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L'antenne médicale spécialisée de Satory : une équipe de choc au service du GIGN

Auteur : le chef d'escadron Sophie Bernard - publié le
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© GIGN

Si la première Antenne médicale spécialisée (AMS) de Satory a vocation à s’occuper des personnels du groupement de gendarmerie départementale des Yvelines ainsi que de ceux du groupement blindé de gendarmerie mobile, elle a pour particularité d’être prioritairement dédiée aux gendarmes du GIGN. Un emploi qui exige un haut niveau de compétences et une très grande adaptabilité de la part des soignants.

Médecins et infirmiers du Service de santé des armées (SSA), mais aussi secrétaires ayant le statut de gendarmes ou de civils, ils sont en tout dix-sept personnels à assurer les missions dites « classiques » d’une antenne médicale, mais aussi des missions qui sortent quelque peu de l’ordinaire… « Comme tout gendarme, les militaires du GIGN peuvent avoir besoin de soins, de traitement en cas de maladie, ou d’une validation de leurs aptitudes, d’autant plus dans le cadre de certaines spécialités, comme les plongeurs ou les chuteurs opérationnels », explique Clément, le médecin chef. Jusqu’ici rien de très compliqué pour l’équipe médicale. Mais le « groupe » ne pourrait constituer cette unité d’élite sans s’adonner à un minimum d’activités pouvant présenter des risques. « Un infirmier est systématiquement dépêché sur le pré-stage dans le cadre des tests d’entrée au GIGN, ou sur certains entraînements, comme les exercices de parachutisme. » Une première fonction de soutien déplacé qui nécessite la conservation d’une ressource constante en personnels et en véhicules.

À la fois soignants et militaires opérationnels

Mais ce qui fait la spécificité de cette antenne médicale spécialisée, c’est avant tout son engagement aux côtés du GIGN dans les missions opérationnelles. « Là où il y a la force intervention, il y aura nécessairement un personnel du SSA ! » Et pas n’importe lequel, puisqu’il existe des pré-requis pour intégrer l’antenne. « Il faut avoir au minimum une expérience d’urgentiste, être déjà parti en OPEX comme médecin de guerre et posséder son brevet de parachutiste. » À cela viennent s’ajouter d’autres formations internes, comme le stage en intervention spécialisée de huit semaines, la formation aux techniques d’aérocordage, de franchissement opérationnel, de tir ou encore de conduite en convoi, afin de « pouvoir suivre les membres du Groupe sans jamais gêner leur action. »

À l’image des membres de la force intervention, les équipes médicales restent d’alerte via deux binômes (médecin et infirmier) prêts à partir avec le détachement d’intervention d’urgence (départ sous 30 minutes) ou judiciaire (départ sous 2 heures). Grâce aux lots médicaux placés dans leurs véhicules d’alerte, ils doivent pouvoir aussi bien gérer une urgence absolue que prendre en charge de nombreuses victimes. « Ce véhicule est encore mieux équipé que le SMUR, puisqu’il permet de faire de la réanimation intensive de patients traumatisés, avec des moyens de pointe comme le plasma lyophilisé, innovation propre aux armées. » Si les soignants de la 1re  AMS sont dédiés au soutien des gendarmes, cette prise en charge vaut bien évidemment pour tous les malades et les blessés sans distinction (militaires, civils, adversaires), le seul objectif restant de préserver la vie humaine. « Les soins les plus fréquents ne sont pas les plus graves. Ils sont principalement liés à des chutes ou à des blessures causées par des éclats de verre par exemple. Mais le plus grave peut également se produire, comme l’année dernière où nous avons eu trois blessés par balle et un mort. »

Au plus près de l’action

Pour opérer les bons gestes médicaux le plus rapidement possible, le binôme est intégré à la colonne d’assaut, au même titre que d’autres spécialistes, comme le dépiégeur ou le maître de chien. « Nous sommes alors équipés de tenues tactiques, de protections balistiques, de matériel de transmission et d’un armement d’auto-protection nous permettant de répliquer dans le cadre de la légitime défense. Durant l’assaut, nous sommes aux ordres du chef tactique. Nous intervenons à son ordre, sous le feu s’il le faut, toujours avec un appui. » Dans le cadre de l’opération, le médecin pourra aussi utilement conseiller le chef de détachement sur le plan médical, en planification et en conduite.

Les soignants jouent également un rôle important en cas de crise multivictimes, comme lors d’un attentat terroriste ; leur positionnement leur permettant de faire le lien entre les forces d’intervention et les secours civils. « L’organisation des secours est très spécifique dans ces cas-là, avec la mise en place d’un zonage. Nos équipes médicales sont les seules à pouvoir accéder à la zone d’exclusion (appelée zone rouge car étant la plus proche du lieu d’intervention, NDLR). Seuls quelques secouristes équipés de gilets pare-balles pourraient être admis en zone orange pour nous aider à extraire des victimes, tandis que le reste des secours opérera en zone verte. En tant que responsable des deux premières zones, le médecin du GIGN s’avère être le principal interlocuteur du commandement et du directeur des secours médicaux gérant la troisième zone. Il leur transmet des bilans réguliers et la coordination se fait en général sans difficulté, car nous avons tous le même objectif : sauver les victimes qui peuvent encore l’être ! » Au-delà des services de secours, les soignants du GIGN entretiennent également un partenariat avec leurs homologues des forces d’intervention, avec lesquels ils sont régulièrement amenés à travailler. « Une bonne connaissance mutuelle est nécessaire pour une parfaite synergie et une coopération optimale des équipes médicales lors d’une intervention commune, notamment en contre-terrorisme maritime avec les équipes des commandos marine. »

Toujours anticiper et se former

Les soignants n’hésitent pas non plus à transmettre un maximum de leurs connaissances aux membres du GIGN, afin que ces derniers puissent prodiguer des soins par délégation, sous la supervision du médecin, en cas de situation exceptionnelle. « Tous les personnels ont le certificat de prévention et secours civiques de niveau 1 et ont reçu la formation secourisme en équipe de niveau 1 et/ou 2. Nous en formons également certains au sauvetage au combat de deuxième niveau, avec l’enseignement de techniques plus poussées, comme la pose d’une perfusion ou une trachéotomie. »

Si l’équipe médicale vient le plus souvent en soutien à la force intervention, elle peut aussi agir aux côtés de la force sécurité protection opérant principalement à l’étranger. À cette fin, il convient de pouvoir se projeter rapidement et discrètement, avec un déploiement par moyens civils ; l’emploi du GIGN supposant des tensions accrues et la protection de hautes personnalités. Afin d’anticiper ce type de mission, les personnels de l’antenne médicale sont régulièrement envoyés dans les pays où le GIGN est engagé, comme en Ukraine, « afin d’y réaliser une expertise des capacités locales de soutien sanitaire et un audit santé. » Ces audits, ainsi que l’ensemble des missions opérationnelles réalisées, font l’objet d’un compte rendu systématique, permettant d’améliorer encore les pratiques médicales dans le cadre de RETEX.

Enfin, à l’image des membres du GIGN, dans les rares périodes d’accalmie, les soignants ne cessent de se former, en assurant notamment des gardes de médecine d’urgence hospitalière et en participant à des séminaires, afin de maintenir à jour leurs connaissances. Des passionnés qui n’hésitent donc pas à se remettre régulièrement en question et à apprendre toujours davantage pour, tout comme leurs camarades du GIGN, être au service de l’humain..