Vendée Globe 2024 : les gendarmes veillent au grain
- Par le capitaine Tristan Maysounave
- Publié le 13 novembre 2024
Le dimanche 10 novembre 2024, les 40 participants de la 10e édition du Vendée Globe se sont élancés depuis les Sables-d’Olonne. Fortement mobilisée, la gendarmerie participait au dispositif de sécurisation interservices mis en œuvre, à terre comme en mer.
L’expression « veiller au grain » trouve ses origines au XIXe siècle. Les marins l’employaient pour désigner le fait de surveiller l’arrivée d’une tempête violente. Ce dimanche, ce n’est pas ce grain que redoutaient les organisateurs et les services de l’État à l’occasion du départ du Vendée Globe. Le coup d’envoi de cette célèbre course à la voile, autour du monde, en solitaire, sans assistance et sans escale, a en effet été donné dans la pétole, à 13 h 02. Les 40 voiliers IMOCA (monocoques de 18,28 mètres, seule classe admise à concourir lors du Vendée Globe) engagés dans la compétition quadriennale, faisaient quasiment du surplace en attendant que le vent daigne les laisser filer vers le grand large. Presque une aubaine pour les 12 000 plaisanciers venus admirer les bateaux sur l’eau. Tentant de se rapprocher au plus près, ils en étaient rapidement dissuadés par les services de l’État en mer, et notamment par les navires de la gendarmerie maritime, chargés de faire respecter une bulle de sécurité autour de la course. À terre, les forces de sécurité intérieure et leurs partenaires avaient également eu fort à faire dès l’aube, avec l’arrivée de plusieurs centaines de milliers de personnes, venues encourager les concurrents à la sortie du chenal de Port Olona.
« La fluidité interservices n’est pas due au hasard »
Organisateurs de la course, services de la ville, forces de l’ordre, Affaires maritimes, douanes, forces armées, services de secours… autant d’administrations et d’organismes qui concourent au bon déroulement de la course à la voile la plus célèbre au monde. Une ferveur populaire particulièrement importante était pressentie pour le Vendée Globe 2024. Outre le fait qu’il s’agit de la 10e édition et que celle-ci présente une participation record avec 40 concurrents en lice, le public n’avait pu assister à la compétition précédente en raison du confinement imposé en réponse à la crise sanitaire.
« Le nombre de personnes attendues est difficile à estimer. Il n’y a pas de comptage possible, car les gens sont libres de circuler. La fréquentation dépend également de la météo. Nous pensons néanmoins qu’il y aura au moins 350 000 spectateurs à terre le jour du départ », expliquait en amont le chef d’escadron Cyrille de Geloes, commandant la compagnie de gendarmerie départementale des Sables-d’Olonne. Ces trois dernières semaines, pas moins de 400 000 personnes ont ainsi visité le village du Vendée Globe.
Afin de faire de cet événement une totale réussite, les différents services ont commencé à travailler ensemble depuis plus d’un an, sous la coordination du Préfet de département et du Préfet maritime. Des groupes de travail ont ainsi été constitués sur les thèmes de l’ordre public, de la sécurité civile, de la gestion de l’espace aérien, de la sécurité dans le port et en mer, de la circulation et du stationnement et du Poste de conduite des opérations (PCO).
« La fluidité interservices n’est pas due au hasard, souligne le lieutenant-colonel Nicolas Bossy, Officier adjoint commandement (OAC) du Groupement de gendarmerie départementale (GGD) de la Vendée (85). Tous les services ont été inclus dans une réflexion en amont. Le préfet est le pivot central de l’action des forces. Bien que le Vendée Globe ait lieu tous les quatre ans, nous commettrions une erreur en n’ayant pas une réflexion à chaque nouvelle édition. Les acteurs et les technologies évoluent. L’événement gagne en notoriété. Les RETEX (retours d’expérience) des éditions précédentes constituent néanmoins une base solide sur laquelle s’appuyer. »
« Concernant le dispositif de sécurisation en mer, nous nous sommes appuyés sur l’édition de 2016, indique le colonel Pierre-Damien Igau, commandant le groupement de gendarmerie maritime Atlantique. Nous avons travaillé sur plusieurs hypothèses de départ, liées aux différentes conditions météorologiques prévisibles. Le dispositif final a été fixé trois jours avant le départ de la course, une fois que les prévisions météo se sont confirmées. Nous avons également intégré dans notre conception de manœuvre les problématiques d’ordre public et les contestations sociales pouvant survenir. »
Ce dimanche 10 novembre, dès 5 heures du matin, le centre de congrès Les Atlantes, situé à l’extrémité de la promenade du Remblai, aux Sables-d’Olonne, s’est transformé en fourmilière. C’est ce bâtiment qui a été choisi pour installer le PCO, permettant de coordonner l’ensemble des services au cours de la journée la plus attendue, celle du départ de course.
