Héros du quotidien : l’adjudant Yann sauve un chauffeur poids lourd de son véhicule en feu

  • Par commandant Céline Morin
  • Publié le 17 février 2024
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Affecté au peloton de surveillance et d’intervention de gendarmerie de Strasbourg, l’adjudant Yann a été décoré, comme huit de ses camarades, lors de la cérémonie nationale organisée ce 16 février, aux Invalides, au cours laquelle la gendarmerie rend hommage à ses personnels décédés ou blessés en service, ainsi qu’à tous ses héros du quotidien. Le 24 février 2023, faisant preuve d’un grand sang-froid et faisant fi du danger, le militaire a sauvé le conducteur d’un camion en feu.

 

Ce 16 février 2024, dans la cour des Invalides, au cours d’une cérémonie nationale, la gendarmerie a rendu hommage, comme chaque année, à ses héros du quotidien, militaires blessés ou décédés dans l’exercice de leurs fonctions comme ceux ayant accompli un acte héroïque (cette cérémonie est déclinée le même jour dans les territoires, NDLR). Parmi les neuf décorés sur les rangs, l’adjudant Yann s’est vu remettre une citation à l’ordre du régiment, avec attribution de la médaille de la gendarmerie nationale. Une médaille dont la vocation est de récompenser les officiers, sous-officiers et militaires du rang s’étant distingués par une action d'éclat, accomplie à l'occasion du service ou du maintien de l'ordre, ayant nécessité des qualités particulières de courage et d'abnégation.

« Une grande fierté et un honneur »

Une récompense à laquelle le militaire, affecté au Peloton de surveillance et d’intervention de gendarmerie (PSIG) de Strasbourg depuis le 16 janvier 2021, ne s’attendait pas, « du moins à un tel niveau et dans ces proportions », confie-t-il humblement du haut de ses bientôt 37 ans. Car le gendarme va en effet également être décoré de la médaille pour acte de courage et de dévouement par la préfecture. « Je sais la valeur de la médaille de la gendarmerie. Peu de personnes l’ont. C’est une grande fierté de la recevoir, et honnêtement un grand honneur d’être convié aux Invalides. En plus, être décoré par le directeur général en personne, je trouve que ça revêt une forte symbolique. Donc oui, c’est une très grande fierté », reconnaît ce fils de gendarme, avant d’ajouter : « Mais l’action pour laquelle je suis décoré n’a finalement duré que quelques minutes à peine. Et pour moi, c’était normal ! C’est le sens de mon métier, mon devoir. »

Une intervention qui se joue à une minute

L’action en question remonte au 24 février 2023. Ce matin-là, l’adjudant Yann se rend à la brigade voisine, où il doit assurer une formation de secourisme. Il est seul à bord d’un véhicule de liaison sérigraphié. En périphérie de Strasbourg, en arrivant sur la bretelle d’accès à l’autoroute, il est pris dans un ralentissement et aperçoit alors au loin un début de panache de fumée. « Au début, je ne me suis pas trop inquiété, il arrive de temps en temps qu’il y ait un véhicule en feu sur la Bande d’arrêt d’urgence (BAU). Mais en arrivant à proximité du lieu de l’accident, j’ai constaté qu’il n’y avait pas encore de secours sur place. J’ai mis les gyrophares et je me suis stationné sur la BAU, à une distance raisonnable des véhicules accidentés, pour éviter tout risque de propagation de l’incendie. » Deux véhicules sont impliqués : un camion, qui se trouve désormais en travers de la chaussée, est entré en collision avec une voiture. La conductrice est sortie de son véhicule. Elle est indemne, « juste choquée ». Le gendarme la prend immédiatement en compte et la met en sécurité derrière la glissière de l’autoroute, avant de s’occuper du conducteur du poids lourd. Il lui faut absolument agir vite, car « la violence du choc a provoqué un début d’incendie, qui se propage rapidement juste derrière l’habitacle, où se trouve toujours le chauffeur. Celui-ci ne semble pas conscient de ce qui se passe dans son dos. En plus d’être choqué, il n’avait en effet pas de visuel sur l’incendie. Je vais donc le chercher, et là, je constate que sa portière s’est coincée dans l’impact et qu’il ne peut pas sortir. À travers la vitre cassée, je parviens à avoir une bonne prise et à arracher tant bien que mal la portière pour extraire le conducteur, qui ne paraît pas blessé non plus. »

Tandis que les deux hommes descendent de la cabine, un des pneumatiques à proximité explose, projetant le chauffeur poids lourd au sol. L’adjudant Yann écopera lui d’un traumatisme sonore.

