Coopération bilatérale : renforcer la sécurité intérieure

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 15 septembre 2023
Image d'illustration de coopération internationale.
© DCSD

La gendarmerie nationale joue un rôle clé dans la coconstruction et la mise en place des actions de coopération bilatérale menées par la France, par sa forte présence parmi les coopérants militaires techniques, et par sa participation active au sein de la Direction de la coopération internationale de sécurité (DCIS), commune à la police et à la gendarmerie nationales, et de la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

Bien que la coopération multilatérale prenne de plus en plus d’importance dans le paysage des relations internationales, du fait notamment de la montée en puissance de l’Union européenne sur les questions de défense et de sécurité, la coopération bilatérale entre la France et un pays partenaire, qu’elle soit technique, opérationnelle ou structurelle, demeure un modèle pertinent et efficace.

Forme élémentaire des relations diplomatiques, depuis l’envoi au XVIIe siècle par les monarques européens de représentants dans les pays avec lesquels ils souhaitaient nouer des liens durables, la coopération bilatérale n’est pas devenue pour autant anachronique ou obsolète, et a encore de beaux jours devant elle, étant in fine parfaitement complémentaire de la coopération multilatérale.

Une coopération technique et opérationnelle

Aux confins d’enjeux multiples – stratégiques, politiques et économiques –, la coopération bilatérale mobilise logiquement de multiples acteurs. Dans ses locaux, situés à Nanterre, la Direction de la coopération internationale de sécurité (DCIS), créée en août 2021 sur les bases de la Direction de la coopération internationale (DCI), et commune à la police et à la gendarmerie, est l’un d’eux. Elle participe à l’élaboration et à la mise en œuvre de la stratégie européenne et internationale du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer (MIOM), qui se décline suivant trois axes de coopération : institutionnelle, au sein de l’Union européenne essentiellement ; opérationnelle, avec des échanges d’information visant à alimenter les procédures judiciaires ; et technique, avec la dispense de formations et l’échange de bonnes pratiques, soit directement par l’envoi de missions d’experts dans les pays partenaires, soit dans le cadre de l’accueil de délégations en France (en 2022, 1 900 actions ont ainsi été réalisées).

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« Pour élaborer les programmes de coopération technique, la DCIS s’appuie sur le réseau des 76 Services de sécurité intérieure (SSI), qui couvrent 154 pays sur les cinq continents et sont dirigés par des Attachés de sécurité intérieure (ASI), dont environ un tiers sont des officiers de gendarmerie (voir pages 40-43), décrit le colonel Jérôme Delhez, sous-directeur adjoint Monde à la DCIS. L’ASI, qui est un conseiller de l’ambassadeur pour les questions de sécurité de la compétence du MIOM, et qui est un interlocuteur des forces de sécurité intérieure du ou des pays sur lesquels il est compétent, recueille ou identifie lui-même des besoins, et les analyse au regard des priorités du ministère : lutte contre le trafic de stupéfiants, les atteintes à l’environnement et à la santé publique, l’immigration irrégulière, la cybercriminalité et le terrorisme. Avec pour objectif, au-delà de renforcer des liens, de diffuser des bonnes pratiques - sans les imposer -, pour contribuer à l’amélioration des niveaux techniques, des modes d’action, voire de l’organisation des forces étrangères, et ce, afin de mieux lutter contre un phénomène qui n’est pas sans impact sur notre territoire national. » Les projets de programmation technique des ASI sont transmis pour étude à la DCIS, et parallèlement à la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE), qui les finance en grande partie.

« La DCIS est l’un des acteurs de la coopération bilatérale, confirme le colonel Delhez. Nous ne faisons rien seuls. La mise en place d’actions de coopération nécessite beaucoup de dialogue et de nombreuses consultations, pour comprendre les priorités et tenir compte des contraintes des uns et des autres. Nous avons des contacts quotidiens avec la Direction des affaires européennes et internationales (DAEI) du MIOM, dirigée par un préfet, qui compte plusieurs gendarmes en son sein, et qui constitue un interlocuteur important pour savoir si, au regard de l’actualité et de la stratégie du ministère, le feu est vert, orange ou rouge pour travailler avec un pays qui nous en fait la demande. De même, s’agissant de la coopération propre à la gendarmerie nationale, nous échangeons très fréquemment avec nos camarades du Pôle affaires européennes et internationales (PAEI), au sein du cabinet du directeur général de la gendarmerie, afin de répondre présent sur les priorités fixées à l’international. Il faut avoir à l’esprit que la coopération bilatérale est un domaine très concurrentiel, avec de nombreux « compétiteurs » étrangers dans un nombre croissant de pays. Elle répond à des enjeux très importants, de sécurité, d’influence, mais aussi économiques, puisqu’elle peut s’accompagner de programmes de soutien à l’export au profit des entreprises françaises. Il faut donc impérativement cibler les actions à mener, en tenant compte de la géopolitique. C’est un travail complexe, jamais figé, et pour lequel les efforts s’inscrivent dans la durée. »

