Attaques terroristes de janvier 2015 – épisode 1/2 : la traque et la neutralisation des terroristes
- Par le commandant Céline Morin
- Publié le 09 janvier 2025
Le 7 janvier 2015, deux jihadistes lourdement armés se revendiquant d’Al-Qaïda au Yémen abattent douze personnes, dont deux policiers, dans les locaux de Charlie Hebdo et dans la rue jouxtant ces derniers. Deux jours plus tard, tandis que les deux terroristes sont retranchés avec un otage potentiel dans une imprimerie en Seine-et-Marne, un troisième jihadiste se revendiquant de l’État islamique attaque le magasin Hyper Cacher de la porte de Vincennes et prend en otage ses clients, après avoir tué une policière municipale la veille à Montrouge et blessé un agent de voirie. Le 9 janvier, en fin d’après-midi, l’ensemble des otages est libéré et les trois terroristes sont neutralisés. Retour sur les faits avec le Directeur général de la Gendarmerie nationale, le général d’armée Hubert Bonneau, qui commandait le GIGN en 2015.
9 janvier 2015, Dammartin-en-Goële. Il est 16 h 55 quand les militaires du GIGN neutralisent les deux terroristes qui s’étaient retranchés dans une imprimerie après avoir commis une attaque meurtrière contre la rédaction de Charlie Hebdo deux jours plus tôt et tué le policier Ahmed Merabet. Simultanément, le RAID neutralise un troisième jihadiste qui retenait en otage les clients de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à Paris. Ces deux actions coordonnées viennent de mettre fin à un double périple terroriste qui a sidéré la France en ce début d’année.Interrogé sur France 2 lors du journal de 20 heures, ce lundi 6 janvier 2025, le Directeur général de la Gendarmerie nationale (DGGN), le général d’armée Hubert Bonneau, qui commandait le GIGN à l’époque des faits, est revenu sur ces événements et la parfaite coordination des forces de sécurité intérieure dans la prise en compte des attentats terroristes. Il a également rappelé l’engagement total des gendarmes pour protéger la population et prévenir de telles attaques, alors que la menace terroriste est toujours aussi élevée.
7 janvier 2015 : les frères Kouachi attaquent la rédaction de Charlie Hebdo
Tout commence le 7 janvier 2015, lorsque deux hommes lourdement armés pénètrent dans les locaux de la rédaction de Charlie Hebdo, située dans le centre de Paris. Après avoir abattu douze personnes, dont deux policiers, les deux individus prennent la fuite. Un dispositif opérationnel d’ampleur est alors déployé pour les retrouver, mobilisant l'ensemble des unités de gendarmerie et des services de police dans les départements autour de Paris. Les unités des différents groupements sont engagées dans un dispositif de contrôle des axes routiers principaux.
Ce jour-là, l’ensemble des forces du GIGN est réuni à Satory pour assister aux « journées cibles » mises en place deux ans plus tôt par le commandant du Groupe, le colonel Hubert Bonneau, et justement consacrées cette année-là aux modes d’action terroristes. « Nous prenons connaissance de la situation en fin de matinée, et à partir de ce moment-là, l'ensemble du GIGN est mis en alerte nationale. Toutes les composantes sont concernées, y compris la projection logistique, se souvient le général d’armée Bonneau. Des éléments concernant les auteurs potentiels nous parviennent assez rapidement, puisqu'on retrouve notamment dans le véhicule une carte d'identité. Il apparaît que ce sont des individus radicalisés, ayant pu suivre des stages à l'étranger, notamment au Yémen. Nous n’avons alors qu'une direction de fuite, le nord de Paris. Dans un premier temps, une reconnaissance des lieux potentiels où les individus pourraient avoir trouvé refuge est effectuée, notamment dans la région de Reims. La police sera surtout impliquée dans cette phase, mais nous sommes informés des évolutions grâce à nos échanges réguliers avec le patron du RAID et nous restons en alerte. »
Dans le même temps, une cellule opérationnelle chargée de coordonner l'action de l'ensemble des unités engagées est mise en place au ministère de l’Intérieur, sous l'autorité de Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur, permettant aux responsables présents, dont le général d’armée Denis Favier, alors DGGN, M. Falcone, directeur général de la police nationale, M. Boucault, préfet de police de Paris et M. Calvar, directeur général de la sécurité intérieure, de partager en permanence l’ensemble des informations. La Cellule interministérielle de crise (CIC) est également activée à Beauvau, ainsi qu’un P.C. à la Direction générale de la Gendarmerie nationale (DGGN), sous le commandement du Directeur des opérations et de l'emploi (DOE).Le 8 janvier, à 9 h 30, les deux terroristes sont repérés à proximité de Villers-Cotterêts, dans l’Aisne, en zone de compétence de la gendarmerie, où ils ont menacé trois personnes dans une station-service. Évoluant à visage découvert, ils sont formellement identifiés par le gérant comme étant les auteurs de l'attentat contre Charlie Hebdo. Les images de vidéosurveillance de la station-service confirment cette information.