Le gendarme a tout juste le temps de mettre le conducteur à l’abri derrière la glissière de sécurité que l’habitacle s’embrase intégralement. « Ça s’est vraiment joué à une minute. Il aurait pu brûler à l’intérieur. » Il appelle ensuite les pompiers ainsi que la CRS autoroute, ce tronçon se trouvant en zone police. « J’ai pu leur donner les premiers renseignements par téléphone, comme l’absence de matières dangereuses dans le camion par exemple. Puis, en attendant les policiers, j’ai procédé à la régulation du flux routier, dense à cette heure, et à leur arrivée, je leur ai communiqué les renseignements en ma possession avant de partir assurer ma formation. » Il prend toutefois un court instant pour faire soigner sa main « directement à l’ambulance ». « C’était une brûlure superficielle, provoquée en saisissant la carcasse brûlante. Je ne voulais pas aller à l’hôpital pour ça. Ils m’ont mis un bandage et je suis parti, parce qu’une dizaine de personnels m’attendaient. Je suis quand même allé aux urgences en fin d’après-midi pour être examiné et pour le volet administratif. »

Formation et expérience ont fait la différence

Sa maîtrise de la situation, l’adjudant Yann l’impute aux différentes formations (lire encadré) qu’il a suivies en gendarmerie, et avant. « Je pense que ça m’a aidé, aussi bien pour le dégagement du chauffeur poids lourd que pour la gestion du stress, parce qu’il y avait beaucoup de choses à gérer, un flux très important, pas mal de dangers sur cette autoroute. Après, il y a aussi l’expérience et l’ancienneté qui ont joué, peut-être une part, non pas d’inconscience, mais de détermination à vouloir tenter de faire quelque chose alors que la cabine était déjà en feu. Enfin, il y a aussi eu une grande part de chance, d’abord de réussir à ouvrir la porte, et surtout de mener l’action à bien sans blessure grave, car cela aurait en effet pu être dramatique. »

L’intervention (et le secourisme) dans le sang

En septembre 2008, à l’issue de sa scolarité à l’école de gendarmerie de Chaumont, l’adjudant (depuis le 1er janvier 2024, NDLR) Yann est affecté à l’Escadron de gendarmerie mobile 15/7 de Sarreguemines, en Moselle, où il restera jusqu’en janvier 2017, « toujours au sein du peloton d’intervention ». Il rejoint ensuite le Peloton spécialisé de protection de la gendarmerie (PSPG) de Fessenheim. Puis, en janvier 2021, il intègre le PSIG de Strasbourg, où il découvre une autre facette du métier de gendarme, même si l’intervention reste son quotidien : « l’activité redescend d’un niveau, mais ça m’a permis de découvrir vraiment le travail de « PSIGMAN », c’est-à-dire les patrouilles, le fait d’avoir une certaine autonomie dans les procédures, ce que je n’avais jamais fait auparavant. Donc une petite remise en question, mais fort intéressante. »

17 ans de carrière en gendarmerie fortement marqués donc par la dominante Intervention : « C’est un volet du métier que j’adore, donc toutes les qualifications que j’ai passées tournent autour de l’intervention pure ou du secours, qui au final est lié. » Le militaire affiche en effet une multitude de qualifications, de l’AMIP (Assistant Moniteur Intervention Professionnelle) à la qualification EOR NEDEX (reconnaissance d’engins explosifs et munitions), en passant par le brevet de tireur d’élite de la gendarmerie, « que j’ai eu la chance de passer avec le GIGN quand j’étais en PSPG », ou encore la formation de cadre de contact EPMS (Entraînement Physique Militaire et Sportif), qui permet d’encadrer les séances de sport et d’assurer le passage des CCPM (Contrôles de la Condition Physique des Militaires).

En matière de secourisme, l’adjudant Yann était qualifié avant même d’entrer en gendarmerie, « puisque j’étais pompier volontaire. Aujourd’hui, je suis instructeur, c’est-à-dire formateur de formateurs, et depuis trois mois, je suis également conseiller technique pour la région Alsace en matière de secourisme. J’ai donc gravi tous les échelons. J’ai aussi des spécialités, comme le secours aquatique. »

 

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