Les gendarmes de Fontainebleau arrêtent une bande d’escrocs aux faux SMS

  • Par le chef d'escadron Charlotte Desjardins
  • Publié le 30 janvier 2024
Un gendarme de dos en civil portant une veste noire siglée "Gendarmerie brigade de recherches" et jean, devant un véhicule gris avec sa collègue dans la même tenue
© SIRPA-G - GD B. Lapointe

De juillet à septembre 2023, un groupe de jeunes escrocs sévit en Île-de-France. La brigade de recherches de Fontainebleau a conduit l’enquête jusque dans le Val d’Oise. Trois majeurs et deux mineurs sont arrêtés le 12 décembre 2023, l’auteur principal est incarcéré dans l’attente du jugement.

« Ne répondez jamais à un SMS ou à un mail dont vous ne connaissez pas l’origine. S’il n’y a pas de phishing, il n’y a pas d’escroquerie. » répète le maréchal des logis-chef (MDC) Florent, Directeur d’enquête (D.E.) sur cette affaire d’escroquerie aux SMS opérée en Île-de-France. Si obtenir des informations confidentielles par SMS puis de se faire passer pour un banquier au téléphone est une méthode d’escroquerie courante, elle continue de fonctionner car les victimes ne se méfient pas. Un message demandant de remplir un formulaire contenant des données confidentielles doit être considéré comme frauduleux. C’est de là que tout part, et toutes les victimes dans ce dossier ont commencé par recevoir un SMS. Et l’escroquerie se fonde grâce à une simple réponse à celui-ci...

Plusieurs faits similaires

L’enquête a commencé en juillet dernier, lors d’un dépôt de plainte à la Brigade territoriale autonome de Cély, en Seine-et-Marne : la victime s’est faite arnaquer.

Elle a été contactée au téléphone par un homme prétendant travailler dans sa banque et qui détenait toutes les informations personnelles que cette dernière pourrait avoir. L’homme lui fait faire des manipulations diverses sur son compte (blocage de paiements...), après l’avoir mise en confiance. Ensuite, l’escroc lui explique que sa carte bancaire a été piratée, il lui annonce la marche à suivre : un coursier va se rendre à son domicile pour récupérer sa carte, et une autre lui sera restituée de la même manière. Comme la victime a coupé sa carte en deux, elle ne voit aucun problème à la lui remettre. Quelques heures plus tard elle se rend compte que sa carte a été utilisée de manière frauduleuse dans le Val d’Oise et qu’il y a eu des tentatives d’achat, aussi se rend-t-elle immédiate à la brigade de gendarmerie de Cély-en-Bière.

« Une semaine plus tard, une autre personne vient déposer plainte à la Chapelle-la-Reine pour des faits selon le même mode opératoire, mais la carte est cette fois-ci utilisée dans l’Oise. La Brigade de recherches (B.R.) de Fontainebleau est alors saisie des deux faits par le parquet de Melun, au vu de l’organisation des auteurs et de la sérialité des faits », explique le gendarme.

Une méthode bien rodée dans une logique d’anonymisation

Les enquêteurs se rendent rapidement compte que tout commence par du hameçonnage, aussi appelé phishing. Ils identifient des individus envoyant en masse des SMS disant provenir d’organismes tels qu’Ameli, invitant à remplir en ligne un formulaire afin de régler un soucis. Le dit formulaire demande des données personnelles et bancaires.

Ces dernières permettent aux escrocs de récupérer des informations confidentielles comme le nom du banquier, le montant sur les comptes, etc, autant d’éléments visant à mettre en confiance la victime lors du coup de téléphone qui suit. Les malfaiteurs réalisent certaines opérations avec la victime (hausse des plafonds avec double authentification, etc).

Une fois cela fait, un coursier est envoyé à son domicile. « Les auteurs passent par plusieurs sociétés différentes, dont les employés ne sont majoritairement pas au courant de leur participation à cette entreprise, même si certains ont eu des suspicions dont ils ont fait part aux victimes. Celles-ci sont persuadées d’avoir à faire à leur banque et persistent. Elles n’ont pas de contact visuel avec les auteurset ne peuvent qu’identifier les transporteurs, lesquels ont simplement répondus à une commande dans le cadre de leur travail. » ajoute le MDC Florent.

Les chauffeurs remettent ensuite l’objet du délit dans le département du Val d’Oise à une autre personne qui va utiliser la carte...laquelle n’est généralement pas non plus l’un des escrocs, ce qui permet d’ajouter un palier supplémentaire en terme d’anonymisation.

À noter :

Les conseils de l’enquêteur:

- Ne jamais donner de coordonnées bancaires ou personnelles ;

- En cas d’appel suspect, contacter votre banque, conseiller bancaire, service fraude en retapant soi-même le numéro de téléphone quand bien même le numéro affiché est celui de votre banque ;

- Ne jamais donner sa carte bancaire à quelqu’un mais la déposer en agence ;

- Bien couper la puce si la carte est jetée.

Un travail d’enquête en plusieurs phases

« On a travaillé sur plusieurs phases, précise l’officier de police judiciaire, à commencer par les comptes bancaires en ligne ». Les gendarmes s’intéressent aussi aux entreprises de voitures de transport avec chauffeur (VTC), et notamment les trajets que ceux-ci réalisent.

Quelques auteurs sont rapidement identifiés, notamment le principal, bien que celui-ci utilise une application d’anonymisation pour ses appels.

Le travail d’écoute et de surveillance mené dès lors par les gendarmes leur permet d’identifier l’ensemble des complices mais aussi de comprendre le fonctionnement de ce groupe très organisé qui fonctionne comme une petite entreprise. L’auteur principal le dirige, certains récupèrent les informations bancaires, d’autres s’occupent des SMS et des appels. Le tout est lié à un système de blanchiment d’argent.

Des délinquants déjà connus

Sept suspects sont identifiés dans le département 95, dont deux mineurs, pour une quinzaine de faits commis entre juillet et septembre 2023.

L’opération menée le 12 décembre 2023 conduit à la convocation de deux mineurs au Tribunal pour enfants de Pontoise. Trois autres mis en cause, majeurs, seront jugés en février ; deux d’entre eux sont placés sous contrôle judiciaire et le leader du groupe est provisoirement écroué. La peine maximale encourue est de 10 ans de prison, les chefs principaux relevés contre eux étant l’escroquerie en bande organisée et l’association de malfaiteurs.

La jeunesse des mis en cause (à peine plus de 20 ans pour le plus âgé) n’est pas la seule particularité de cette affaire. Ils baignent dans le vol et les escroqueries depuis plusieurs années et sont déjà connus de la Justice.

Mais surtout, et c’est ce que souligne le D.E., « ils ont une connaissance approfondie de l’informatique et de la téléphonie. Ils n’ont aucun mal à se faire passer pour des banquiers auprès des victimes, ont capté le vocabulaire et les termes précis du milieu bancaire.Leur connaissance en technologies et en cryptomonnaie leur permettent aussi de blanchir l’argent ou encore de se rendre anonyme ». De plus, ils travaillent systématiquement à améliorer leur technique.

Mais leurs efforts n’ont pas suffi puisque l’habileté et le travail des gendarmes bellifontains se sont avérés déterminants !

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