8 janvier 2015 : une nasse se forme autour des deux terroristes
En effet, dès 10 h 12, le plan Épervier renforcé a été déclenché sur tous les axes menant à la région parisienne, dans un rayon de 40 km autour de l’endroit où les terroristes ont été repérés. Des dispositifs de contrôle et des points d'interception sont mis en place, tandis que des patrouilles armées par des militaires de l'Escadron départemental de sécurité routière (EDSR) et des brigades locales quadrillent la zone dans la profondeur. Le concours des forces aériennes de la gendarmerie est également sollicité pour couvrir cette vaste zone géographique.
Le GIGN, déjà mis en alerte depuis la veille, se déploie. La traque s’engage. « Nous décidons immédiatement d'envoyer sur le secteur la première alerte du GIGN, avec les hélicoptères du GIH (Groupe Interarmées d'Hélicoptères, NDLR) ainsi qu’un second détachement par la route. Pendant la projection, nous apprenons que les frères Kouachi auraient été vus un peu plus tard, plus au sud de ce secteur. Puis nous n’avons plus de nouvelles d’eux, ce qui nous pousse à penser que la pression mise sur le terrain les a conduits à se cacher dans la zone », poursuit le général.
Cette mobilisation d’ampleur porte rapidement ses fruits. Entre 10 h 30 et 12 h 25, les unités de gendarmerie de l'Oise repèrent des indices du passage des terroristes et du véhicule volé. À 13 heures, un Poste de commandement (P.C.) de crise est mis en place à la brigade de Villers-Cotterêts (Aisne), où sont présents le chef du GIGN, le commandant de région et le commandant du groupement tactique de gendarmerie mobile.
« En lien avec la DGGN, la décision est prise de renforcer les contrôles dans le secteur de Villers-Cotterêts, une zone avec de nombreux bois, très propice pour se cacher. En début d'après-midi, nous regroupons donc les éléments du GIGN, du RAID et de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI) de Paris, afin de contrôler physiquement une zone boisée de 10 km sur 7 au sud-est de Villers-Cotterêts. L’opération coordonnée de ratissage est conduite de 14 heures à 19 heures environ », relate le général d’armée Bonneau. Les gendarmes départementaux (G.D.) assurent en outre le bouclage de ce périmètre en tenant les points stratégiques, tandis que les gendarmes mobiles (G.M.) et les gardes républicains patrouillent dans la profondeur.
« Les recherches restent vaines et nous décidons, en coopération avec la gendarmerie départementale, d'intensifier les contrôles dans la zone. Nous définissons un rayon de 100 km et établissons un périmètre de surveillance renforcée autour de Villers-Cotterêts. Nous faisons un effort sur les axes de communication principaux et secondaires, et nous mettons en place des points d'interception sur les points de passage obligés, poursuit-il. À la tombée de la nuit, nous intensifions la pression par des passages incessants d'hélicoptères de la section aérienne de gendarmerie de Vélizy-Villacoublay et du GIH. En maintenant cette pression toute la nuit sur la zone, l’objectif est de fixer les frères Kouachi, c’est-à-dire de les empêcher de quitter ce périmètre. Nous sommes vraiment dans un système de traque. Nous avions d’ailleurs déjà mis en place les mêmes modes opératoires en 1995, lors de l'interpellation de Khaled Kelkal. »
Un bouclage strict de la zone est donc maintenu pour la nuit. Les G.M. remplacent alors les G.D. pour réaliser le bouclage de zone, tandis que ces derniers procèdent à des contrôles en profondeur dans un rayon de 40 km autour de la zone de bouclage. « Au total, ce sont plus de 1 000 militaires qui sont engagés pour assurer ces opérations jour et nuit », précise le DGGN.
