Au Luxembourg, la coopération se met en quatre

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 14 septembre 2023
Rondache du Centre de coopération policière et douanière (CCPD) du Luxembourg avec les drapeaux belge, français, allemand et luxembourgeois sur fond de drapeau européen.
© GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE

Une quarantaine de personnels, français, allemands, belges et luxembourgeois, collaborent au sein du Centre de coopération policière et douanière (CCPD), situé à Luxembourg-ville. Parmi eux, cinq gendarmes, dont le coordonnateur du centre.

L’action de la gendarmerie nationale à l’international commence dès le franchissement des limites de l’Hexagone. À Luxembourg-ville, à une quinzaine de kilomètres de la frontière avec la France, dans l’open space opérationnel du Centre de coopération policière et douanière (CCPD), quatre petits drapeaux sont posés sur les bureaux : France, Allemagne, Luxembourg et Belgique. On jongle ici allègrement entre la langue de Molière et celle de Goethe, avec l’appui du langage informatique.

Le seul CCPD quadripartite d’Europe

Le CCPD du Luxembourg a officiellement vu le jour en 2008. « À l’origine, il y avait la volonté de la France et du Luxembourg de créer un CCPD, dans le cadre d’un accord bilatéral signé le 15 octobre 2001, explique le lieutenant-colonel Laurent Sadler, coordonnateur du centre, qui a pris son poste en 2018, après avoir commandé la Compagnie de gendarmerie départementale (CGD) de Sarreguemines. Dans le même temps, l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg avaient pris la décision de créer un bureau de coopération policière, sans douaniers. Ces deux entités ont été amenées à travailler ensemble régulièrement à partir de 2003, et il a donc été décidé de créer un CCPD regroupant les quatre pays, qui a vu le jour officiellement avec la signature d’un accord, le 24 octobre 2008. Il s’agit du seul CCPD quadripartite d’Europe. » Une quarantaine de personnels collaborent au sein du CCPD du Luxembourg : des agents de la gendarmerie et de la police nationales, des polices des Länder de Sarre et de Rhénanie-Palatinat, des polices fédérales allemande et belge, de la police Grand-Ducale, et des douanes des quatre pays. Parmi les seize Français, on compte cinq gendarmes.

Salle des opérations du Centre de coopération policière et douanière (CCPD), situé à Luxembourg-ville.
© GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE

Droits de poursuite et d’observation

La compétence du CCPD du Luxembourg est établie sur les départements et Länder limitrophes, mais peut aussi être nationale sous certaines conditions. « Nous pouvons être saisis par des policiers ou des gendarmes des quatre pays, aussi bien par Munich que par Marseille », confirme le LCL Sadler. À l’instar des autres centres, ses missions sont le recueil, l’analyse et l’échange d’informations nécessaires à la coopération policière et douanière. Les agents du CCPD n’ont pas vocation à diligenter d’enquêtes, ni à procéder aux investigations. Néanmoins, leur apport est essentiel à la résolution des procédures administratives et judiciaires. Les agents assurent ainsi une fonction de conseil et de soutien non opérationnel, à l’occasion de l’exercice des droits de poursuite et d’observation transfrontalières.

Le droit de poursuite permet aux forces de l’ordre d’un pays de poursuivre dans un autre pays l’auteur de certaines infractions, commises en flagrant délit en zone transfrontalière. Les autorités du pays de destination procédant à l’interpellation. Seule exception : l’Allemagne, où les forces de l’ordre françaises ont l’autorisation d’interpeller.

Le droit d’observation permet à un enquêteur, dans le cadre d’une enquête en cours et sur décision d’un magistrat, de franchir la frontière en tenue civile, armé et en véhicule banalisé. Le CCPD s’assure de la bonne transmission de ces Observations transfrontalières ordinaires (OTO) ou urgentes (OTU) au Service central de coopération policière (SCCOPOL) du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer. Toutes les observations effectuées dans les autres pays peuvent être ajoutées à la procédure.

Le CCPD peut notamment être sollicité pour identifier le détenteur d’un véhicule ou le titulaire d’une ligne téléphonique, vérifier un permis de conduire ou une identité, rechercher une adresse ou des antécédents judiciaires. « Un enquêteur peut vérifier les antécédents d’un gardé à vue dans les trois autres pays, décrit le coordonnateur du centre. Un mis en cause peut ainsi être condamné plus sévèrement au regard d’infractions commises dans d’autres pays, quand bien même il serait primo-délinquant dans le pays d’arrestation, puisque la récidive européenne existe désormais. » Le CCPD assure également des missions de prévention des menaces et des troubles à l’ordre public et de détection des nouveaux modes opératoires.

Le lieutenant-colonel Laurent Sadler, coordonnateur du Centre de coopération policière et douanière (CCPD), situé à Luxembourg-ville.

Le lieutenant-colonel Laurent Sadler, coordonnateur du Centre de coopération policière et douanière (CCPD), situé à Luxembourg-ville.

© GEND/SIRPA /GND B. LAPOINTE

Avec l’aide de LUCA

Plus de 15 000 renseignements ont été transmis par le CCPD du Luxembourg en 2022, avec un délai de réponse très rapide, de moins de quatre heures, souvent moins d’une heure. « C’est la valeur ajoutée d’un CCPD à quatre pays, souligne le LCL Sadler. Nous sommes une unité de soutien aux unités de terrain, qui peuvent nous consulter directement, sans formalisme, par mail ou par téléphone. Les compétences linguistiques des personnels et leur connaissance de la géographie locale (les cinq gendarmes sont mosellans, NDLR) constituent également une vraie plus-value. Enfin, la retranscription des éléments fournis, qu’il s’agisse de renseignements simples ou plus complexes, est exploitable en procédure, quel que soit le pays. »

Pour faciliter leur travail en salle opérationnelle, les personnels du CCPD peuvent compter sur LUCA. « Nous sommes sollicités dans des langues différentes, par des canaux différents. Il fallait un outil pour normaliser ces demandes, afin qu’elles puissent être traitées par deux ou trois pays le cas échéant. La police Grand-Ducale a donc développé LUCA, un logiciel intuitif qui nous permet de travailler à plusieurs sur un même dossier, avec un historique complet, de procéder à des recoupements et de stocker des données pendant trois ans. » Vérification in situ, avec la requête d’un enquêteur de Drancy, en Seine-Saint-Denis, qui souhaite savoir si un suspect réside en Belgique. La demande est transmise via le logiciel au policier belge de permanence, qui apporte une réponse en moins d’un quart d’heure. CCPD rime bien avec efficacité !

A noter

Le premier centre de coopération policière et douanière a ouvert ses portes en 1999, à Offenburg, en Allemagne, avant d’être transféré dans le port de Kehl, en 2002. On compte aujourd’hui neuf autres CCPD : un avec la Belgique, un avec le Luxembourg, un avec la Suisse, deux avec l’Italie et quatre avec l’Espagne. Cinq sont coordonnés par des commissaires de police, quatre par des officiers de gendarmerie, et un, celui de Genève, par un inspecteur des douanes.

 

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