Trophées des chiens héros : l’adjudante Mélanie et Looba primés dans la catégorie chien de sauvetage

  • Par le commandant Céline Morin
  • Publié le 25 mai 2023
L'adjudante Mélanie, son malinois Looba et le général de corps d'armée Olivier Kim, directeur des opérations et de l'emploi sur la scène des trophées des chiens héros.
© Sirpa-G - CDT C. Morin

À l’occasion de la 4édition des Trophées des chiens héros, événement organisé par la Société centrale canine (SCC), l’adjudante Mélanie et son chien Looba ont été primés pour les services rendus à la population au fil de leurs interventions. Retour sur le parcours de ce binôme soudé et engagé au quotidien !

C’est dans le cadre de l’hôtel de ville de Paris, et en présence notamment du ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, que s’est déroulée, le 24 mai 2023, la 4e édition des Trophées des chiens héros. Organisé par la Société centrale canine (SCC), cet événement biennal vise à mettre en lumière les exploits des chiens au sein de notre société et à honorer les services qu’ils rendent au quotidien, qu’ils soient employés au sein des forces de sécurité intérieure, des pompiers, des armées, des cours de justice, des maisons de retraite ou au sein de nos foyers.

Afin de couvrir le large spectre de leur champ d’intervention, onze catégories ont été définies cette année : chien de sauvetage civil (chiens de secourisme, de recherche de personnes disparues, de reconnaissance, etc.) ; chien de recherche de matières illicites ; chien de recherche d’explosifs et d’armements ; chien d’intervention (officiant dans l’armée, les unités de gendarmerie, de police, etc.) ; chien détecteur de maladies ; chien et environnement ; chien d’assistance ; chien visiteur / médiateur (apportant du réconfort dans les maisons de retraite, les hôpitaux, les écoles, les cours de justice, etc.) ; chien de la sécurité privée ; chien de famille (non spécialiste ayant réalisé un exploit), et, enfin, une catégorie mémoire (prix décerné à titre posthume). Le palmarès 2023 est disponible ici.

Un prix spécial a également été décerné à huit chiens intervenus en Turquie pour retrouver les personnes ensevelies sous les décombres, après les tremblements de terre survenus en février 2023 . Enfin, l’association Un toit pour Erros, qui offre un cadre de retraite paisible aux chiens de brigades canines réformés, a reçu le trophée partenaire.

© Sirpa-G - CDT C. Morin

Une gendarme et son chien primés

Lors de cette édition 2023, l’adjudante Mélanie et son équipier Looba, un malinois de 7 ans, ont été récompensés dans la catégorie « chien de sauvetage civil / recherche de personne », pour leur parcours professionnel exemplaire et une complicité sans faille, qui ont été soulignés par le général de corps d'armée Olivier Kim, directeur des opérations et de l'emploi et membre du jury, heureux de remettre cette médaille à Looba.

La militaire, maître de chien au sein du Détachement d’équipes cynophiles (DEC) de Haute-Garonne, ne cache pas sa surprise. Elle qui ne pensait même pas, de prime abord, remplir le dossier de candidature qui lui avait été adressé par la SCC, s’avoue « très honorée que nous recevions ce trophée pour tous les services que nous avons pu rendre. Je suis très fière de l’équipe que nous formons depuis 2018 avec Looba. Dans ma tête, je ne fais que mon travail, mais finalement, ce prix, c’est le fruit de tous les résultats obtenus. » Et de souligner fièrement que son partenaire à quatre pattes, qui vient d’être décoré de la médaille de la Défense nationale, le mérite bien ! Le binôme s’est d’ailleurs distingué parmi les quelque 135 dossiers de candidature reçus cette année, toutes catégories confondues, dont douze dans celle des chiens de sauvetage civil.