« Le PCO, fruit d’un an de travail, est le centre de coordination de l’autorité administrative et des acteurs qui œuvrent dans le cadre du Vendée Globe, précise le lieutenant-colonel Bossy. Il leur permet d’être parfaitement renseignés et d’avoir une action immédiate et efficace sur tout événement amené à se produire. »
Plusieurs autorités gendarmerie concourent au PCO. Ainsi, outre le lieutenant-colonel Bossy, qui représente le commandant du GGD 85, sont également présents le capitaine Philippe Le Bouedec, commandant en second de la compagnie de gendarmerie départementale des Sables-d’Olonne, ainsi qu’un officier de liaison de la gendarmerie maritime, chargé de faire l’interface entre le dispositif mis en place à terre et celui en mer.
À la capitainerie de port Bourgenay, situé à Talmont-Saint-Hilaire, à une dizaine de kilomètres des Sables-d’Olonne, un poste de commandement gendarmerie a par ailleurs été installé. Depuis celui-ci, le colonel Arnaud Pellabeuf, commandant le groupement de la Vendée, coordonne l’action des gendarmes engagés sur le terrain, en lien étroit avec le PCO. Bien que le port Olona soit situé en zone de compétence de la police nationale, les gendarmes ont fort à faire aux abords de la ville.
À terre, un dispositif essentiellement centré sur la gestion des flux
Avec plusieurs centaines de milliers de personnes attendues aux Sables-d’Olonne ainsi qu’aux abords de la ville le jour du départ des bateaux, la mission essentielle de la gendarmerie est d’assurer un contrôle de zone associé à une gestion des flux de véhicules. L’objectif est de garantir au maximum la fluidité du trafic, tout en permettant aux services de secours et aux autorités de circuler. Pas moins de 80 gendarmes sont dédiés à cette mission. La gendarmerie doit également être en mesure de conserver sa capacité d’engagement sur le reste du département. Elle est également en mesure d’intervenir sur tout acte véritablement hostile grâce au Peloton de surveillance et d’intervention de gendarmerie (PSIG) sabre de La Roche-sur-Yon.
« Aujourd’hui, dix-sept gendarmes de l’EDSR de la Vendée sont mobilisés, explique le capitaine Sébastien Alcasou, commandant en second de cette unité. Notre mission consiste à assurer la fluidité de tous les axes sur les secteurs périphériques des Sables-d’Olonne. Nous renseignons également le PCO sur la viabilité des itinéraires et nous sommes en mesure d’assurer des escortes, tant au profit d’autorités que des services de secours. Nous nous appuyons notamment sur nos motos, qui constituent le vecteur le plus utile.
En ce jour de départ de course, de nombreuses personnalités sont ainsi attendues, dont Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, Nathalie Delattre, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le Parlement, ou encore le spationaute Thomas Pesquet.
« Des gendarmes sont engagés en renfort en zone de compétence de la police nationale, mais la majorité des forces de gendarmerie est déployée aux abords, et notamment sur la côte, précise le commandant de compagnie des Sables-d’Olonne. À Port Bourgenay, nous nous attendons à des problèmes de circulation, car les plaisanciers souhaitant assister au départ de la course depuis la mer viendront mettre leurs embarcations à l’eau depuis la cale. Même s’il s’agit essentiellement d’un public coopérant de passionnés et de familles venus profiter du week-end prolongé, nous ne sommes pas à l’abri d’un stationnement massif et désorganisé. Afin d’éviter tout risque d’engorgement, un arrêté d’interdiction est mis en œuvre dès la veille. Nous procédons à l’enlèvement des véhicules ou des remorques qui l’enfreignent, afin de garantir la viabilité des axes. Sur les chemins côtiers, des motos tout-terrain de la Communauté de brigades (Cob) de Saint-Jean-de-Monts effectuent des surveillances afin de prévenir les mouvements de foule et s’assurer que des personnes n’empruntent pas les sentiers dangereux pouvant s’affaisser. »
Positionné en réserve d’intervention, le PSIG de la compagnie est en mesure d’intervenir en renfort de tout événement se produisant au cours de la journée.
Un dispositif aérien est également prévu. Une équipe de la Section de protection appui drone (SPAD) du 2e régiment d’infanterie de la Garde Républicaine a été déployée sur la côte afin de neutraliser tout drone qui tenterait de survoler port Olona ou la zone de course. La Section aérienne de gendarmerie (SAG) de Saint-Nazaire se tient également prête à décoller en cas de comportement suspect d’un aéronef.
