L'archéologie forensique

  • Par Contributeur 249519
  • Publié le 26 janvier 2017, mis à jour le 13 juin 2023

Fouiller une sépulture, qu'elle remonte à la nuit des temps ou à quelques semaines, requiert un véritable savoir-faire : il faut en déterminer les contours, le contenu, identifier les ossements, les indices minuscules qui permettront de dater l'ensemble et de reconstituer toute une chaîne d'actions. En France, la gendarmerie est organisée depuis longtemps pour faire face aux cas de corps enfouis illégalement et dispose d'un service spécial, composé d'archéologues, qui investit les scènes de crime.

L’archéologie forensique : qu’est-ce que c’est ?

L’archéologie forensique est l’application des méthodes de l'archéologie dans des contextes criminels de recherche et de découverte de corps enfouis illégalement. Elle peut être employée dès lors que l'on suspecte l'enterrement d'un corps ou de parties de corps dans un cadre criminel. Le relevé, systématique et méthodique de tous les indices présents, est essentiel si l’on veut être en mesure d’identifier les victimes, de comprendre les circonstances d’enfouissement et de rechercher les auteurs.

   

Les archéologues de la gendarmerie

La présence d'archéologues est encore trop rare sur les scènes de crime en France à l'heure où, dans notre pays, l'anthropologie forensique commence à s'organiser d'un point de vue institutionnel. Depuis sa création, l'Institut de Recherche Criminelle de la Gendarmerie Nationale (IRCGN) s'est organisé pour faire face aux cas de corps enterrés. Ainsi, le département anthropologie hématomorphologie (ANH) de l'IRCGN, le plus important laboratoire français d'anthropologie forensique, utilise et développe des méthodes archéologiques, fondées notamment sur l'expérience anglo-saxonne, depuis plus de 20 ans.

   

Des recherches méthodiques

Si le département ANH est sollicité pour nombre de découvertes accidentelles de squelettes ou d'ossements épars (analyse en laboratoire dans ce cas), il est également apprécié pour sa capacité à mener des recherches méthodiques sur le terrain. Il s'intègre dans ce cas dans un dispositif complémentaire mis en œuvre pour localiser un cadavre enfoui illégalement. Les recherches sont effectuées à l'aide de chiens spécialisés en recherche de restes humains (RHH) du groupe national d'investigation cynophile (GNIC) et d'un géoradar déployé par le département signal-image-parole (SIP) de l'IRCGN. Le géoradar ou radar à pénétration de sol est un appareil géophysique utilisant le principe d'un radar que l'on pointe vers le sol pour en étudier la composition et la structure, ce qui permet de détecter les corps enfouis jusqu'à une certaine profondeur.

   

Une excavation méticuleuse

Lorsque la zone d'enfouissement du corps est définie avec certitude, les archéologues du département ANH prennent le relais. Un carroyage de la zone est alors réalisé. Il est destiné à diviser la zone en carré afin de pouvoir localiser chaque élément retrouvé dans la fosse. A ce jour, seul le décapage à l'aide d'un engin, évoluant sous l’œil exercé d'un archéologue forensique, permet de mettre à jour les fosses accueillant des cadavres en protégeant les traces et indices recherchés. Quel que soit son tonnage, le godet lisse de l'engin permet une lecture optimale des traces dans le sol, sans endommager l'intérieur de la fosse. Il s'agit alors pour les archéologues de repérer la limite du creusement, la profondeur de la fosse, l'utilisation ou non d'outil pour creuser, les modalités de décomposition du corps et des éléments organiques, la position initiale du corps, voire de l'action de l'action de la faune entomologique (l'analyse de ces insectes permettra éventuellement de dater le moment de la mort). Reconnaître les parois d'un creusement ou déterminer quelle est la forme de ce dernier sont autant d'informations qui pourront s'avérer capitales dans l'instruction. Chaque indice relevé peut faire alors l’objet d’analyses par les experts de l’IRCGN : balistique, faune, flore, anthropologie, incendie...

 

    

 

 L'analyse des éléments osseux au laboratoire

Tous les ossements retrouvés dans la fosse sont alors prélevés et analysés en laboratoire. Les experts du département ANH appliquent alors des méthodes tirées de l'anthropologie biologique permettant l'identification et l'étude des restes humains squelettisés.

L'archéologie forensique est un outil à proprement parler, mais aussi une philosophie d'action pour la gestion d'une scène de crime qualifiée alors d'archéologique en raison d'un enfouissement total ou partiel des vestiges. Elle assure surtout la découverte de la preuve indicielle, en toute sécurité. La fouille archéologique d'une inhumation permet de remonter et de mettre en évidence, chaque changement ou perturbation du site d'enfouissement, jusqu'à l'état initial (scène de crime originelle). Les experts du département ANH peuvent de fait suivre des dossiers tout au long de la chaîne criminalistique : localisation, excavation et analyse des ossements en laboratoire. Leur expérience en matière d'archéologie criminalistique révèle combien les phases de terrain, à savoir le traitement de la scène de crime de nature archéologique (recherche, fouille et prélèvement) sont primordiales dans une affaire, en particulier dans la recherche de faits sériels.

 

Sources

1 : Ducrettet F. et al, Organisation, méthodes et recherches en archéologie criminalistique à l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale. A propos de 20 ans d'expérience, La revue de médecine légale, 2013

2 : Georges P. et al, Problématiques et règles d'emploi criminalistiques des engins de chantier pour la recherche de cadavres enfouis. L'expérience de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, , Revue internationale de Criminologie et de Police technique et scientifique, 2012

3 : Coulombeix A. et Georges P., Archéologie forensique : gendarmes et archéologues sur une scène de crime, Revue Archéologie, 2014, n°523 (ci-dessous en téléchargement)

Gendarmes et archéologues.pdf (2,3 MB)

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