Entretien avec le lieutenant-colonel Galaud : « Humanité, exigence et audace »
- Par le capitaine Tristan Maysounave
- Publié le 25 septembre 2023
Affecté depuis le 1er août en tant que commandant du 2e groupement d’instruction de l’École des officiers de la gendarmerie nationale (EOGN), le lieutenant-colonel Thibault-Henri Galaud avait posé sa cantine à Beynes (Yvelines) à l’occasion de la Formation militaire initiale (FMI) des élèves-officiers de la 130e promotion. Il revient sur sa carrière et sur l’esprit de la formation, au sein de laquelle le thème de la rusticité est central.
Âgé de seulement 37 ans, le lieutenant-colonel Thibault-Henri Galaud peut déjà s’enorgueillir d’un parcours professionnel riche et varié. Après avoir occupé différentes fonctions en métropole et en outre-mer, cet officier supérieur dispose d’une fine connaissance de la gendarmerie nationale et de l’environnement interministériel.
Affecté à la tête du 2e groupement d’instruction de l’École des officiers de la gendarmerie nationale (première année de scolarité) depuis cet été, il explique percevoir toute l’importance de ce poste, dont l’enjeu est de former les chefs de demain. Les deux années de formation initiale constitueront le socle commun sur lequel s’appuieront les futurs commandants d’unité. L’intérêt est donc d’en préciser les contours avec une idée bien définie dans l’esprit du lieutenant-colonel : « en faire des chefs humains, exigeants et audacieux ».
Un parcours inspirant
Après sa formation à l’École spéciale militaire de Saint-Cyr, le lieutenant-colonel Galaud effectue son école d’application à l’École des officiers de la gendarmerie nationale (116e promotion, baptisée général Colonna d’Istria). À l’issue de sa scolarité, en 2011, il est affecté comme commandant du peloton d’intervention de l’Escadron de gendarmerie mobile (EGM) 31/6 de Toulouse, avec lequel il effectuera notamment deux déplacements en Nouvelle-Calédonie. En 2014, il devient aide de camp du Secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN). Ce poste lui permettra de prendre de la hauteur et d’aborder des sujets interministériels stratégiques. De 2016 à 2019, il occupe les fonctions de commandant de l’EGM 15/6 de Nîmes, avec lequel il est engagé à de nombreuses reprises afin de maintenir l’ordre public à l’occasion de la crise des gilets jaunes. Breveté de l’École de guerre, il est affecté, de 2020 à 2023, comme commandant de la compagnie de Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane, où il doit faire face à une forte délinquance (140 vols à main armée par an).
Ce sont cette transversalité, cette capacité d’adaptation et cette prise de hauteur que le lieutenant-colonel veut insuffler aux élèves-officiers : « Je souhaite qu’ils appréhendent pleinement l’environnement dans lequel ils évoluent et qu’ils inscrivent leurs efforts dans une approche systémique. »
La formation initiale en quatre points
Le commandant du 2e groupement d’instruction de l’EOGN explique que ses attentes s’inscrivent pleinement dans les quatre axes majeurs de la formation :
- Le volet tradition, qui permet à la promotion de se constituer une identité, une force collective.
- La militarité. Le Commandement des écoles de la gendarmerie nationale (CEGN) a souhaité densifier cet aspect, en faisant de la rusticité le fil rouge de la formation. Les stages tactiques organisés au cours de la première année ont donc été rallongés et les phases d’aguerrissement renforcées.
- Les enseignements techniques propres à la gendarmerie nationale et visant à permettre aux élèves-officiers d’aborder sereinement leur premier poste.
- La dimension humaine, qui comprend à la fois la gestion des ressources humaines et les enjeux de proximité avec la population et les partenaires de l’Institution.
« Nous tenons un discours très franc à l’attention des élèves en formation. Le métier d’officier implique des contraintes dont ils doivent avoir pleinement conscience. Ils doivent servir avant de se servir, et faire l’apprentissage de la rusticité afin d’être capable de surmonter les épreuves. C’est pourquoi nous avons fait évoluer le curseur. Nous les conduisons progressivement à se dépasser, afin de les aider à appréhender pleinement leur statut. L’humain constitue à mon sens la dimension la plus importante. Notre mission est de leur inculquer qu’on ne commande pas contre ses personnels mais avec eux, en ne confondant pas militarité et rigidité. Ils doivent à la fois faire preuve d'humanité et d’exigence, mais surtout d’audace, en se montrant pleinement conscients de leur époque et adaptés à l'environnement mouvant dans lequel ils évolueront, souligne l’officier. Devenir les chefs de demain implique d’être celles et ceux qui sortiront ingénieusement du cadre et qui trouveront les adaptations qu'exigent les spécificités d'un siècle de plus en plus incertain et complexe. Bref, ceux dont la gendarmerie a besoin pour progresser et répondre aux attentes des gendarmes et de la population dans un contexte sécuritaire de plus en plus intense. »
L’apprentissage par l’expérience
« Nous instaurons des temps d’échange entre les élèves et les instructeurs. À cette occasion, ces derniers reviennent sur leurs réussites mais surtout sur leurs échecs, afin qu’ils puissent s’en inspirer pour ne pas les reproduire », précise-t-il. Le général de division Laurent Bitouzet, commandant de l’EOGN, a par ailleurs souhaité faire intervenir de grands témoins (acteurs majeurs de la société civile, chefs d’entreprise, etc.) afin d’enrichir la formation des jeunes officiers. « Je m’inscris pleinement dans cette volonté, qui permet de favoriser leur ouverture d’esprit et de les sensibiliser au fait que leur action s’inscrit dans un environnement plus global », note le lieutenant-colonel Galaud.
Et de conclure : « Le chef de demain ? En résumé, je dirais qu’il devra se montrer moderne et novateur, attaché à la militarité, empreint d’humanité et capable de prise de hauteur. »
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