Le GIGN poursuit ses opérations de recherches nocturnes et les levées de doute sur certains lieux ciblés. La médiatisation de l’affaire ayant conduit à une multiplication des signalements au cours de la nuit, de nombreuses vérifications sont en effet nécessaires.
L’occupation massive du terrain réduit ainsi la marge de manœuvre des terroristes, dont les mouvements sont désormais susceptibles d'être détectés par les gendarmes.
9 janvier 2015 : les deux terroristes se retranchent dans une imprimerie de Seine-et-Marne
« Le lendemain matin, nous décidons d'alléger la pression pour duper en quelque sorte les frères Kouachi et les pousser à bouger. Et c’est ce qu’il se va se passer. Ils ont vraisemblablement passé la nuit dans un bois, où leur véhicule s’est embourbé. Ils se dirigent donc vers une route secondaire à proximité et braquent le premier véhicule qui passe, une 206. La conductrice donne immédiatement l'alerte en appelant le 17 », poursuit-il.
Il est alors 8 h 32 ce vendredi 9 janvier. La victime signale au Centre d’opérations et de renseignement de la gendarmerie (CORG) que les deux auteurs sont armés et ont déclaré vouloir venger le prophète.
Le GIGN, déployé sur le terrain, reçoit immédiatement l’information. Dix minutes plus tard, trois hélicoptères décollent de la zone d’opération, avec à leur bord trente militaires. Quatre-vingt-dix autres partent à la recherche des deux terroristes. Dans le même temps, deux EC 135 des Forces aériennes de la gendarmerie nationale (FAGN) prennent le véhicule en chasse. « Nous sommes ainsi informés en temps réel de la direction de fuite des Kouachi », note le général d’armée Hubert Bonneau.
La forte occupation du terrain et les nombreux barrages déployés mettent les frères Kouachi en difficulté. À 8 h 45, alors qu’ils tentent de fuir la zone sous contrôle de la gendarmerie, les deux hommes se retrouvent bloqués par un barrage près de Dammartin-en-Goële (77). Pour échapper aux militaires, ils pénètrent dans la zone industrielle de la commune et se retranchent dans une imprimerie.À 8 h 46, le CORG de Seine-et-Marne reçoit deux appels : l’un provenant d'un commercial qui dit avoir croisé un terroriste en se rendant à l’imprimerie, et l'autre du gérant de l'entreprise, qui appelle depuis son bureau et indique que les terroristes se trouveraient dans ses locaux. Les gendarmes F. F. et M. S., de la brigade de Dammartin-en-Goële, sont les premiers à marcher ce jour-là. Ils se rendent sur place pour confirmer l'information. Ils repèrent alors le véhicule signalé, vide de tout occupant, puis aperçoivent un individu qui leur fait de grands signes à travers la vitre, à l’étage du bâtiment. Ne bénéficiant pas d'une protection balistique suffisante dans leur véhicule de service, les deux gendarmes courent se mettre à couvert à l'angle gauche de la société, tout en continuant d’observer. Ils essuient alors plusieurs coups de feu de kalachnikov : sept impacts seront retrouvés sur leur véhicule. L’un des gendarmes riposte et blesse l’auteur des coups de feu. Avant de se replier, le militaire crève les pneus du véhicule des terroristes afin de freiner leur fuite éventuelle.
Quelques minutes plus tard, alors que les hélicoptères des FAGN survolent la zone, des gendarmes de la brigade locale arrivent sur le site afin de renforcer le premier binôme et de boucler le périmètre en attendant l’arrivée du GIGN.
Un bouclage hermétique autour de l’imprimerie
9 h 30. La zone autour de l'imprimerie est désormais bouclée hermétiquement. Dès 9 h 40, 120 hommes du GIGN, unité d’intervention spécialisée menante, sont présents sur place. Des personnels du RAID et de la BRI déployés pour la traque restent à proximité, prêts à appuyer la manœuvre principale du GIGN en cas de besoin.
Au plus fort de l'action, 710 militaires issus de toutes les composantes de la gendarmerie (gendarmerie départementale, mobile, Garde républicaine, GIGN, ainsi que de nombreux moyens spéciaux tels que des hélicoptères et des équipes cynophiles) sont déployés dans un périmètre restreint autour de Dammartin-en-Goële.
