80e anniversaire de la Libération de la France : l’héroïsme des gendarmes de la Chapelle-en-Vercors pendant la Seconde Guerre mondiale

  • Par M. Alexis Geider, chargé d'études "Enseignements et médiation culturelle" à la Délégation au patrimoine
  • Publié le 16 avril 2024
La photo, en noir et blanc, représente des militaires debout, alignés, en plusieurs rangées, face à un bâtiement de gendarmerie, quie l'on devine, et dont une voit la pancarte. On aperçoit en arrière-plan le flan d'une colline ainsi qu'une paroi rocheuse

Inauguration de la caserne de la Chapelle-en-Vercors

 

© D.R.

Le président de la République, Emmanuel Macron, lancera le coup d’envoi des commémorations des 80 ans de la Libération de la France ce 16 avril 2024 dans la Drôme, plus précisément à Vassieux-en-Vercors, où il rendra hommage aux Résistants du maquis. À cette occasion, la gendarmerie se souvient de ceux qui ont lutté contre l’Occupant. La résistance du gendarme revêt de nombreux visages. De la résistance par l’inertie administrative à la lutte armée et l’entrée dans la clandestinité, de nombreux gendarmes ont rejoint les rangs de la Résistance. Ceux de la brigade de la Chapelle-en-Vercors offrent une mise en perspective riche de l’histoire de l’Occupation.

 

Les chaînes de montagnes du Vercors présentent un enjeu militaire de taille pour les Allemands : elles sont un espace difficile d’accès, dont le contrôle est entravé par l’étendue et la complexité de son relief. À la fin de l’année 1942, un groupe s’assemble sous la bannière du mouvement « Franc-Tireur ». Il s’appuie sur les efforts des résistants Yves Farges, Pierre Dalloz et Jean Prévost, qui proposent d’aménager des pistes d’atterrissage dans le massif afin de permettre l’acheminement de matériel et de soldats alliés, et d’appuyer un éventuel débarquement en Provence. L’idée est validée par Jean Moulin dès février 1943 et rebaptisée « Projet Montagnards ». C’est le début du maquis du Vercors, qui croît tout au long de l’année 1943 au gré des parachutages alliés et de l’exode des réfractaires au Service de travail obligatoire (STO).

La Chapelle-en-Vercors, un lieu central dans l’organisation du maquis

Le canton de la Chapelle-en-Vercors devient très vite un lieu central dans l’organisation du maquis. Il abrite plusieurs chefs de la Résistance et des réunions secrètes y sont régulièrement organisées. C’est également un lieu de fuite pour les réfractaires du STO et les résistants entrés en clandestinité : 139 personnes y sont réfugiées rien qu’en novembre 1943. L’importance de la Chapelle-en-Vercors dans le dispositif résistant est rendue possible grâce à sa brigade de gendarmerie, commandée par le maréchal des logis-chef (MDC) René Garcin. Originaire de Froges, dans l’Isère, le MDC Garcin est en poste à la Chapelle depuis 1941. Il a sous ses ordres les gendarmes Édouard Hervé, René Célérien, Jean Mouisset, Pierre Lemée, René Billard et Ange Cesari.
La brigade de la Chapelle-en-Vercors manifeste très vite sa sympathie envers le maquis. Elle commence par fermer les yeux sur les activités clandestines du canton et se montre complaisante vis-à-vis des échappés du STO. À partir de 1942, elle participe dans l’ombre au développement du maquis du Vercors en l’informant des mouvements des Allemands et de la Milice. La brigade joue la carte de l’inertie face à l’occupant. Elle tarde à envoyer ses rapports et n’hésite pas à les déformer afin de préserver le canton des représailles. En septembre 1943 par exemple, deux gendarmes de la Chapelle sont appelés pour constater et sécuriser les lieux d’un incendie à la limite du hameau de Jossaud. Le feu résulte d’un accrochage entre la cellule C6 du maquis avec des militaires italiens. Les deux gendarmes retarderont volontairement l’envoi de leur rapport et ne préviendront les autorités que le lendemain, afin de laisser le temps aux résistants d’évacuer les lieux avec leur matériel.
Tout au long de l’année 1943, les gendarmes de la Chapelle participent à des parachutages et des déplacements de dépôts d’armes et de munitions. Ils coordonnent un réseau de renseignements jusqu’à leur entrée officielle dans les Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) le 9 juin 1944. Ils se constituent alors en prévôté et contribuent à la formation des maquisards.

