Les rouages de la stratégie à l’international de la gendarmerie

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 25 septembre 2023
Gros plan sur trois petits drapeaux, européen, français et italien, posés sur une table de réunion, où se trouvent également des cartouches portant le nom des participants. En arrière plan, flous, trois officiers en vareuse.
© Sirpa Gendarmerie - GND Florian Garcia

La stratégie à l’international de la gendarmerie s’appuie sur une approche géo-thématique ciblée, construite à partir des orientations définies par le président de la République et déclinées par le ministère de l’Intérieur et des Outre-mer dans sa sphère de compétences. Elle se traduit par des actions de coopération institutionnelle, technique et opérationnelle, permettant de promouvoir le modèle gendarmerie ainsi que sa capacité d’innovation et de transformation.

 

« L’international est un levier démultiplicateur de notre action du quotidien sur le territoire national. De prime abord, l’international peut sembler éloigné de notre mission de sécurisation, pour autant, la réalité de notre criminalité, de plus en plus transnationale, nous oblige à une coopération policière transfrontalière de tous les jours. Notre action à l’international, qui est l’un des axes de la stratégie du Directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), représente ainsi non seulement un levier d’influence, mais également un outil opérationnel qui prolonge notre action nationale », présente le colonel Olivier Alary, chef du Pôle des affaires européennes et internationales (PAEI), point d’entrée de la gendarmerie en la matière.

La gendarmerie s’inscrit bien évidemment dans un écosystème national, dont les priorités d’action, édictées au plus haut sommet de l’État sont ensuite déclinées au sein de chaque ministère, sous couvert du Ministère des Affaires étrangères et européennes (MEAE).

Afin de pouvoir répondre efficacement aux différentes sollicitations, passant principalement par la Direction des affaires européennes et internationales (DAEI), point d’entrée unique pour le Ministère de l’Intérieur et des Outre-mer (MIOM) depuis 2020, la DGGN inscrit son action en cohérence et en coordination avec l’ensemble des services compétents du ministère. Ainsi, après la création, le 1er septembre 2010, de la Direction de la coopération internationale (DCI), (devenue « de sécurité » - DCIS - en 2021), née de la fusion du Service de coopération technique internationale de police (SCTIP) et de la Sous-direction de la coopération internationale de la gendarmerie, le Pôle affaires internationales (PAI) au sein du cabinet du DGGN s’est davantage structuré, en s’appuyant, pour ce qui relève des missions à statut militaire, sur le Bureau des relations extérieures militaires de la gendarmerie (BREMG), au sein de la Direction des opérations et de l’emploi (DOE). Plus récemment, profitant de la dynamique de la Présidence française de l’Union européenne (PFUE) et des sollicitations plus nombreuses faisant suite à la création de la DAEI, CAB PAI s’est renforcé à quatre personnels (contre deux initialement), devenant au passage le pôle des affaires européennes et internationales. Une Mission internationale a par ailleurs

vu le jour au sein de la DOE. Et le BREMG s’est transformé en Commandement de la gendarmerie pour les missions extérieures (CGMEx). Le Pôle de coopération judiciaire internationale, au sein de la Sous-direction de police judiciaire de la DOE, vient compléter cette architecture, quand le Commandement de la gendarmerie prévôtale (CGP), pour sa part, reste sur le domaine spécifique d’appui aux Armées.

« Les missions du PAEI sont de trois ordres, précise l’officier. La première est de s’assurer de la mise en cohérence de la stratégie internationale de la gendarmerie avec les exigences diplomatiques et politiques ministérielles, mais aussi avec les contraintes et les opportunités qui peuvent apparaître à l’international. Ensuite, nous veillons dans ce cadre à la convergence de l’action de la gendarmerie entre le volet national et le volet international, tant dans les dimensions stratégiques qu’opérationnelles. Il s’agit concrètement d’évaluer les stratégies d’alliance, de donner des avis d’opportunité, ou encore d’éliminer tout risque réputationnel… Nous œuvrons, par exemple, avec le Commandement de la gendarmerie outre-mer (CGOM) à développer la dimension internationale dans les outre-mer (pour mémoire, notre frontière la plus longue est avec le Brésil). Enfin, notre mission est d’identifier des initiatives sur le terrain répondant aux exigences gouvernementales et ministérielles, afin de proposer au ministère des « livrables », notamment en matière de coopération bilatérale. Notre troisième axe d’effort est de susciter et d’entretenir cette culture commune des forces de sécurité intérieure en Europe, mais aussi auprès de nos gendarmeries sœurs à travers le monde. Cela passe par la valorisation au sein du ministère, et plus largement au sein des instances européennes, des livrables identifiés sur le terrain, comme l’UOFA ou Polaris. »

Pour appuyer cette stratégie, et ainsi pérenniser son positionnement à l’étranger, l’Institution met notamment en œuvre une politique R.H. valorisant les parcours internationaux et l’expertise de ses personnels, comme l’illustre, par exemple, la mise en place d’Agorha compétences par la direction des personnels militaires.

