Comment devient-on profiler en France ?
- Par la rédaction du site PJGN
- Publié le 02 septembre 2024, mis à jour le 11 septembre 2024
La gendarmerie française dispose d’un département de profilers, un terme popularisé par les séries, mais décrié par les analystes comportementaux et les enquêteurs du Département des sciences du comportement. Quelles études faut-il suivre pour l’intégrer ? Éclairage.
Vous avez sans doute entendu parler des profilers, ces agents surdoués qui résolvent grâce à leurs talents une investigation criminelle complexe, en un seul épisode de série américaine. Au sein du Pôle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN), les profilers français sont intégrés au cœur du Service central de renseignement criminel, dans le Département des sciences du comportement (DSC). Ils sont sept militaires : cinq analystes du comportement et deux enquêteurs. Ils exècrent le terme de profiler. Ils tiennent à leur nom de métier français, plus cohérent par rapport au fantasme de la fiction et à la réalité du terrain. Interrogés pour les besoins de cet article, ils soulignent que leur travail, loin du cliché, s’effectue avec une « méthodologie précise et une rigueur intellectuelle ».
Analyste comportemental : la criminologie au cœur du parcours scolaire
Autant le dire directement : il n’y a pas de voie royale pour parvenir à réaliser ce destin professionnel. Pour preuve, les sept officiers de police judiciaire (OPJ) du DSC ont tous connu des parcours différents. Difficulté supplémentaire : il n’y a aucune école en France qui permet d’être formé spécifiquement à ces deux métiers. Il n’y a aucune université qui propose un cursus complet et professionnalisant en psychocriminologie appliqué à l’enquête criminelle, contrairement à certains pays comme le Canada. De surcroît, les débouchés sont rares. La vocation reste néanmoins possible, en suivant ces quelques conseils.
Concernant les analystes du comportement, le cursus post-bac doit généralement se réaliser en faculté de psychologie ou de droit. En parallèle, pour posséder des connaissances en criminologie, il faut impérativement compléter le parcours avec des Diplômes universitaires (DU) propres à chaque université. Ceux-ci permettent d’acquérir les bases du droit, particulièrement du droit pénal.
À titre d'illustration, la capitaine Peggy Allimann a effectué un master en psychologie clinique et psychopathologique à Besançon. Ses DU : psychocriminologie à Lille, stress et traumatismes à l’université Pierre et Marie Curie et psycho-oncologie à l’université de Haute-Alsace. Peggy Allimann a d’abord travaillé dans la marine nationale, se formant à l’évaluation du traitement des traumatismes psychologiques. Avant de rejoindre le DSC, ses expériences professionnelles ont été nombreuses : elle a intégré la police dans l’accueil des victimes et des auteurs d’infractions pénales, avec un travail régulier dans les violences intra-familiales au sein de la brigade des mineurs – devenue depuis la brigade de protection des mineurs. Puis, elle a rejoint l’Office centrale pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) en tant que psycho-criminologue.
« La criminologie, c’est le croisement de deux disciplines, le droit et la psychologie »
En plus d’une maîtrise en droit à Versailles Saint-Quentin-en Yvelines et d’un master 2 en clinique criminologique et victimilogique à la faculté de psychologie de Rennes 2, la chef d’escadron Stéphanie le Maout – qui commande actuellement le DSC – a quant à elle effectué deux DU : l’un en sciences criminelles, un autre en sciences criminologiques, tous les deux à l’Institut de criminologie de Paris-Assas.
Elle met en garde les futurs postulants :
« On reçoit énormément de CV avec des masters de psychocrimino. Tous les petits DU ont leur importance, car c’est du travail et un investissement supplémentaires en double-cursus du master 1 ou master 2. Ce qui fait également la différence, ce sont les stages réalisés. Si quelqu’un a par exemple fait un stage en médecine légale, cela démontre son intérêt pour le métier. »
Diplômée d’un master 2 en psychologie de la délinquance à l’université de Liège avec une L1 en droit, la chef d’escadron Audrey Renard a pour sa part effectué un DU de criminologie à Paris 8, agrémenté de plusieurs stages en milieu pénitentiaire. « La criminologie, c’est le croisement de deux disciplines, le droit et la psychologie », explique-t-elle.
