humain d'une source lumineuse).

© GND F. Garcia

 

Les marins-pompiers sont quasiment greffés aux éléments d'assauts pour être plus réactifs en cas de problème. Là, un opérateur du GIGN, blessé, et pris en charge par les militaires de la BMPM. 

© GND F. Garcia

Piège de cristal

L’assaut semble prendre fin, mais un cri de douleur vient transpercer les oreilles de l’escouade. Il vient du rez-de-chaussée, plus précisément de l’extérieur de l’édifice. L’homme, à terre et grièvement blessé à la jambe, ne peut se déplacer. Il est tombé juste devant la voiture, utilisée précédemment par les terroristes pour s’enfuir. De leur position, à l’intérieur du bâtiment, les militaires ne peuvent pas le voir, seulement l’entendre se tordre de douleur.

Un autre opérateur, placé à l’extérieur, contre la face nord du bâtiment, tente de le faire revenir par ses propres moyens, en vain. Il est incapable de bouger. Le chef d’équipe décide d’aller le récupérer. Il passe le pas de la porte, couvert et appuyé par ses hommes quand un léger « clic » vient interrompre les cris du blessé, suivi d’une détonation.

Ce « clic » provient du percuteur d’une grenade à fragmentation. Ce dernier s’est actionné lorsque le gendarme a passé le pas de la porte et à malencontreusement tiré sur le fil, La première conséquence a été de libérer le percuteur, qui, relâché par le ressort, est venu frapper l’amorce. Sous le choc, cette dernière s’embrase et déclenche le détonateur. Son allumage active ensuite la charge explosive principale.

Couplée à la bonbonne de gaz placée dans la voiture, l’explosion, si elle avait été réelle, aurait été dévastatrice. « Il vaut mieux que ça arrive dans un exercice que dans une véritable opération », résume le chef d’escadron (CEN) Jean-Michel, directeur d’exercice et patron de l’antenne. « C’est pourquoi nous nous entraînons. »

Au total, 32 Hommes composent cette unité. Ils réalisent une centaine de missions par an. Si des interventions liées au contre-terrorisme sont rares, ce genre d’exercice permet de « maintenir une condition opérationnelle élevée et de ne jamais baisser la garde », conclut le commandant Jean-Michel. Ils sont réalisés environ deux fois par an. En 2019, l’AGIGN d’Orange est la première des six antennes de métropole à avoir acquis certaines capacités lui permettant d’intervenir, en situation d’urgence, sur une crise liée au terrorisme maritime.

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