De la stratégie à l’engagement des forces

La mise en œuvre opérationnelle est quant à elle à la main de la DOE, par l’entremise du Centre national des opérations (CNO), appuyé en tant que de besoin par la MISSINT, notamment pour la planification de l’engagement des forces, par exemple sur le théâtre ukrainien. Le CGMEx est, pour sa part, l’opérateur R.H. pour ce qui relève du déploiement individuel des militaires en opérations (PSDC, ONU, OTAN…). Diverses structures peuvent être impliquées en fonction des actions conduites, à l’instar des centres de formation et des écoles, mais aussi des commandements opérationnels, chacun disposant d’une composante dédiée aux relations internationales, comme le GIGN, les forces aériennes, la garde républicaine, le pôle judiciaire de la gendarmerie, ou encore les offices centraux de police judiciaire.

Acteur clé de cette mise en musique et de sa cohérence globale, le CGMEx, rattaché au CGOM, prépare, déploie, soutient et débriefe ainsi la majorité des militaires de la gendarmerie déployés à l’étranger - à l’exception de ceux en charge de la protection des hautes personnalités, des personnels en poste à Europol et Interpol, et de la prévôté - soit une population de plusieurs centaines de militaires, fluctuant en fonction des crises internationales. Il s’agit tout d’abord des Gardes de sécurité diplomatique, ou GSD (entre 280 et 290), pouvant être renforcés par des GSD temporaires, ensuite des officiers (26) et sous-officiers (12) du GOPEX (pour Groupement des Opérations extérieures), du vivier de volontaires pour les missions Opex et, enfin, des militaires dédiés à la mission Frontex (11). Le CGMEx assure également le suivi de la dizaine d’officiers et de sous-officiers insérés sur des postes permanents au sein des organisations internationales et européennes (OTAN, ONU, U.E., FGE, Coespu), et depuis peu des officiers de la sphère internationale déployés au MEAE. Il gère en outre la population des Attachés de sécurité intérieure (ASI), adjoints, assis- tants et officiers de liaison (suivis par la DCIS), ainsi que les Coopérants militaires techniques (CMT), sous la double tutelle DCIS et DCSD. Au-delà de la gestion de ces effectifs, le CGMEx collabore à l’identification des postes d’intérêt et d’influence au sein des enceintes européennes et internationales, participe à l’identification et à la gestion du vivier de personnels rompus aux mécanismes de décisions européens et internationaux, collecte et diffuse des informations provenant de pays ou de zones d’intérêt pour la gendarmerie ou sur des thématiques particulières ; et enfin, il pilote des dossiers de coopération bilatérale et multinationale (FGE et FIEP notamment).

De façon prospective, le CGMEx agit comme force de proposition en matière de coopération internationale des COMGEND, qu’il soutient pour cette thématique, sous l’autorité du CGOM, et en matière d’ingénierie de coopération, au service des axes prioritaires définis par le DGGN.

La prévôté : une mission historique de justice militaire

Toujours à l’international, mais dans la sphère très spécifique de la justice militaire, mission aux origines mêmes de la gendarmerie, le CGP a vu le jour en 2012, en remplacement de la fonction prévôtale qui existait au sein de la DOE, avant d’être également rattaché au CGOM en août 2021. Il relève à la fois du chef d’état-major des Armées, et donc du Ministère des Armées (MINARM), auprès duquel les prévôts sont placés pour emploi, mais aussi des magistrats spécialisés du tribunal judiciaire de Paris. Si, aujourd’hui, les prévôts ont conservé cette fonction de répression des actions délictuelles ou criminelles imputables à un militaire français, ils contribuent également à les protéger des crimes et délits dont eux-mêmes pourraient être victimes. Une section de recherches spécifique, forte de six militaires, est d’ailleurs projetable pour appuyer les détachements prévôtaux déployés sur les théâtres. Les prévôts gèrent également les affaires mortuaires en lien avec le commissariat aux armées et le Service de santé des armées, qu’il épaule par ailleurs dans le cadre de la destruction de substances toxiques ou psychotropes arrivant à péremption, afin d’éviter qu’elles n’alimentent des trafics. Ils effectuent également des escortes de transport de fonds et contribuent à l’accompagnement de convois sensibles. S’ajoute à cela un volet renseignement, qui permet aux prévôts de contribuer à la sécurité des forces, et plus largement des intérêts français, sans oublier la dynamisation de la coopération internationale. À cet effet, le CGP sélectionne, forme et projette les prévôts, en détachements de courte ou de longue durée, puis oriente et contrôle leur action. Il dispose pour ce faire d’un vivier de près d’un millier de militaires, déployables parfois sous le signe de l’urgence, comme ce fut le cas en 2021, en Roumanie. Ils sont à ce jour 61 répartis sur quinze théâtres.

À travers toutes ces missions, la gendarmerie déploie ainsi aujourd’hui près de 700 militaires à travers le monde, offrant une empreinte terrain sur l’ensemble des thématiques internationales d’intérêt pour l’Institution.

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