La prévôté, racine et ancrage militaire de la Gendarmerie

  • Par le chef d'escadron Charlotte Desjardins
  • Publié le 13 septembre 2023
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Apparue au XIIe siècle, pour l’exercice de la justice dans l’environnement des guerres, la prévôté est la mission la plus ancienne et la racine militaire de la gendarmerie. Le champ de ses missions s’est élargi au fil des siècles, lui conférant aujourd’hui une importance croissante pour l’accompagnement des forces armées en opérations extérieures.

La gendarmerie nationale est l’héritière de la maréchaussée. Au Moyen-Âge, marquées par les guerres, les armées ne sont pas permanentes, et la plupart des soldats ne sont pas des gens de métier. Pour répondre au besoin d’encadrement disciplinaire des troupes et de la répression des « maléfices commis par les gens de guerre », l’autorité royale décide de se doter d’une police militaire confiée aux prévôts des maréchaux. Ces derniers possèdent à la fois les pouvoirs de police et de justice auprès des armées, qu’ils accompagnent à l’occasion de leurs déplacements. La gendarmerie prévôtale exerce toujours la mission de police judiciaire aux armées, sur tous les théâtres où des contingents français sont déployés. Son champ de compétence s’est peu à peu élargi à un ensemble de missions de police militaire et administrative qui concourent à la protection du dispositif militaire qu’elle accompagne. Elle exerce ces missions dans le cadre d’une triple chaîne de responsabilité : le commandement de la gendarmerie prévôtale, l’autorité militaire sur le théâtre et l’autorité judiciaire en charge des affaires militaires au Tribunal judiciaire de Paris.

Des gendarmes aux compétences judiciaires à l’étranger

La présence des prévôts auprès des armées n’est pas seulement un héritage historique. L’engagement militaire à l’étranger au XXIe siècle étant hautement sensible aux niveaux politique et médiatique, la prévôté prend ainsi un sens accru, et d’un certain point de vue nouveau. Ces militaires reçoivent une formation de perfectionnement spécifique, qui leur permet d’exercer l’ensemble de leurs missions aux côtés des forces armées engagées en OPEX, dans des conditions souvent très dégradées. On leur confère alors une habilitation spéciale d’Officier de police judiciaire des forces armées (OPJFA). Remontant aux racines de la gendarmerie nationale, la police judiciaire aux armées est la mission principale de la prévôté. Son exercice s’inscrit dans la nécessité de trouver un équilibre entre les contraintes de l’engagement opérationnel des armées françaises à l’étranger et la bonne administration de la justice, pour les faits relevant de son périmètre. Dans cette perspective, les prévôts participent quotidiennement à l’action des forces armées, pour lesquelles ils sont un soutien solide et fiable auprès des chefs militaires.

Le Code de la défense (article L3211-3) et le Code de justice militaire (articles L411-1 et 2) régissent leur action. En tant qu’OPJFA, ils agissent sous la direction de la section AC3 du parquet de Paris, compétente pour les affaires militaires et les atteintes à la sûreté de l’État. C’est donc sous son autorité que la prévôté intervient chaque fois qu’un militaire ou un ayant droit est impliqué pénalement sur un territoire étranger, en tant que victime ou auteur. Ces gendarmes, officiers de police judiciaire expérimentés, exercent également des missions de police générale, en appui des Forces : escortes ou accompagnement de convois sensibles, règlement de contentieux civils, constatations diverses, recueil d’informations intéressant la sécurité de nos forces, affaires mortuaires, actions de prévention… Ils sont présents au plus près du commandement et au contact des troupes, afin de prévenir les troubles ou incidents susceptibles d’impliquer les militaires français. Les prévôts sont aussi appréciés pour leur rôle de facilitateurs. Ils sont ainsi généralement en charge des relations avec les autorités judiciaires et les forces de sécurité intérieure locales, dans une logique de coopération qui participe à prévenir et à traiter efficacement les atteintes à la sécurité de nos forces armées.

Quatre militaires alignés de gauche à droite, un gendarme néerlandais, un gendarme français, un autre néerlandais et un dernier français, dans le treillis de leur pays, echangent en marchant sur un chemin boueux, sous le ciel gris. A droite, longeant le chemin, plusieurs véhicules militaires stationnés
© SIRPA-G - GD B. Lapointe

L’organisation de la gendarmerie prévôtale

Basé à Maisons-Alfort, le Commandement de la gendarmerie prévôtale (CGP) sélectionne, forme, projette et dirige l’action des prévôts, qui sont placés pour emploi auprès du Chef d’État-major des armées. Il est également chargé de les inspecter.

Créé en 2012, le CGP contribue à la mise en œuvre de la judiciarisation spécifique aux armées. Rattaché au Commandement de la gendarmerie outre-mer (CGOM) depuis 2021, ce commandement de la gendarmerie unique pour l’ensemble des gendarmes de la prévôté est clairement identifié par les magistrats et les armées, avec lesquels il assure une constante relation. Sous les ordres du CGP, 60 à 80 prévôts, répartis en quinze détachements permanents ou de circonstance, sont actuellement déployés dans les pays où les forces françaises stationnent de manière régulière ou occasionnelle, comme à Djibouti, en Allemagne, au Sénégal, en Roumanie ou en Estonie. Une Section de recherches prévôtale (SRP), à compétence nationale, prolonge l’action et les enquêtes de ces détachements, qu’elle renforce au besoin sur les théâtres. Chaque unité a à sa tête un officier chef de détachement, qui endosse un rôle de Conseiller gendarmerie (CONSGEND) auprès du commandement de la Force. Il a sous ses ordres une ou plusieurs brigades prévôtales, en fonction des besoins sur le territoire, chacune d’un effectif minimal de trois personnels.

Si ces brigades prennent en compte le contentieux de masse, et traitent les problèmes du quotidien, la SRP peut projeter des enquêteurs en soutien dès lors qu’un fait revêt une sensibilité particulière, ou dépasse les compétences techniques des primo-intervenants. Particularité de la gendarmerie prévôtale, elle n’est pas une police militaire au sens commun du terme. En effet, les prévôts, recrutés parmi des gendarmes départementaux disposant d’une bonne expérience d’officiers de police judiciaire, sont formés et projetés sur les théâtres d’opérations pour des mandats de durée limitée. Ils retournent ensuite au sein de leurs unités.

Une préparation rustique

Depuis 2021, le CGP forme ainsi 200 prévôts par an, officiers et sous-officiers, contre 120 auparavant. En effet, à la suite de l’agression de l’Ukraine par la Russie, et dans l’hypothèse d’un engagement majeur des armées françaises, le volume a été revu à la hausse pour garantir la montée en puissance d’un vivier correspondant aux besoins.

Les prévôts suivent un stage de perfectionnement complet de deux semaines au camp militaire de Beynes, dans les Yvelines. Rustique, immersif, de qualité, il vise à revenir sur les fondamentaux de la militarité. L’objectif est à la fois d’acquérir une bonne compréhension de la culture et du fonctionnement des armées, tout en maîtrisant les particularismes de la procédure pénale militaire, tout ce qui est en lien avec les « affaires prévôtales » et pouvoir accompagner les armées sans être un fardeau pour elles. Le niveau d’engagement, de compétences et de rusticité ciblé pour cette formation est celui du théâtre du Sahel. Cette préparation technique permet aux prévôts de s’agréger immédiatement et efficacement aux dispositifs déployés sur les théâtres, dans un contexte souvent incertain et dégradé.

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