La première chaire de recherche de la gendarmerie voit le jour

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 04 juillet 2023
A gauche, Arnaud Houte, professeur à Sorbonne Université, spécialiste d'histoire de la France au XIXe siècle et d'histoire de la gendarmerie nationale, et à droite le commandant Benoît Haberbusch, du CREOGN, au quartier des Célestins, lors de la leçon inaugurale de la chaire de la gendarmerie Histoire Gendarmerie Sécurité & Territoire(s). Ils tiennent chacun un sabre.
A gauche, Arnaud Houte, professeur à Sorbonne Université, spécialiste d'histoire de la France au XIXe siècle et d'histoire de la gendarmerie nationale, et à droite le commandant Benoît Haberbusch, chef du département Stratégie de la recherche du CREOGN, au quartier des Célestins, lors de la leçon inaugurale de la chaire de la gendarmerie Histoire Gendarmerie Sécurité & Territoire(s).
© Cabcom GR / ADC F. Bourdeau

Pour la première fois de son histoire, la gendarmerie accueille en son sein une chaire de recherche, dédiée aux investigations historiques, en partenariat avec Sorbonne Université. Ce projet, porté par le Centre de recherche de l’École des officiers de la gendarmerie nationale (CREOGN), a été rendu possible grâce à un rescrit de l’administration fiscale qui ouvre la voie à des financements complémentaires.

Ce lundi 3 juillet s’est déroulée, dans la salle d’honneur de la Garde républicaine, quartier des Célestins, la leçon inaugurale de la première chaire de recherche baptisée « Histoire, Gendarmerie, Sécurité & Territoire(s) » (HiGeSeT). Ce projet a été piloté par le Centre de recherche de l’École des officiers de la gendarmerie nationale (CREOGN).

Sa conduite a été confiée à deux co-titulaires : le commandant Benoît Haberbusch, chef du département Stratégie de la recherche du CREOGN, et Arnaud Houte, professeur à Sorbonne Université, spécialiste d'histoire de la France au XIXe siècle et d'histoire de la gendarmerie nationale. Jean-Noël Luc, professeur émérite à Sorbonne Université, en sera le parrain. Deux chercheurs associés viendront prochainement compléter l’équipe et de nombreux chercheurs affiliés, a minima doctorants, issus de l’institution et en dehors, pourront être agréés pour rejoindre la chaire.

Historien de formation, le commandant Benoît Haberbusch est l’un des 21 docteurs en histoire de la gendarmerie, formant un réseau qu’il anime. « L’histoire représente tout d’abord une clé de compréhension du monde contemporain, estime-t-il. Pour le personnel, il est important de connaître les fondements de l’identité du gendarme : la légalité, la territorialité, la militarité, l’humanité et l’adaptabilité. Les officiers plus particulièrement doivent posséder une culture militaire. Même si l’histoire n’offre pas de recette miracle pour gagner les guerres, sa méconnaissance contribue à les perdre. »

Logo de la chaire Histoire Gendarmerie Sécurité & Territoires (HiGeSeT)
© Cabcom GR / ADC F. Bourdeau

Avec la Sorbonne, un dialogue payant depuis plus de 20 ans

Créé en 2008, à Melun, le CREOGN  a pour vocation de valoriser la recherche au sein de la gendarmerie nationale, en multipliant les partenariats avec le milieu académique, notamment en favorisant l’approche interdisciplinaire dans les domaines de la sécurité intérieure et de la défense. « Or, une chaire de recherche représente une opportunité de rencontres entre les milieux universitaire et institutionnel et les mécènes qui peuvent aider à monter des projets de recherche, des colloques et des publications », indique le chef du département Stratégie de la recherche.

Pour fêter ses 15 ans, l’entrée dans l’adolescence en quelque sorte, le CREOGN a donc souhaité s’offrir sa première chaire, en partenariat avec l’Université Paris IV-Sorbonne. « Cela s’inscrit dans le cadre d’une longue histoire commune, et il est logique que ce soient eux qui aient répondu présent », souligne le commandant Haberbusch. Une convention, signée en 2001, a en effet déjà permis la formation d’officiers historiens docteurs, la soutenance de 16 thèses, l’organisation de 10 colloques ou journées d’études, ainsi que la publication de plus de 45 ouvrages et de plusieurs centaines d’articles.