Sur la partie gauche de l'image, un gendarme en uniforme se voit remettre une médaille (photo en noir et blanc), tandis que sur la partie droite, on aperçoit la façade d'un bâtiment massif, portant sur sa façade, en lettres capitales, l'inscription GENDARMERIE NATIONALE (photo en noir et blanc)

A gauche : L’ADC René Garcin recevant la médaille de la Résistance (1955)
A droite : La brigade de la Chapelle-en-Vercors (1939)

© Collection privée de la brigade de la Chapelle-en-Vercors

Le Vercors fait face seul aux assauts allemands

À partir de 1944, la notoriété du maquis du Vercors fait affluer toujours plus de réfugiés et de combattants, lui attirant les représailles des autorités allemandes et collaborationnistes. En juin 1944, le débarquement de Provence approchant, le Plan Montagnards est activé prématurément. La République libre du Vercors est déclarée et les accès au massif sont verrouillés par des résistants. Des hommes sont parachutés par les Alliés pour aider à la formation et à la coordination du mouvement, mais aucune force majeure de libération n’est envoyée. Le débarquement tant attendu n’aura lieu qu’en août. Le Vercors doit faire face seul aux assauts allemands qui débutent en juillet 1944. Des parachutistes sont largués à Vassieux, qui brûle le 23 juillet, après trois jours de combats et de massacres. Le maquis est écrasé après une lutte acharnée et de nombreuses tueries, qui causeront la mort de 639 résistants et 201 civils dans tout le massif.
La Chapelle-en-Vercors est bombardée dès les 12 et 14 juillet. Les gendarmes se coordonnent pour abriter la population. Blessé, le gendarme Édouard Hervé est évacué vers la grotte de la Luire, où est installé un hôpital. Pendant ce temps, ses camarades se joignent à la lutte armée et combattent dans tout le massif. Le 25 juillet, les Allemands occupent la Chapelle-en-Vercors. Ils raflent seize jeunes hommes qu’ils fusillent après avoir incendié une centaine de maisons. La grotte de la Luire est également prise d’assaut et ses blessés tués ou faits prisonniers. Le gendarme Hervé y est arrêté par les Allemands. Le 28 juillet, il est contraint de creuser sa propre tombe avant d’être exécuté. Il avait eu 24 ans trois jours plus tôt.

L'illustration représente une acrte de combattant volontaire de la résistance, au nom de Monsieur Garcin. La carte comporte sur sa partie gauche une photographie en noir et blanc d'un homme d'âge moyen, en uniforme.

Carte de combattant de la Résistance René Garcin

© Collection privée de la brigade de la Chapelle-en-Vercors

Devoir de mémoire

Après la guerre, le maréchal des logis-chef René Garcin et le gendarme René Célérien furent récompensés de la Croix de guerre pour services rendus à la Résistance. La brigade de gendarmerie de la Chapelle-en-Vercors, désormais brigade Adjudant-chef René Garcin, est la seule de France à avoir reçu la médaille de la Résistance. La préservation de la mémoire de la brigade est un enjeu de l’arme. Elle est perpétuée par la 401e promotion d’élèves gendarmes de l’école de Chaumont, qui choisit la Chapelle-en-Vercors comme parrain de promotion.
Les gendarmes de la Chapelle illustrent la complexité du quotidien des gendarmes sous l’Occupation, ainsi que le courage dont certains ont fait preuve pour défendre leur patrie. Sur les 39 000 gendarmes qui composent l’arme pendant la guerre, près de 12 000 s’engagent dans la résistance. On en dénombre officiellement 338 qui sont fusillés. Et des 1 352 qui sont déportés en Allemagne, 431 ne reviendront pas.

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