L'I.A. au service de la défense

Publié en Septembre 2019, ce rapport constitue la stratégie du ministère des Armées en matière d’intelligence artificielle, et présente une feuille de route ambitieuse et respectueuse des valeurs et engagements internationaux de la France.

Le lien entre l’intelligence artificielle et la Défense

Le rapport souligne que l’intelligence artificielle est l’objet d’une compétition planétaire de grande intensité, dont l’enjeu et le rythme sont tels que tout décrochage serait irrémédiable. Bien que l’I.A. ne constitue pas une fin en soi, mais un moyen d’exécuter ses missions, il est essentiel que les armées françaises ne manquent pas un tournant technologique majeur.

Mettant en exergue que les grands industriels du numérique disposent de solutions technologiques de référence attractives pour le secteur militaire, le rapport affirme que l’avenir de l’I.A. sera dual et que le secteur militaire devra bénéficier des avancées du secteur civil. Cette dualité rend la transition complexe pour le ministère des Armées qui devra, d’une part, adapter à ses usages particuliers les solutions civiles et d’autre part, développer de manière souveraine des applications spécifiquement militaires répondant à des exigences élevées en termes de latence, de robustesse et de résilience.

Bien que félicitant la France pour son très haut niveau de recherche fondamentale, le rapport souligne le décalage avec l’industrialisation et la déclinaison en service de l’I.A. qui demeurent bien moins avancé, c’est donc logiquement que le ministère appel à un meilleur équilibre entre recherche fondamentale et application industrielle autour d’une politique globale des données.

Les enjeux pour la Défense

Bien que les enjeux de l’I.A. soient à la fois en fonction du but poursuivi (opérationnel ou logistique), de ses applicatifs, mais également de sa cible (ennemie ou amie), le ministère des Armées prône une règle générale : l’I.A. est complémentaire à l’homme et s’inscrit dans un cadre d’analyse et d’aide à la décision afin de placer l’humain au centre de la réflexion et de la prise de décision.

Au plan missionnel, le ministère des Armées met l’accent sur les opérations de renseignement, les actions de commandement et l’engagement des troupes, alors qu’au plan logistique, l’I.A. bénéficiera depuis le recrutement, jusqu’à la gestion des flux en passant par le maintien en condition des personnels.

Au plan technique, le rapport évoque de nombreux enjeux militaires liés à l’I.A. dont : la lutte contre les incendies, la robotiqueintelligente, la vision par ordinateur, l’intelligence distribuée, l’analyse sémantique, le traitement automatique des langues, le croisement de données, le déminage, la lutte contre les essaims de drones, la discrimination entre combattants et non-combattants, la proportionnalité de la réponse en fonction de la menace, l’optimisation des flux logistiques, la gestion technique des flottes de matériels, les engagements financiers, les opérations de maintenance ou de recrutement…

Sur le plan opérationnel, en faveur des cibles amies, le rapport indique que l’I.A. pourrait optimiser des processus opérationnels, améliorer la rapidité d’action, mieux protéger le soldat, améliorer l’entrainement des unités et participer à une formation différenciée des individus (susceptible de s’associer avec la réalité augmentée dans le cadre de war gaming). À l’encontre des cibles ennemies, les opportunités de l’I.A. se traduisent par la reconnaissance et la détection des cibles ou des dangers de terrains inconnus, par des actions de déception, par le renfort de la capacité d’anticipation des manœuvres de l’adversaire et des capacités d’analyse de signaux faibles afin de réduire significativement l’effet de surprise.

Les risques pour la Défense

Le ministère des Armées est toutefois conscient des limites d’une technologie jeune, peu mature et peu robuste, dont les résultats sont parfois peu explicables, ou menant à des erreurs grossières.

Si les risques techniques liés notamment aux biais, à la rétro-conception, à des résultats opaques ou à la dépendance technologique demeurent maitrisable, les risques d’une utilisation malveillante de l’I.A. sont également considérés car ce sont des risques majeurs pour la Défense : la prévisibilité des modes d’action français par les I.A. adverses, le détournement ou leurrage des capacités d’I.A. françaises, des opérations d’influence ou des actions hostiles à « hautes fréquences ».

Bien que la technologie de l’I.A. n’ait pas atteint une maturité capable de bouleverser les rapports de forceni de changer la nature de la guerre, elle laisse entrevoir, à court terme, de nouveaux modes d’action et des ruptures d’emploi ou de seuil. Véritable course à l’armement, l’I.A. est incontestablement en mesure de constituer un agent déstabilisateur des équilibres établis.

La feuille de route du ministère des Armées

Guidé par le respect des valeurs du Droit International Humanitaire, le ministère des Armées ne sous-estime ni la dimension technologique, ni la dimension éthique de l’intelligence artificielle.

L’action du ministère des Armées se décline en 7 axes d’effort :

  1. l’aide à la décision en planification et en conduite ;
  2. le combat collaboratif ;
  3. la cyberdéfense et l’influence ;
  4. la logistique, le soutien et le maintien en condition opérationnelle ;
  5. le renseignement ;
  6. la robotique et l’autonomie ;
  7. l’administration et la santé.

Afin de maitriser une I.A. de défense, le ministère appelle à :

  1. conserver la liberté d’action de la France et l’interopérabilité avec ses alliés, notamment grâce à des normes communes ;
  2. s’appuyer sur une I.A. de confiance, maitrisée et responsable, reposant sur l’explicabilité des algorithmes, une capacité à certifier des systèmes d’I.A. et la synergie entre jugement humain et puissance des algorithmes ;
  3. maintenir la résilience et l’évolution de nos systèmes en maintenant une capacité d’action dans un environnement I.A. dégradé ;
  4. préserver un cœur de souveraineté en refusant d’être dépendant de technologies dont la France n’a pas la maitrise ;
  5. une meilleure sensibilisation de l’I.A. ;
  6. ne pas développer des systèmes pleinement autonomes, c’est-à-dire hors du contrôle humain.

Les objectifs du ministère des Armées sont précis et des moyens considérables y sont affectés avec près de 700 millions d’euros dans la loi de programmation militaire et des résultats déjà visibles avec la mise en place du Comité d’éthique ministériel à l’aube de l’année 2020.

Le rapport se poursuit sur une analyse géostratégique de l’intelligence artificielle, qui est à découvrir dans sa version complète disponible librement au téléchargement sur le site du ministère des Armées.

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