Plus de 20 ans après cette signature, les deux institutions franchissent donc, ce 3 juillet, une étape cruciale. La création d’une chaire est de nature à redynamiser la recherche universitaire en assurant la transmission des savoirs auprès d’une nouvelle génération d’historiens, et en faisant connaître au plus grand nombre le passé des gendarmes, qui est intimement lié à l’histoire de France. « Cette chaire va permettre d’entretenir et d’institutionnaliser cette relation entre la gendarmerie et la Sorbonne, se félicite le professeur Arnaud Houte. Cela va resserrer nos liens, soutenir le travail collectif qu’est la recherche universitaire, en proposant des rendez-vous, des temps forts, et favoriser la diffusion de cette recherche au sein de la gendarmerie. »

Professeur d’histoire contemporaine, Arnaud Houte a notamment écrit une thèse sur la gendarmerie au XIXe siècle, puis travaillé sur le vol au XIXe et au XXe siècle. « Plus généralement mes recherches portent sur l’ensemble des questions de sécurité publique à l’époque contemporaine. Si on fait de l’histoire, c’est pour donner à réfléchir aujourd’hui. C’est la dimension sociale du rôle de l’historien. Travailler sur l’histoire de la gendarmerie, c’est s’interroger sur les notions de proximité, de territoire. La gendarmerie a ceci de particulier qu’elle s’adapte en permanence. Comment penser son ancrage aujourd’hui ? À cette question, l’historien n’apportera pas de réponses définitives, mais des éléments pour nourrir le débat. »

Le professeur Houte fait un discours au pupitre avec deux micros devant un panneau avec des silhouettes en ombre de gendarmes et une peinture d'un garde républicain.

Arnaud Houte, professeur à Sorbonne Université, spécialiste d'histoire de la France au XIXe siècle et d'histoire de la gendarmerie nationale, quartier des Célestins, lors de la leçon inaugurale de la chaire de la gendarmerie Histoire Gendarmerie Sécurité & Territoire(s).

© Cabcom GR / ADC F. Bourdeau

Un plan Ambition Recherche

La chaire HiGeSeT souhaite orienter son activité suivant cinq axes qui pourront aboutir à la création de pôles : la maîtrise des espaces et l’implantation sur des territoires en mutation ; la sûreté, la sécurité et la souveraineté ; la transformation des forces de l’ordre et des organisations policières ; l’évolution des technologies de la sécurité et de l’innovation ; l’éthique.

« C’est une chaire d’histoire, mais qui a vocation à s’ouvrir à d’autres disciplines, complète le commandant Haberbusch. Le projet a été conduit dans un esprit « start-up » au sein d’un écosystème favorable, à Melun, avec notamment le le Centre d'entraînement et de simulation au commandement opérationnel (CESCO), qui permet de bénéficier d’outils pédagogiques innovants, le Musée de la gendarmerie nationale, qui est le navire amiral mémoriel de la gendarmerie, sans oublier le Bureau Communication de l’EOGN. »

La création de cette chaire s’inscrit dans le cadre d’un plan plus global, baptisé Ambition Recherche. « Ce plan comprend trois axes, détaille le colonel David Bièvre, commandant adjoint du CREOGN. Tout d’abord, conforter les études annuelles, et lancer des études pluriannuelles, financées par le CREOGN pour répondre à des besoins exprimés par les directions et les formations administratives de la gendarmerie nationale ; ensuite, multiplier les parcours doctorants, en initiant des Conventions de formation recherche en administration (COFRA), en lançant des parrainages avec les universités, en identifiant des recherches d’intérêts communs avec le chef d’état-major des armées et en participant à un vivier commun, et en développant une filière dédiée à l’histoire. Enfin, dans cette logique, créer la toute première chaire de recherche de la gendarmerie, et d’autres ensuite, afin de changer de dimension et d’ouvrir le champ des possibles, en s’inscrivant dans un écosystème avec des chaires cousines, à l’instar de celle du Québec. »

Pour soutenir ce plan tous azimuts, la gendarmerie a besoin de mécènes. Raison pour laquelle elle a travaillé pendant de long mois avec l’administration fiscale, afin d’obtenir un rescrit ayant pour objet l’éligibilité du CREOGN au régime fiscal du mécénat. La réponse favorable est intervenue en février 2023. « C’est la clé de voûte de ce plan, estime le colonel Bièvre. L’obtention de ce rescrit s’inscrit dans le cadre de la recherche de financements innovants, quatrième pilier de la stratégie GEND 20.24. Le CREOGN jouera le rôle de tour de contrôle, pour s’assurer que le mécénat s’organise en cohérence et en sécurité, et s’est doté pour cela d’un bureau des chaires et du mécénat qui assurera une mise en œuvre comptable permettant de garantir la traçabilité de la destination des fonds, telle que prévue par le rescrit et les exigences de contrôle de l’administration fiscale, et qui sera chargé d’adresser aux mécènes les reçus fiscaux au format défini par le fisc. »

Ce lundi 3 juillet, quartier des Célestins, la chaire HiGeSeT a donc vu le jour officiellement. La rédaction de Gend’Info lui souhaite longue vie, ainsi qu’à ses futures petites sœurs.

 

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