La SCCOPOL, porte d’entrée de la coopération opérationnelle policière internationale
- Par le commandant Céline Morin
- Publié le 03 juin 2022

Opérationnels H24, 7j/7, les 26 gendarmes de la Section centrale de coopération opérationnelle de police, avec leurs camarades de la police nationale et de la douane, orientent les forces françaises de sécurité intérieure vers les canaux internationaux et européens de coopération policière et les outils offerts par le Système d’information Schengen (SIS-II), Europol ou INTERPOL. Dès lors qu’un élément d’extranéité apparaît lors d’un contrôle de police relatif à un individu ou un véhicule ou d’un dossier d’enquête récemment initié ou déjà entamé, ces opérateurs sont à la manœuvre.
Casques sur les oreilles, regards vissés sur les écrans d’ordinateurs. Le lieu a l’apparence d’un centre d’appels. En plus feutré. Réunis en petits groupes, lesquels sont séparés par des parois de verre, les postes de travail sont à bonne distance les uns des autres, permettant à chaque opérateur de ne pas être dérangé par la conversation de son voisin. Mais il ne s’agit pas de téléconseillers ni de clients comme les autres. De part et d'autre des écrans ou des combinés téléphoniques se trouvent des membres des forces de l’ordre.
Car nous sommes à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, au sein d’un bâtiment la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), et, plus précisément, de sa Division des relations internationales (DRI), qui abrite la SCCOPOL. Derrière cet acronyme que beaucoup ont déjà entendu, sans bien souvent savoir précisément ce qu’il recouvre, se cache un outil essentiel pour les unités de terrain en prise avec une problématique pénale liée à l’international : la Section centrale de coopération opérationnelle de police.
Point d’accès unique aux trois canaux de coopération policière
Ce service à vocation interministérielle, réunissant 85 personnels, gendarmes, policiers ainsi qu’un douanier, abrite le Point de contact central (PCC) qui est à la disposition des services répressifs français cherchant à interroger un service de police étranger mais sans savoir comment procéder ou qui contacter. Joignable 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, par téléphone ou par mail, le PCC reçoit et traite les requêtes des gendarmes, policiers et douaniers. Il les accompagne, les conseille et les oriente vers l’outil de coopération le plus adapté à la nature et à la complexité de leur dossier. Il leur prodigue également une aide à la rédaction du « message en quatre points » pour respecter le formalisme requis et à la traduction des messages. Il est aussi le point central de réception des demandes de coopération policière transmises par des services répressifs étrangers.
Le PCC dispatche ensuite ces requêtes vers les opérateurs de l’Unité des demandes de coopération (UDC), lui permettant d’intervenir dans plusieurs domaines : l’aide à l’enquête européenne et internationale, les demandes d’observations transfrontalières, urgentes ou ordinaires, qui sont à distinguer du droit de poursuite transfrontalière, qui est du ressort des Centres de coopération policière et douanière (CCPD), les requêtes relevant des accords de Prüm (consultation et alimentation des fichiers d’empreintes digitales et ADN), l’interrogation des bases de données d’Europol et le recours à la messagerie sécurisée SIENA, à laquelle peu de services ont un accès direct.
L’Unité des signalements internationaux (USI), directement contactée par les services de police, des douanes et les unités de gendarmerie en raison du numéro affiché sur les terminaux des forces de l’ordre déployées sur le terrain, traite, pour sa part, les sollicitations ayant trait aux individus, véhicules et objets (consultation du Fichier des personnes recherchées/FPR et du Fichier des objets et des véhicules volés/FOVES), les notices rouges INTERPOL en vue de procéder à l’arrestation des fugitifs, les extraditions ainsi que les Mandats d’arrêt européens (MAE), avec l’appui de la « Mission Justice », relais, sur place, du Bureau de l’entraide pénale internationale (BEPI) du ministère de la Justice.
2 000 messages traités chaque jour
Une fois les sollicitations transmises, il leur faut aussi traiter les réponses, de la France vers l’étranger et inversement. Un travail sans répit avec, en moyenne, 2 000 messages traités chaque jour.