Être en phase avec les valeurs et les contraintes du gendarme
Entre le cursus scolaire, les DU et les stages, la personnalité du candidat est d’une grande importance. « Il faut être en accord avec le travail en collectif et adhérer aux valeurs de la gendarmerie, avec toutes les obligations que cela implique : vivre en caserne, être joignable h24, travailler parfois le week-end», prévient Stéphanie le Maout qui se souvient de candidats « qui avaient du mal avec des photos de scènes de crime ». « Là, il faut changer d’orientation », conseille-t-elle.
Les deux plus jeunes militaires du DSC ont tous les deux intégrés la réserve de la gendarmerie durant leurs études. La lieutenante Blandine Fontana a effectué une licence en droit, avec un DU en criminologie à Lille, et obtenu un master en criminologie à Liège. Elle a réalisé des stages dans une association d'aide aux victimes et en médecine légale.
En plus de ses études de droit et en psychologie, le capitaine Thibault Duchéne a de son côté validé de nombreux DU, notamment en psychopathologie criminelle et en criminologie. Il a aussi suivi des formations variées, que ce soit dans le domaine des sciences forensiques à Lausanne ou dans l’étude des profils de meurtriers sexuels via l’organisme de formation Afpro. À l’image d’Audrey Renard, il a effectué de multiples stages dans le milieu pénitentiaire avant de réussir le concours d’officier de gendarmerie.
Pour résumer : afin de devenir analyste comportemental, l’idéal est d’obtenir un master 2 dans le domaine de la psychologie ou du droit. En parallèle, il faut accumuler des DU en criminologie ou en psychocriminologie et effectuer des stages. Enfin, le candidat doit intégrer la gendarmerie et devenir officier de police judiciaire.
Enquêteur au DSC : multiplier les expériences d’enquête en unité de recherches
Le deuxième métier est celui d’enquêteur au DSC. Sur le terrain, il est en binôme avec l’analyste comportemental, en appui des unités de recherche. Il fait le lien entre les analystes comportementaux et les enquêteurs territoriaux, en apportant une vision globale des faits, en constatant par exemple les éventuels manquements. Intégrer le DSC en tant qu’enquêteur demande une forte expérience au préalable.
L’adjudant-chef Jérôme C. a commencé sa carrière en tant que gendarme auxiliaire puis en mobile. Il a ensuite été affecté en brigade de recherches en 2003 en tant qu’OPJ, réalisant des enquêtes judiciaires. Jérôme C. a par la suite acquis une expertise sur les atteintes aux personnes, montant parfois des dossiers en tant que directeur d’enquête. Jérôme C. est arrivé au DSC l’année dernière, en 2023.
Le major Marc V. a pour sa part un pur cursus en gendarmerie départementale, réussissant le concours de sous-officier il y a 28 ans de cela. Il a une expérience de vingt années en unité de recherches, en particulier au sein d’une section de recherches dans le groupe homicide. Il est depuis cinq ans enquêteur au DSC. De par son expérience, il constate que l'apport du DSC sur un dossier criminel permet « une conduite efficace des investigations ». Le binôme - avec l’analyste comportemental - est également utile lors des gardes à vue sur des cas particuliers comme les suspects schizophrènes, narcissiques ou multirécidivistes, en trouvant « des biais pour les aveux ».
Pour résumer : afin de devenir enquêteur au DSC,il faut, en premier lieu,avoir une forte expérience en tant qu’OPJ dans l’enquête, notamment au sein d’une unité de recherche. Savoir témoigner devant les juridictions est aussi une plus-value.
Contacter la gendarmerie
Numéros d'urgence
Ces contenus peuvent vous intéresser
Quantification rapide d’ADN par fluorimétrie à partir de prélèvements biologiques issus de cadavres et d’objets de références
Mots clés : Quantification ADN - fluorimétrie - DeNovix - Identification...
Article
Étude comparative de rehausseurs des traces papillaires ensanglantées sur support non poreux
Mots clefs Criminalistique - Traces papillaires ensanglantées...
Article
IGSR/OGSR : Étude de faisabilité d'une analyse conjointe
Mots clefsGunshot residue (GSR) - IGSR - OGSR - MEB/EDS - HPLC/HRMS
Article
Mise en évidence par ablation laser couplée à la spectrométrie de masse à plasma induit de marqueurs minéraux entrant dans la composition des encre...
Mots clefsProduits de marquage codés - systèmes intelligents de neutralisation...
Article