« L'action de feu des gendarmes primo-intervenants a finalement permis de fixer les frères Kouachi dans l'imprimerie. Pour nous, nous sommes désormais entrés dans un schéma opératoire terroriste que le GIGN avait déjà pu identifier en analysant les attentats de Mumbai (anciennement Bombay), en Inde, de Nairobi, au Kenya, ou encore d'In Amenas, en Algérie. En étudiant ces modes opératoires, nous avons constaté qu’après une phase de tuerie, suivie d’une phase de retranchement pouvant durer dans le temps, les auteurs, une fois fixés, basculaient dans une phase d'action impliquant un affrontement avec les forces de l’ordre, jusqu’au sacrifice de leur vie, explique le général d’armée Bonneau. Nous sommes donc dans la phase finale, et nous pensons que nos adversaires vont résister. Côté opérationnel, nous passons donc d'un dispositif de traque, qui a duré deux jours, à un dispositif d'intervention. Tous les effectifs vont alors rapidement basculer à Dammartin, où un P.C. est réinstallé à l'entrée de la zone industrielle. Le premier réflexe, en lien avec le GGD 77, est de faire évacuer l'ensemble de la zone et de la rendre totalement étanche. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il n’y a pas d'images en direct. Les journalistes avaient été éloignés et l'ensemble des personnes de la zone industrielle avaient reçu pour consigne de se confiner. »
Toute la journée, les gendarmes départementaux vont ainsi s’assurer du confinement de l'ensemble des habitants et des salariés des abords de l'imprimerie et mettre en place un deuxième bouclage pour interdire toute circulation dans cette zone. Il n’y a plus de mouvements, si ce n'est ceux des gendarmes.Au sein du Poste de commandement opérationnel (PCO), mis en place à 200 mètres de l'imprimerie dès 10 heures, les deux gendarmes de la brigade de Dammartin-en-Goële, pris à partie par les terroristes peu de temps auparavant, livrent aux autorités les renseignements qu'ils ont pu recueillir sur place.
Autour du général d’armée Denis Favier, désigné coordonnateur des opérations à Dammartin-en-Goële par le président de la République lors d’une réunion de crise qui s’est tenue à l’Élysée, sont notamment réunis François Molins, le procureur de Paris, le général d'armée Bruno Carmichael, commandant la région de gendarmerie d’Île-de-France, Jean-Luc Marx, préfet de Seine-et-Marne, le colonel Hubert Bonneau, commandant le GIGN, Jean-Michel Fauvergue, chef du RAID, la colonelle Anne Fougerat, commandant le GDD 77, et Emmanuel Dupic, procureur de la République adjoint au TGI de Meaux. Le DGGN informe directement le ministre de chaque phase de l’opération.
Préparation des différentes hypothèses d’intervention
« Dans le même temps, les modes habituels du GIGN se mettent en place. Rapidement, le patron de la force intervention fait des propositions pour un plan d'assaut d'urgence, afin d’intervenir en mode dégradé si des tirs survenaient à l'intérieur ou si les auteurs venaient à sortir. Nous commençons également à travailler les appuis et l'observation de l'imprimerie afin d'essayer de comprendre, avec des moyens spéciaux, ce qui se passe à l'intérieur. On sait qu'il y a au moins une personne dans le bâtiment. Et quand Monsieur Catalano est libéré au bout de quelques heures, vers 10 h 05, nous apprenons qu'il y a une seconde personne à l'intérieur, qui est restée cachée à proximité des terroristes. Cela complique évidemment la manœuvre, parce que nous devons protéger à tout prix la vie de cet employé. Nous parvenons à entrer en contact avec lui, mais nous ignorons s'il est caché à l’insu des terroristes ou s’il nous répond sous leur menace. Il est donc considéré comme un otage potentiel, relate le DGGN. Notre manœuvre est également perturbée dans la matinée en raison des contacts qu’un média a pu avoir avec les frères Kouachi, au cours desquels l’un d’eux a revendiqué l'acte. Nous savons désormais que toute négociation est impossible. Nous n'aurons d’ailleurs pas de contact direct avec eux. »
Grâce à des moyens techniques spéciaux, le GIGN peut toutefois déterminer que les deux frères écoutent les messages laissés par les négociateurs sur leur boîte vocale. Comme pressenti et conformément à l’analyse de leurs modes opératoires, les terroristes sont déterminés à mener leur action jusqu'au bout.
« Aux alentours de midi, un autre média dévoile qu'il y a un otage caché à l'intérieur. Dès lors, nous nous tenons également prêts à intervenir dans le cadre d'un plan d'assaut délibéré, c’est-à-dire à notre initiative », précise le général.
