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  • Par Antoine Faure
  • Publié le 14 septembre 2023
Gendarme et policier allemand contrôlent un véhicule dont on ne voit que le toit.
© GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE

Depuis sa naissance, en 2019, l’unité opérationnelle franco- allemande a prouvé à maintes reprises son efficacité, que ce soit lors de la sécurisation des événements de grande ampleur ou à l’occasion de missions de sécurité du quotidien de part et d’autre du Rhin. Un dispositif pionnier, qui ne demande qu’à être décliné dans d’autres espaces frontaliers !

Il n’avait pas fallu attendre longtemps pour que la toute jeune Unité opérationnelle franco-allemande (UOFA) montre son utilité. En cette fin de mois d’août 2019, le sommet du G7 se tient à Biarritz, sous haute surveillance. Quelques mois après sa création, et après avoir participé à la sécurisation de deux étapes du Tour de France, l’UOFA est de nouveau déployée sur le terrain.

« Cinq jours avant le sommet, à la frontière franco-espagnole, nous avons contrôlé d’initiative un véhicule immatriculé en Allemagne, qui ne l’avait pas encore été, peut-être par manque de compétences linguistiques, se souvient le lieutenant Bertrand Loubette, chef de détachement français de l’UOFA. Nous avons pu échanger immédiatement avec la police fédérale allemande, qui nous a indiqué que les trois individus à bord étaient fichés en Allemagne pour des exactions com- mises lors du sommet du G20, à Hambourg, en juillet 2017, notamment des violences contre les forces de l’ordre. Nous avons rebouclé ces informations avec le Centre de coopération policière et douanière (CCPD), ce qui nous a alors fourni le cadre juridique permettant la fouille du véhicule et la découverte d’un véritable arsenal de black bloc. Ils avaient réussi à passer sous les radars. » Cet épisode reflète parfaitement le bénéfice pratique apporté par l’UOFA : fournir un appui opérationnel aux unités de gendarmerie en France et de la police fédérale en Allemagne, ayant à remplir des missions impliquant des ressortissants des deux pays. Outre les connaissances linguistiques, cette unité a développé une véritable technicité procédurale, en maîtrisant les législations applicables à chaque État.

Première concrétisation du traité d’Aix-la- Chapelle de 2019, l’UOFA a pour fondement juridique la signature d’un arrangement administratif entre les ministres de l’Intérieur français et allemand. Ce texte prévoyant les modalités d’engagement de l’UOFA s’appuie sur le large éventail de dispositions permises en matière de coopération policière par l’Union européenne (via le traité de Prüm notamment).

Sécuriser les événements de grande ampleur et les sommets internationaux

L’UOFA, composée à parité de gendarmes français et de policiers fédéraux allemands, a su se rendre incontournable au sein des dispositifs de sécurisation des événements sportifs et culturels ou lors des sommets internationaux. Les passants, supporters et touristes, ont pris l’habitude de croiser ces patrouilles mixtes, revêtues des deux uniformes, sur le bord des routes, à l’occasion des étapes du Tour de France, autour des stades, comme récemment au Parc des Princes et au stade de Francfort, pour les matchs de football PSG / Bayern Munich et Eintracht Francfort / Olympique de Marseille, ou encore lors de la fête de la bière de Munich, en octobre 2022.

L’UOFA peut être engagée directement par un échelon territorial de commandement de la gendarmerie ou de la police fédérale allemande, « mais il arrive souvent que nous proposions nos services aux commandants de groupement, qui ne pensent pas encore forcément à nous solliciter, complète le lieutenant Loubette. Nous pouvons aussi intervenir en renfort des Dispositifs estivaux de protection des populations (DEPP), ou dans les situations de crise, comme les inondations dans les Länder de Rhénanie du Nord-Westphalie et de Rhénanie-Palatinat en 2021. L’idée, c’est d’être pertinent et d’apporter une réelle plus-value. » Adaptable et sécable en fonction de la demande, le format d’engagement de l’UOFA peut aller du binôme jusqu’à l’unité complète, avec dix gendarmes et dix policiers fédéraux allemands, sur les grands événements.