« La SCCOPOL est la porte d’entrée de la coopération opérationnelle de police. Par courriel ou téléphone, n’importe quelle unité de gendarmerie, service de police ou service des douanes peut la contacter. Notre rôle est à la fois distinct et complémentaire de celui des Centres de coopération policière et douanière (CCPD), rattachés à la Direction centrale de la police aux frontières (DCPAF), et du réseau des Attachés de sécurité intérieure (ASI), qui dépend, pour sa part, de la Direction de la coopération internationale de sécurité (DCIS), car chacune de ces institutions de coopération policière a son propre mandat et sa raison d’être, estime le lieutenant-colonel Nicolas Le Coz, commandant par intérim de la SCCOPOL. Point de contact français unique, nous rassemblons, sous un même commandement, le Bureau central national français d’INTERPOL, l’Unité nationale Europol (UNE) et le Bureau SIRENE-France. C’est ce qui fait de nous des facilitateurs. Nous aidons dans le cadre des procédures judiciaires pour obtenir des données déjà détenues par un service de police étranger et ne nécessitant pas l’utilisation de la coercition. Si un acte coercitif est nécessaire, alors les enquêteurs doivent en rendre compte au magistrat, pour qu’il active l’entraide judiciaire en matière pénale. Nous aidons aussi pour un simple contrôle routier, pour une vérification d’identité, de plaques d’immatriculation. Tous les éléments obtenus par les différents canaux peuvent être actés en procédure sur le fondement de l’article 430 du Code de procédure pénale. En fonction de la nature de la demande, de la technicité, mais aussi du pays concerné, le délai de réponse peut varier de quelques heures à quelques semaines. Nous sommes aussi là pour rassurer et guider les personnels qui, lors d’un contrôle, se voient notifier une alerte. Enfin, nos opérateurs inscrivent dans le Système d’information Schengen (SIS) les mandats d’arrêt européens permettant aux services de police et aux autorités judiciaires d’autres États membres de l’U.E. de les exécuter. Nous sommes donc les acteurs quotidiens pour un « monde plus sûr ».
Le traitement des messages se fait en fonction de leur degré d’urgence, par exemple pour obtenir une réponse dans le temps d’une garde à vue. Formés aux différents canaux, les opérateurs sont polyvalents et capables de traiter tous les dossiers, dont le suivi est d’ailleurs dépersonnalisé.
De la simple délinquance aux formes les plus graves de la criminalité
Depuis la délinquance classique jusqu’aux formes graves de criminalité, le champ d’action de la SCCOPOL est aussi large que varié. Les profils des opérateurs aussi, « dont certains sont aussi atypiques qu’intéressants. Gendarmes venus de brigades territoriales côtoient ainsi ceux venus de Groupes d’observation et de surveillance (GOS), d’offices centraux de police judiciaire ou encore de la gendarmerie mobile, explique le lieutenant-colonel Le Coz. Tropisme pour l’international, facilité à travailler dans une structure inter-forces, pédagogie vis-à-vis d’un terrain pas toujours au fait de la réelle plus-value qu’apporte la coopération policière dans un dossier, et bagage opérationnel sont nécessaires. Même s’il s’agit d’un travail posté, il faut connaître les besoins et les contraintes des unités de terrain. Les compétences linguistiques sont également un prérequis : l’anglais est obligatoire et une seconde langue est aussi appréciée. »
Mais avant d’être opérationnel, il leur faut suivre une formation sur place « assez dense », précise François J., gendarme mobile. « Après, c’est le travail quotidien qui nous forme. Et on peut s’appuyer les uns les autres en cas de doute. »
Certains signalements demandent une extrême réactivité. En effet, outre la contrainte du temps de garde à vue, l’urgence à inscrire un mandat d’arrêt européen dans le SIS avant que n’expire une mesure privative de liberté en cours à l’étranger, les opérateurs se retrouvent aussi confrontés aux signalements de mineurs dans le cadre d’enlèvements parentaux. « Il faut alors trouver l’interlocuteur le plus vite possible, avant qu’il ne sorte du territoire », précise l’adjudant Pascal B. Dans ce « flot continu de messages » mentionné par le gendarme Paul L., « il faut un grand discernement et se tenir au courant de l’actualité judiciaire française et étrangère », ajoute la gendarme Nauela W., qui forme d’ailleurs régulièrement les fonctionnaires de police à l’utilisation de la messagerie SIENA. Et le major Olivier B. de conclure : « En fluidifiant les échanges entre les pays et en apportant, in fine, des réponses aux enquêteurs, on apporte notre pierre à l’édifice pour contribuer, à notre niveau, à la résolution de leurs dossiers. »
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