Le GIGN est donc prêt à intervenir, quand un nouvel événement fait basculer la situation.
Prise d’otages à Paris
À 13 h 19, une seconde crise éclate en effet à Paris. Des coups de feu retentissent dans l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes. Un individu lourdement armé y retient de nombreux otages et aurait déjà fait plusieurs morts. La quasi-totalité des effectifs du RAID et de la BRI présents à Dammartin-en-Goële sont redéployés sur ce second théâtre de crise. Pour la première fois, les unités d’intervention spécialisée sont amenées à mener deux opérations contre-terroristes en parallèle. Une coordination parfaite entre les deux postes de commandement opérationnels sera dès lors indispensable, d'autant que l’individu retranché à Paris conditionne la vie de ses otages à celle des frères Kouachi. Pour ce faire, le GIGN et le RAID échangent des officiers de liaison.
Au regard du nombre d’otages retenus et de la lourde menace qui pèse sur eux, il est décidé en cellule de crise de donner la priorité opérationnelle au dispositif parisien en cas d’assaut.
« Le GIGN reste donc dans une phase d'observation, prêt à intervenir. Nous sommes en liaison constante avec la porte de Vincennes. Nous savons ce qui est préparé par le RAID et la BRI. Cela dure un peu dans le temps parce qu’Amedy Coulibaly de son côté est en contact avec les forces de l’ordre, ce ne sont pas tout à fait les mêmes profils », précise le DGGN.
Mais les événements vont en décider autrement. En effet, à 16 h 40, la porte de l’imprimerie s’entrouvre. Le GIGN est alors prêt à déclencher le plan d’assaut d’urgence, d’autant que l’otage libéré le matin était porteur d’un message des frères Kouachi indiquant leur intention de « tuer le GIGN ». « Nous avions anticipé toutes les hypothèses : nous prévoyons donc des dispositifs pour investir l'imprimerie, tout en étant en capacité de les traiter à l'extérieur, comme une sorte de tenaille », poursuit-il.
Neutralisation des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly
À 16 h 53, les deux terroristes sortent de l'imprimerie et ouvrent le feu sur les gendarmes. Ils progressent tels des combattants, adoptant une tactique de « couverture de feu » : l’un tire sans interruption sur les gendarmes pour couvrir le déplacement de l’autre. « Ils adoptent des postures de soldats, s'appuyant mutuellement et prenant en compte le terrain. Nous sommes face à des individus qui semblent déterminés, jusqu'au-boutistes. Nous pouvons alors penser qu’ils ne se rendront pas et qu’ils vont chercher à mourir en combattant. »
En effet, à aucun moment, les deux frères ne semblent envisager une manœuvre de repli. Leurs tirs nourris provoquent alors la riposte des gendarmes du GIGN plus tôt que prévu. « À ce moment-là, pour préserver la vie des militaires présents, nous n'avons pas d'autre choix que de les neutraliser. Toute cette séquence dure moins de deux minutes. Toute leur attitude traduit leur volonté d’aller jusqu'au bout. Ils étaient donc déterminés à tuer. Ces hommes ne se seraient jamais rendus. Ce n’était pas du tout leur objectif », se remémore le général d’armée Bonneau.
Le déclenchement du plan d’assaut d’urgence du GIGN précipite l'assaut du RAID et de la BRI dans l'Hyper Cacher de la porte de Vincennes, comme décidé au cours de la préparation coordonnée des opérations.
À 16 h 55, les deux terroristes sont neutralisés à Dammartin-en-Goële. Un membre du GIGN est légèrement blessé au cours de l'opération. Les militaires vont alors utiliser le Sherpa pour libérer l’employé qui se trouve à l’étage de l’imprimerie, évitant ainsi de progresser dans le bâtiment susceptible d'avoir été piégé par les terroristes. L’homme est évacué sain et sauf à 17 h 06. Opération terminée.
À Paris, à quelques minutes d’écart, les policiers du RAID et de la BRI lancent leur opération sur l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes. Pendant l’assaut, les forces d’intervention subissent les tirs nourris d’Amedy Coulibaly. Ce dernier est finalement abattu et vingt-six otages sont libérés. Cette prise d’otages aura fait quatre morts, qui viennent s’ajouter à la liste des victimes d’Amedy Coulibaly, auteur du meurtre d’une policière municipale la veille à Montrouge.
Retrouvez dans un second article les facteurs de réussite de cette opération ainsi que les enseignements tirés de cette crise terroriste.
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