Les fibres textiles

  • Par Contributeur 172061
  • Publié le 05 mai 2017, mis à jour le 13 juin 2023

Scène de la vie ordinaire dans une résidence pavillonnaire : des véhicules de la gendarmerie sont stationnés devant une maison, une rubalise jaune délimite un périmètre où seuls les techniciens en identification criminelle (les TIC) évoluent à la recherche de tout indice permettant d'élucider le crime qui vient d'être commis... Le public est maintenant familiarisé avec les missions du TIC sur une scène d'infraction : recherche d'empreintes digitales, ADN, morpho-analyse des traces de sang... Mais l'est-il autant avec les fibres textiles ? Parce que c'est précisément ce que fait le TIC maintenant : retrouver des fibres textiles provenant des vêtements de l'auteur !

 

Un peu d'histoire

Ce n'est un secret pour personne : les vêtements font partie de notre quotidien. De tout temps, l'homme s'habille : il y a 300 000 ans, l'homo sapiens, déjà, se protégeait des intempéries (le froid, la pluie, la neige), mais aussi du soleil (empêchant les brûlures) en revêtant des peaux d'animaux : le vêtement avait alors une fonction de barrière protectrice. Puis au fil du temps, les vêtements ont été améliorés, jusqu'à devenir porteurs de codes sociaux : les marques commerciales l'ont bien compris auprès de nos jeunes adolescents, où la mode vestimentaire est un moyen de s'affirmer et un signe de distinction.

 

Qu'est-ce qu'une fibre textile ?

Les vêtements, ou d'une façon générale les articles textiles (comme les draps, couvertures, tapis…), sont composés de fibres textiles assemblées entre elles selon différents procédés (tissage, tricotage). Mais qu'est-ce qu'une fibre textile ? Le Larousse la définit comme un élément allongé constitutif d'un fil. Les fibres textiles peuvent être classées en deux catégories : les fibres naturelles et les fibres fabriquées (ou chimiques).

Parmi les fibres naturelles, nous retrouvons les fibres végétales (comme le coton, le lin ou le chanvre), les fibres d'origine animale (comme la laine obtenue par la tonte des moutons ou le mohair à partir de la toison de la chèvre angora) et les fibres minérales (fibres d'amiante). Le coton est la première fibre textile du monde ; de 2010 à 2012, la production mondiale de coton s'élevait à 27,3 millions de tonnes.
 

Vues de fibres de coton, chanvre et laine au microscope

 

Les fibres fabriquées (ou chimiques) peuvent être divisées en deux sous-classes : les fibres artificielles obtenues par le traitement chimique de matières naturelles (comme les caséines de lait ou la cellulose de certains végétaux : écorce de pin, bambou, …), et les fibres synthétiques résultant de réactions chimiques complexes conduisant à la polymérisation de motifs élémentaires souvent dérivés du pétrole (comme le polyester, le polyamide ou l'acrylique). Le polyester représente 70% des fibres chimiques.
 

Vues de fibres de polyester, polyamide et acrylique au microscope

 

L'échange de Locard

De par leur construction textile, leurs propriétés (résistance à l'abrasion…), leur fréquence d'utilisation, leur usure (résistance aux UV, lavages successifs…), les articles textiles sont amenés à perdre les fibres qui les composent ; ainsi, il apparaît normal de retrouver sur une scène de crime des fibres textiles. Edmond Locard, professeur de médecine légale et considéré comme l'un des fondateurs de la police scientifique, énonce ainsi en 1920 que « nul ne peut agir avec l'intensité que suppose l'action criminelle sans laisser des marques multiples de son passage. Tantôt le malfaiteur laisse sur les lieux les marques de son activité, tantôt par une action inverse, il emporte sur son corps ou sur ses vêtements les indices de son séjour ou de son geste ». Ce principe de base de l'investigation par les indices matériels conduit tout naturellement l'enquêteur ou le technicien en identification criminelle à envisager le mécanisme de « transfert de fibres » lors d'une agression d'une victime par un auteur : lors de chaque contact, des fibres sont transférées de l'auteur vers la victime, et réciproquement. Bien sûr, le nombre de fibres transférées va dépendre de la pression mise en jeu (contact peu intense ou violent entre l'agresseur et la victime) et du type d'article textile (texture, propriétés…).

Ce mécanisme de « transfert de fibres » s'applique aussi entre un objet (un couteau par exemple) et un article textile transpercé par celui-ci : les fibres de ce dernier sont susceptibles d'être présentes sur la lame du couteau.

Mais la liste n'est pas exhaustive, loin de là ! Un autre type de transfert existe aussi : le transfert secondaire. Reprenons l'exemple de notre agresseur : après avoir agressé la victime, il quitte les lieux avec son véhicule : ses vêtements « emprisonnent » des fibres des vêtements de la victime. Lorsque l'auteur va prendre place sur le siège de sa voiture, les fibres de ses vêtements et les fibres des vêtements de la victime vont être transférées vers le siège : ainsi, nous avons ici le cas où des fibres peuvent être transférées entre des objets qui n'ont pas été en contact direct (les vêtements de la victime et le siège du véhicule de l'agresseur).

 

L'examen des fibres : de l'identification à la comparaison

C'est le département Microanalyse de l'IRCGN, et plus particulièrement l'unité d'expertise Traces de Transfert, qui procède à l'examen des fibres textiles retrouvées sur les lieux d'un crime ou d'un délit.

De l'identification d'une bourre de fibres retrouvée sur les lieux d'un cambriolage d'un local d'entreprise, à la comparaison de fibres retrouvées sur le pare-choc d'un véhicule suspecté d'avoir percuté un piéton avec les fibres composant les vêtements que portaient la personne renversée, les dossiers sont divers et variés.

Microscope de comparaison

 

Disposant de microscopes stéréoscopiques et optiques (grossissant jusqu'à 400 fois), d'un microspectrophotomètre permettant la comparaison des fibres colorées, d'un microscope électronique à balayage, d'un spectromètre infrarouge, le technicien va être en mesure d'identifier et de comparer les différentes fibres soumises aux examens : couleur, diamètre, matité, section… Autant de caractéristiques qui vont être déterminantes lors de comparaisons éventuelles avec des fibres provenant de vêtements de suspects par exemple.

Microscope électronique à balayage (MEB)
Spectromètre infrarouge (IR)
Vue de fibres de polyester au MEB

 

Identification d'une fibre au spectromètre IR

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