Le gendarme Michaël a la Guyane dans le sang

  • Par le capitaine Tristan Maysounave
  • Publié le 21 janvier 2024
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Affecté au peloton bravo de l’escadron de gendarmerie mobile 13/5 de Sathonay-Camp, le gendarme Michaël, qui s’apprête à vivre sa dernière mission en gendarmerie mobile, raconte son histoire hors du commun.

Du haut de son mètre quatre-vingt-huit, le gendarme Michaël affiche un mélange de sérénité et d’impatience à la perspective de la mission qui se profile pour son unité. Avec ses camarades d’escadron, le 13/5 de Sathonay-Camp, il sera en effet projeté en Guyane à compter du 29 janvier 2024. Positionnés à Saint-Laurent-du-Maroni, les militaires seront affectés à la mission Harpie de lutte contre l’orpaillage illégal. Il s’agira du dernier engagement de Michaël en gendarmerie mobile, puisqu’il servira prochainement en gendarmerie départementale. Ce déplacement constituera pour lui un véritable achèvement personnel à la lumière du « lien filial » qu’il entretient avec la Guyane.

Né en Guyane et adopté par un gendarme

À deux heures de route au sud de Cayenne, sur la commune de Roura, se trouve le petit village de Cacao. Ce village, cerné par la forêt amazonienne et par la rivière Comté, un affluent du fleuve Mahury, est celui des Hmong. Cette communauté d’agriculteurs, originaire du Laos, s’est installée ici en 1977, après que la France leur a mis le site à disposition après la Guerre civile laotienne.

Carte de la Guyane montrant l'emplacement du village de Cacao.
© D.R.

C’est dans le dispensaire de ce village qu’est né Michaël, le 30 septembre 1993. Quatre heures plus tard, il était adopté par Catherine et Jacques.

« Mon père est rentré d’une mission forêt ce 30 septembre et il a découvert une nouvelle personne à la maison. » À l’époque, Jacques, originaire de la métropole, et qui n’est autre que gendarme, est affecté pour quatre ans à la brigade de Régina, à un peu plus d’une heure de voiture de Cacao. Il effectue fréquemment des missions forêt afin de démanteler des sites illégaux d’orpaillage. « Ma mère, quant à elle, avait conclu une convention avec la gendarmerie pour faire à manger aux deux gendarmes auxiliaires de la brigade de Régina. »

Il a tout juste un an quand son père est muté à la brigade de proximité de Nantiat (Haute-Vienne), les obligeant à quitter la Guyane.

Mais dès son plus jeune âge, Michaël, qui est fils unique, est bercé par les récits de la Guyane que lui content ses parents. Jacques et Catherine affectionnent tout particulièrement ce territoire mystique et sauvage. « À l’époque, les femmes de gendarmes effectuaient les missions avec eux. J’ai grandi avec mes parents qui me montraient les cassettes de la forêt. Ils me racontaient leurs anecdotes, les animaux qu’ils avaient croisés, les orpailleurs qu’ils avaient arrêtés. Mon père m’a raconté avoir senti un animal passer sous son hamac… Bref, c’était l’aventure. »

Enfant puis gendarme, en quête de ses origines

« Je suis retourné en Guyane avec mes parents vers l’âge de 8/10 ans. Ça n’avait aucun rapport avec ce que mes parents m’avaient raconté. J’imaginais des forêts et des animaux partout, mais sur place, j’ai été surpris par la précarité. À peine arrivé, j’avais déjà envie de repartir. »

Michaël grandit. L’idée de devenir gendarme lui passe, puis lui revient. « En regardant les experts à la télé, j’ai définitivement compris que je voulais être gendarme. » Il effectue alors des études de chimie à l’Université de Lyon 1. Titulaire d’un master, il réussit les épreuves du concours de sous-officier de gendarmerie en 2019 et rejoint l’école de gendarmerie de Dijon. À l’issue de la formation, il choisit la gendarmerie mobile et est affecté à l’escadron 13/5 de Sathonay-Camp le 23 mars 2020.

« En rejoignant la gendarmerie, je savais que je souhaitais devenir Technicien en identification criminelle (TIC) dans une CIC (Cellule d’Identification Criminelle). Or, cette spécialité nécessite de détenir l’habilitation d’Officier de police judiciaire (OPJ), qui ne peut être obtenue que quatre ans minimum après la formation en école. Je voulais voyager et notamment aller en Guyane en mission Harpie, c’est la raison pour laquelle j’ai choisi de rejoindre la gendarmerie mobile à ma sortie d’école. »

À peine arrivé dans son affectation, Michaël effectue son premier déplacement outre-mer au cours de l’été 2020. Cette mission a un goût particulier pour lui puisque son escadron est projeté en Guyane. Positionné en renfort des gendarmes départementaux de la compagnie de Saint-Laurent-du-Maroni, dans le cadre d’un Détachement de surveillance et d’intervention (DSI), Michaël entame ainsi sa carrière de gendarme mobile là où tout a commencé pour lui. « Je suis revenu en Guyane avec du recul. J’ai pu retourner à Cacao et visiter le dispensaire où je suis né avec le médecin de garde. J’avais mûri, donc je savais à quoi m’attendre, et j’ai donc bien plus apprécié ce séjour que celui effectué alors que j’étais enfant. »

Michael se tenant devant le centre de santé de Cacao en 2020.
© D.R.

Ces dernières années, l’escadron réalise plusieurs autres déplacements en outre-mer, notamment à Tahiti, en Nouvelle-Calédonie ou encore à la Guadeloupe.

À l’approche de ses quatre années d’affectation, Michaël effectue une demande de Changement de subdivision d’arme (CSA), lui permettant de rejoindre la gendarmerie départementale, préalable à une éventuelle candidature pour un poste en CIC. En parallèle, il s’inscrit à la préparation de l’examen d’officier de police judiciaire.

La boucle est bouclée

« La seule mission outre-mer que je souhaitais encore faire avant de quitter la gendarmerie mobile était la mission Harpie de lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane. Au moment où j’ai fait ma demande de CSA, nous ne savions pas encore quel serait notre prochain outre-mer, même si nous pensions qu’il s’agirait peut-être de la mission Harpie. Finalement, c’est bien celle-ci qui est tombée. Au début ça a été un coup dur, car je savais qu’il y avait peu de chance que je parte, puisque j’ai des cours à suivre en présentiel dans le cadre du CSA OPJ qui m’a été accordé. Mais j’ai tout de suite dit à ma commandante d’unité que j’étais volontaire pour effectuer la mission Harpie. Plusieurs militaires de l’escadron étant indisponibles en début de déplacement car ils effectuent les tests GIGN, une relève a été organisée. J’ai pu me positionner sur la mission jusqu’à la date de la relève, qui aura lieu début avril. L’examen d’OPJ se tiendra quant à lui fin mai. Le 15 janvier, j’ai appris que je serai affecté à la BTA (Brigade Territoriale Autonome) de Miribel (Ain) à mon retour de Guyane. Quel soulagement, je voulais absolument faire Harpie pour découvrir la forêt, les déplacements en pirogue, l’installation du camp le soir. Finalement, vivre tout ce que mes parents m’avaient raconté. Heureusement, les étoiles se sont alignées et me permettent d’y aller. »

Alors qu’il s’apprête à vivre sa dernière mission en gendarmerie mobile, Michaël retiendra de ses quatre années à l’escadron « la cohésion avec les camarades, les beaux moments vécus en outre-mer et mes déplacements en Guyane, qui m’ont permis de revenir sur mes traces. »

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