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Une coopération structurelle

Dans leurs locaux du « Quai d’Orsay », à Paris, plus de soixante agents collaborent au sein de la DCSD, créée en 2009. Ils sont militaires, policiers, diplomates ou experts en protection civile. Parmi eux, quatre gendarmes : le lieutenant-colonel Gilles Schwoerer, qui s’occupe plus particulièrement de la problématique cyber, la lieutenante-colonelle Marie Mottin, en charge des partenariats européens, le lieutenant-colonel Ludovic Serrier, en charge de la zone Afrique centrale, et le général Jean-Luc Lefour, qui occupe les fonctions de conseiller sécurité intérieure auprès du directeur de la DSCD, le général de corps d’armée de l’armée de Terre Régis Colcombet.

« Je porte les intérêts du MIOM au sein de la DSCD, résume le général Lefour. Nous travaillons sur les mêmes thématiques que la DCIS, mais à un autre niveau, avec un objectif différent. Le nôtre consiste à mettre en œuvre la politique du président de la République. Il s’agit donc d’une coopération structurelle, qui peut bien sûr avoir des retombées opérationnelles, mais qui s’inscrit avant tout dans le cadre de cette volonté politique. C’est donc très important que la gendarmerie soit présente au sein de la DCSD, en tant qu’acteur de la volonté politique de la France à l’international. » Sans une relation politique de qualité, la DCSD ne mènera donc pas d’action de coopération. La France développe ainsi actuellement de nombreux projets avec, par exemple, le Rwanda ou les pays des Balkans, mais plus aucun avec le Mali, pays qu’elle a quitté en quelques semaines, après 40 années de coopération.

Complémentaire de la coopération technique, pilotée par la DCIS, la coopération structurelle vise au renforcement capacitaire, humain comme logistique, des armées ou forces de sécurité intérieure des pays partenaires, à moyen et long termes. « Il faut deux ans, au minimum, pour monter un projet, et les coopérants sont engagés pour une durée de deux à quatre ans », confirme le général Lefour. La DCSD utilise trois modalités principales de coopération : le conseil de haut niveau, la fourniture d’équipements et la formation, en France et à l’étranger, dans les Écoles nationales à vocation régionale (ENVR), développées dans les pays partenaires, qui fournissent généralement les terrains et les bâtiments. Environ 30 % des places sont réservées au pays hôte, le reste pour les autres pays de la région concernée.

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Le Centre de développement des capacités cyber dans les Balkans occidentaux (C3BO) est un bon exemple de cette coopération structurelle, s’inscrivant pleinement dans le cadre des priorités politiques de la France, en l’occurrence la lutte contre la cybercriminalité, et géographiques, avec la volonté de s’engager durablement dans les Balkans occidentaux (voir pages 56-57). Ce projet d’école cyber, monté avec les autorités slovènes, sera situé au Monténégro, qui met à disposition les locaux, et aura une vocation régionale sur les six pays des Balkans : Albanie, Serbie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro, Kosovo et Macédoine. Pour mener à bien les actions de coopération, la DCIS et la DCSD s’appuient sur un même réseau de 312 coopérants militaires techniques, parmi lesquels 42 gendarmes, et experts techniques internationaux, présents dans plus de 50 pays. « En liaison étroite avec les SSI, ce sont les bras armés indispensables à notre action, complète le colonel Delhez. En règle générale, les besoins des SSI remontent pendant l’été, intégrant les propositions des coopérants ou des experts techniques. Puis les discussions commencent à l’automne pour définir les actions qui seront menées l’année suivante. Une fois qu’une action est validée et financée, on sollicite notamment les Directions générales de la gendarmerie nationale (DGGN), de la police nationale (DGPN), et de la sécurité civile et de la gestion de crise (DGSCGC), pour savoir quels services peuvent nous accompagner. »

Ainsi, de Nanterre à Paris, en passant par Issy-les-Moulineaux, et sur tous les continents, les militaires de la gendarmerie, aux côtés de ceux des armées de Terre, de l’Air et de l’Espace, de la Marine nationale, mais aussi de policiers, d’experts de la protection civile, de douaniers, de magistrats ou de diplomates, œuvrent à la co-construction et à la mise en place des actions de coopération bilatérale, qui visent aussi à renforcer notre sécurité intérieure.

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