Des missions de sécurité du quotidien

Parallèlement à ces missions, l’UOFA a développé une activité croissante de sécurité de proximité, principalement ancrée au sein de la Région de gendarmerie Grand Est (RGGE). « Deux à trois fois par mois, l’UOFA est engagée pour des opérations de contrôle aux côtés du GLCF (Groupe Local de Contrôle des Flux) de Strasbourg, unité de gendarmerie rattachée aux pelotons d’autoroute, principalement sur deux types de mission : un volet sécurité des transports, avec des patrouilles conjointes dans les gares et les TER transfrontaliers, et un volet contrôle des flux routiers à proximité de la frontière franco-allemande, notamment à la barrière de péage de Schwindratzheim », décrit le lieutenant-colonel Christophe Richard, chef du bureau coopération transfrontalière de la RGGE.

Tous les quatre mois, des missions de contrôle des mobilités sont également déployées avec le soutien d’un élément héliporté. « L’hélicoptère de la police fédérale allemande permet de transporter rapidement les binômes de l’UOFA et les douaniers allemands, en faisant des sauts de puce de part et d’autre du Rhin, de la frontière franco-suisse jusqu’à la frontière verte, au nord de l’Alsace, poursuit le lieutenant-colonel Richard. Sur les points de contrôle, ils retrouvent, côté français, des gendarmes des brigades locales, des Pelotons de surveillance et d’intervention de gendarmerie (PSIG) et des deux Escadrons départementaux de sécurité routière (EDSR) du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, et, côté allemand, des policiers fédéraux. Un hélicoptère de la Section aérienne de gendarmerie (SAG) de Metz ou de Colmar survole également les points de contrôle pour déceler les véhicules qui tenteraient de les éviter. »

  • Un hélicoptère de la police fédérale allemande avant le décollage pour projeter des policiers allemands et des gendarmes sur des points de contrôle routier.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Un hélicoptère de la police fédérale allemande décolle pour projeter des policiers et des gendarmes sur des points de contrpole routier.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Patrouille de l'Unité opérationnelle franco-allemande avec des gendarmes et des policiers allemands dans la gare de Strasbourg.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Contrôle d'un camion par l'Unité opérationnelle franco-allemande. Au premier plan un gendarme de l'unité. Sur son bras, la rondache de l'unité. Au second plan, le camion et sa cargaison.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Véhicule de l'Unité opérationnelle franco-allemande, derrière une voiture de la police allemande.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Patrouille d'un binome de l'Unité opérationnelle franco-allemande dans un train transfrontalier.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Patrouille de l'Unité opérationnelle franco-allemande avec des gendarmes et des policiers allemands dans la gare de Strasbourg.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Un hélicoptère de la police fédérale allemande avant le décollage pour projeter des policiers allemands et des gendarmes sur des points de contrôle routier.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Un hélicoptère de la police fédérale allemande décolle pour projeter des policiers et des gendarmes sur des points de contrpole routier.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Patrouille de l'Unité opérationnelle franco-allemande avec des gendarmes et des policiers allemands dans la gare de Strasbourg.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Contrôle d'un camion par l'Unité opérationnelle franco-allemande. Au premier plan un gendarme de l'unité. Sur son bras, la rondache de l'unité. Au second plan, le camion et sa cargaison.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Véhicule de l'Unité opérationnelle franco-allemande, derrière une voiture de la police allemande.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Patrouille d'un binome de l'Unité opérationnelle franco-allemande dans un train transfrontalier.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE
  • Patrouille de l'Unité opérationnelle franco-allemande avec des gendarmes et des policiers allemands dans la gare de Strasbourg.
    © GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE

