Madagascar : le service de sécurité intérieure français au cœur de la gestion de crise après les épisodes cycloniques
- Par le commandant Céline Morin
- Publié le 27 février 2022
Après le passage du cyclone Batsirai sur l'île de Madagascar, la France a notamment projeté sur place une équipe de 60 secouristes de la sécurité civile, afin de venir en aide à la population. Le service de sécurité intérieure, dirigé par le colonel Bertrand Thouvenot, attaché de sécurité intérieure, a piloté cette manœuvre d'aide humanitaire et technique.
Depuis le début de cette année, l'île de Madagascar a connu plusieurs épisodes météorologiques de forte intensité. Après Ana, une première tempête tropicale le 22 janvier, qui avait fait 55 morts et de nombreux dégâts sur la ville de Tananarive, le cyclone Batsirai balaie l'île les 5 et 7 février. Des pluies diluviennes, accompagnées de rafales de vent jusqu’à 235 km/h s'abattent d'abord sur la côte Est, détruisant à près de 90 % la ville côtière de Mananjary, avant de se déplacer à l'intérieur des terres, provoquant de nombreuses crues et inondations destructrices. Le bilan humain est lourd : plus de 120 morts et près de 125 000 personnes sinistrées, dont une grande partie a dû être déplacée. Le bilan matériel est à l'avenant de la violence du phénomène.
Très vite, de nombreuses Organisations non gouvernementales (ONG), des agences de l’Organisation des Nations unies (ONU), ainsi que l'Union européenne déploient des moyens pour venir en aide aux victimes, au côté des institutions et des ONG malgaches. Sur place, les moyens humains et matériels sont coordonnés par le Bureau national de gestion des risques et des catastrophes (BNGRG).
Projection de 60 secouristes de la Sécurité civile
« Assez rapidement après le passage de Batsirai, la France a proposé aux autorités malgaches l'envoi d'une aide, sous condition qu'elles en expriment le besoin via le dispositif de l'Union européenne (U.E.). C'est ce qu'elles ont fait et la France a donc été désignée pour envoyer des secouristes, explique le colonel Bertrand Thouvenot, Attaché de sécurité intérieure (ASI) à Madagascar. C'est donc à compter de ce moment-là que l'ambassade et le Service de sécurité intérieure (SSI) sont entrés en action pour faire le lien entre les autorités françaises, notamment le Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC), l'ambassadeur, les autorités malgaches, c'est-à-dire les ministères des Affaires étrangères, de la Défense, plus particulièrement la gendarmerie, et de l'Intérieur, afin de faciliter la venue d'un détachement de 60 secouristes français. Nous avons notamment déterminé avec ces autorités quels étaient leurs besoins prioritaires, afin que les secouristes puissent emporter l'équipement adéquat. »
À ce moment-là, la principale inquiétude concerne l'accès de la population à l'eau potable, afin d'éviter la propagation de maladies via la consommation d'eau contaminée. La priorité pour l'équipe de secours est donc de se projeter avec un équipement de production d'eau potable.
Les 60 secouristes de l'Unité d'instruction et d'intervention de la Sécurité civile n° 1 (UIISC 1) de Nogent-le-Rotrou et leurs 26 tonnes de matériel arrivent à Tananarive le 9 février, sur un vol spécial affrété par Air Austral et en grande partie financé par l'Union européenne. Ils sont accueillis par l'ambassadeur de France à Madagascar, l'ambassadeur de la délégation de l'Union européenne, l'ASI, des membres du SSI, dont le coopérant protection civile, l’attaché de Défense, ainsi que deux représentants des autorités malgaches.
Le SSI, une « courroie de transmission »
« Il a ensuite fallu organiser leur transport par la route jusqu'à la ville de Tamatave, principal port du pays, où ils devaient prendre un bateau. Mais celui-ci s'est avéré inadapté. Il a donc fallu se réarticuler et trouver de nouveaux camions pour atteindre la zone sinistrée de Mananjary. Ce qui s'est avéré compliqué. Nous avons sollicité les FAZSOI (Forces Armées de la Zone Sud de l'Océan Indien) pour accélérer le déploiement grâce à leurs moyens aériens. Ces dernières ont été extrêmement réactives. Mais cela a donc pris un peu plus de temps avant que les secouristes ne soient opérationnels, poursuit l'officier. Il a aussi fallu trouver des hébergements, obtenir les bonnes autorisations de la part des autorités malgaches… »
Le SSI joue donc un rôle de « courroie de transmission », assurant la coordination entre les unités françaises et les autorités malgaches, en faisant usage de diplomatie et parfois de fermeté pour imposer son organisation de travail.
Si l'ensemble du SSI est mobilisé sous la houlette de l'ASI, le coopérant de la protection civile, lieutenant-colonel de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), est véritablement à la manœuvre dans la gestion de cette crise, qui s’inscrit pleinement dans son cœur de métier, accompagnant le détachement pour faciliter son transport, puis son installation sur le terrain.
Une fois à Mananjary, les secouristes français installent leur camp de vie et le site de production et de distribution d'eau potable, avec une capacité de 250 000 litres par jour.
« Avec l'ambassadeur, l'attaché de Défense et des personnels de l'ambassade et de l'U.E., nous nous sommes rendus sur place, les 17 et 18 février, pour aller voir les secouristes et leur installation. En bout de chaîne de purification, l'eau marron et boueuse puisée dans la rivière ressortait transparente et surtout potable. Mais en raison d'une méconnaissance du dispositif de distribution gratuit mis en place, ils n'ont produit que 45 000 litres d'eau par jour », déplore toutefois l'ASI.
22 février, le cyclone Emnaty s'abat sur Madagascar
Le 22 février, le cyclone Emnaty s'abat à son tour sur l'île. Les secouristes doivent alors rapidement démonter entièrement leur camp de vie ainsi que la chaîne de production d'eau, avant de se mettre eux-mêmes à l'abri des vents violents et des pluies diluviennes pendant près de 48 heures.
De retour sur le site une fois ce nouvel épisode passé, ils doivent remonter intégralement leurs installations pour se remettre au travail et venir en aide à la population.
« Sur le terrain, les autorités locales, gouverneurs, préfets et maires, ainsi que la population ont été ravis de voir arriver cette aide. Ils étaient vraiment dans une grande détresse. Les secouristes sont également intervenus dans des lycées et sur des bâtiments administratifs pour sécuriser des toitures, mais aussi pour déblayer des axes », conclut le colonel Thouvenot.
Une mission qui touchera prochainement à sa fin avec le retour probable de la mission début mars.
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