En mer, un dispositif conséquent sous l’autorité du Préfet maritime
Ce dimanche 10 novembre 2024, les sept navires de la gendarmerie maritime et des brigades nautiques de Saint-Gilles-Croix-de-Vie et de La Rochelle ont appareillé de port Olona dès 7 heures. La veille, ils avaient assisté à un briefing, avant de procéder à un blanchiment de la zone de course visant à faire respecter l’arrêté de la préfecture maritime interdisant d’immerger des engins de pêche. Aux côtés des bâtiments de la Marine nationale, des Affaires maritimes, des douanes ou encore des embarcations de l’organisation du Vendée Globe, leur mission consiste à sécuriser la zone de départ de course en la rendant hermétique. La manœuvre est coordonnée depuis le patrouilleur côtier de la gendarmerie maritime Le Géranium, à bord duquel se trouvent le colonel Pierre-Damien Igau, commandant le Groupement de gendarmerie maritime Atlantique, François-Régis du Chazaud, administrateur principal des Affaires maritimes et Délégué à la mer et au littoral (DML) de Vendée, et le capitaine Nicolas Vivien, à la fois commandant du patrouilleur et Officer in tactical command (OTC). Une fonction qui consiste à superviser l’action de tous les moyens d’État engagés en mer.
« La gendarmerie maritime s’inscrit dans le dispositif particulier de protection en mer, explique le colonel Igau. Le Préfet maritime est à la fois le représentant civil et militaire de l’État. Il coordonne l’action de l’État en mer en s’appuyant sur ses représentants qu’il désigne. La police du plan d’eau (respect des règles de navigation, etc.) est placée sous l’autorité du DML, alors que l’aspect ordre public est confié à la gendarmerie maritime. Notre mission consiste à faire respecter les zones de navigation définies par l’arrêté du Préfet maritime. Cette année, le Vendée Globe connaît une médiatisation exceptionnelle et une participation historique avec 40 concurrents engagés. En raison des conditions de mer très calmes, nous attendons énormément de plaisanciers sur l’eau, ce qui multiplie les risques d’incident à la navigation. Nous avons de grandes distances à couvrir et nous devons redoubler de vigilance. Nos moyens nous permettent de disposer d’une gradation de l’espace maritime. Les semi-rigides sont essentiellement employés dans la bande littorale. Les Vedettes côtières de surveillance maritime (VCSM) sont engagées autour des zones réglementées, tandis que Le Géranium est capable de se porter au plus loin. Après le départ de course, nous assurons la couverture des IMOCA pour leur permettre de partir au large sereinement, sans être gênés par les plaisanciers et les navires à passagers. »
« Depuis Le Géranium, ma mission consiste à coordonner l’ensemble des moyens dédiés à la police du plan d’eau, poursuit François-Régis du Chazaud. Je travaille en liaison étroite avec le commandant du Géranium, qui est chargé de la sûreté maritime. En tant que coordonnateurs, nous prenons nos décisions à deux, au nom du Préfet maritime. L’effet majeur consiste à contenir le monde présent autour de la zone de course au moment du départ afin de ne pas être débordés. Nous devons également assurer l’écoulement des flux, notamment dans le chenal de port Olona. Le fonctionnement interservices est très fluide, car il s’agit du mode de fonctionnement habituel du DML. L’État dispose par ailleurs d’une réelle expérience sur ce type d’événement, sur laquelle nous pouvons capitaliser (courses au large, Fêtes Maritimes de Brest, etc.). »
Une heure avant le départ de la course, la tension monte d’un cran à bord des bâtiments engagés sur l’eau. La zone d’accélération permettant aux concurrents de se diriger vers le grand large vient d’être fermée à la navigation. Le Géranium effectue des rails dans la zone afin de dissuader toute approche. Sur la passerelle, l’adjudant David se tient prêt. À l’aide d’une caméra et d’un registre, il inscrit les noms et immatriculations des navires déroutés en raison de leur incursion dans la zone interdite. S’agissant d’un délit, leurs capitaines pourront faire l’objet de poursuites à l’issue.
À 13 h 02, le départ est donné. Après avoir suivi les concurrents pendant les premières heures, les plaisanciers et les navires à passagers leur adressent un dernier salut à l’aide de leurs cornes de brume et s’en détournent progressivement afin de faire route vers les Sables-d’Olonne. Les services de l’État sont également désengagés. Alors que le soleil se couche progressivement, les skippers se retrouvent enfin seuls, déterminés à boucler leur « Everest des mers ».
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