L’UOFA est actuellement composée de vingt gendarmes et de vingt policiers fédéraux allemands. « Et nous serons bientôt 30 gendarmes, ajoute le lieutenant Loubette. Ce sont principalement des militaires de brigades territoriales, des enquêteurs d’unités de recherches, des motocyclistes, des militaires de PSIG ou d’unités fluviales. Le pré-requis est d’être germanophone. Pas forcément bilingue, mais il faut être capable de suivre une conversation en allemand et d’interagir. Entre nous, on s’interdit de parler anglais et on s’adresse aux policiers allemands dans leur langue. J’aimerais que l’unité se féminise encore davantage, pour répondre aux besoins rencontrés sur le terrain, et ainsi optimiser la prise en charge des femmes, qu’elles soient mises en cause ou victimes. » Les candidats retenus suivent une formation mixte, répartie sur dix semaines (cinq en France et cinq en Allemagne), visant à connaître les équipements et les procédures de l’autre pays, notamment en matière d’ordre public.

De nouvelles perspectives ?

« L’UOFA est la concrétisation d’une volonté commune de travailler de part et d’autre de la frontière, sur des logiques de bassin de vie, souligne le lieutenant-colonel Aurélien Baud, chargé de mission du Pôle affaires européennes et internationales (PAEI), au cabinet du Directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN). Il s’agit de dépasser la simple juxtaposition de personnels qui ne se connaissent pas, pour rechercher une véritable synergie et le partage de technicités, créer une équipe où chacun apporte des compétences complémentaires. Cela fonctionne très bien et les différences de formation, de statut ou de langue se transforment ici en atouts. Pour les échelons de commandement, l’UOFA offre des leviers d’action modulables très intéressants. Pour les gendarmes français et les policiers allemands, c’est aussi une aventure humaine enrichissante. Enfin, et surtout, pour la population, c’est l’incarnation concrète et visible sur le terrain de la coopération européenne en matière de sécurité. Cette unité est désormais bien installée dans le paysage. Elle constitue un outil pionnier, aujourd’hui mis en avant tant par la Bundespolizei que par la gendarmerie, au niveau national comme auprès des institutions européennes. »

Dans le cadre de la Présidence française de l’Union européenne (PFUE), la France a porté, en juin 2022, une recommandation du Conseil de l’U.E. relative à la coopération opérationnelle des services répressifs visant à développer les bonnes pratiques, notamment en zone frontalière. « L’UOFA est l’une de ces réalisations qui concourent pleinement à la dynamique de développement d’une culture européenne commune des forces de sécurité intérieure », précise le LCL Baud.

Cette belle réussite ouvre la voie à d’autres partenariats à nos frontières. Des projets de nouvelles unités opérationnelles binationales sont ainsi étudiés avec nos différents voisins.
« Ces perspectives constructives nous amènent à échanger et à réaliser des évaluations conjointes avec l’Italie, l’Espagne ou encore la Belgique. Dans ce contexte, les retours d’expérience et les conseils apportés par l’UOFA s’avèrent particulièrement précieux », détaille le LCL Baud. L’Unité opérationnelle franco-italienne (UOFI) est même spécifiquement mentionnée dans le Traité de coopération renforcée entre la France et l’Italie, dit du « Quirinal », signé en novembre 2021.

L’UOFA officiellement baptisée

Le 14 mars 2023, l’Unité opérationnelle franco-allemande a officiellement été baptisée à l’occasion d’une prise d’armes au sein de la caserne de gendarmerie de Sarreguemines, présidée par le général de corps d’armée Stéphane Ottavi, commandant la région de gendarmerie du Grand Est et la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Est, et par Frank Vornholt, directeur adjoint des forces mobiles de la police fédérale allemande, en présence de Madame Schmitt-Falckenberg, directrice générale de la Bundespolizei. L’UOFA s’est vu attribuer le nom d’« Unité Daniel Nivel » et les deux chefs de détachement français et allemand ont reçu leur fanion. L’adjudant-chef Daniel Nivel, gendarme mobile agressé par des hooligans allemands lors de la coupe du Monde de football, en 1998, a tenu à être présent lors de cette cérémonie, aux côtés des personnels de l’unité, qu’il a accepté de parrainer : un symbole fort de la volonté commune de la France et de l’Allemagne d’agir ensemble pour lutter contre les violences et la criminalité.

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