À noter

Le détachement d’équipes cynophiles de la Haute-Garonne a été mis en place en février 2022, pour pallier l’absence d’un Groupe d’investigations cynophile dans le département, lequel devrait voir le jour à moyen terme à Balma. Le DEC est formé par quatre maîtres de chien et quatre chiens (2 piste-défense, un « sambi »/stupéfiants armes munitions billets et un stupéfiants-défense renforcé bénéficiant d’une formation supplémentaire VTU), rattachés au Peloton de surveillance et d’intervention de gendarmerie de Colomiers.

D’un début de parcours atypique…

Devenir maître de chien était un rêve que l’adjudante Mélanie, aujourd’hui âgée de 34 ans, nourrissait depuis longtemps. Né de son amour des chiens, au contact des malinois de son grand-père, ce rêve avait pris une forme plus concrète le jour où, encore petite fille, elle avait assisté à une démonstration de chien de défense lors d’une journée du patrimoine, dans la Loire, d’où elle est originaire. C’est donc avec cet objectif en tête qu’elle intègre la gendarmerie en 2008 en tant que Gendarme adjoint volontaire (GAV), non sans avoir essayé de poursuivre ses études après son BAC S, sur les conseils de ses parents, afin d'obtenir un diplôme supérieur. « Mais très vite, je me suis rendue à l’évidence que ce n’était pas ce que je souhaitais. »

En 2011, elle intègre l’école de Montluçon, dont elle sort un an plus tard. D’abord affectée dans le Nord Aveyron, elle est ensuite mutée à la brigade de Rodez en 2015, où elle passe l’examen d’OPJ (Officier de Police Judiciaire), mais surtout, en décembre 2016, les tests de présélection pour devenir maître de chien. Il lui faudra toutefois attendre un an pour intégrer, dès janvier 2018, la formation tant attendue au Centre national d’instruction cynophile de la gendarmerie (CNICG), à Gramat, dans la spécialité « piste défense ». « Je n’ai pas eu le choix du poste, mais c’était justement ce que je voulais faire », souligne-t-elle, encore visiblement heureuse à l’évocation du souvenir. Pourtant, le stage ne se déroule pas tout à fait comme prévu. En effet, au moment des premières évaluations, c’est-à-dire à mi-parcours, au bout de sept semaines, le chien avec qui elle fait équipe ne remplit pas les critères. Mélanie doit alors poursuivre avec un autre chien, ce sera Looba.

« Ce n’est pas évident de changer de chien en cours de route, d’autant qu’ils avaient des caractères très différents. Mais ça s’est très bien passé, la sauce a vite pris entre nous. On a réussi à se comprendre, à s’analyser, à se faire confiance aussi. Nous avons donc fait les sept semaines suivantes ensemble, mais avons dû retourner au centre pour sept nouvelles semaines afin d’être entièrement validés. C’était donc un début de parcours déjà un peu atypique. »

D’autant que rien ne prédestinait Looba à cette vie. Abandonné par son maître, puis récupéré par un club canin, il avait deux ans quand il est arrivé au CNICG.

Looba, un berger malinois, au côté de l'adjudante Mélanie, maître de chien, agenouillée dans l'herbe et montrant du doigt un objectif.
© Frédéric Corral

… à plus de 150 interventions !

Sorti de Gramat fin juin 2018, le binôme, affecté à Toulouse, est engagé sur sa première mission en juillet, le 14 plus exactement. Depuis, tous les deux ont enchaîné les interventions, 150 pour être exact (au moment de la rédaction du dossier de candidature, NDLR), « où le chien a effectivement été mis en œuvre pour pister. Parce que si l’on compte aussi les annulations, on monte à près de 100 requêtes en moyenne par an, précise l’adjudante. J’interviens sur les recherches de personnes, qu’il s’agisse de personnes souffrant de pathologies, comme Alzheimer, schizophrénie ou encore dépression, ou de mineurs en fugue. Il y a aussi les recherches de malfaiteurs, comme des cambrioleurs mis en fuite. Sur ces 150 inter’, nous avons retrouvé une quarantaine de personnes. »

Et de confier avec pudeur : « Les recherches de personnes, c’est aussi beaucoup d’émotionnel. Sur certaines missions, au regard du temps écoulé, des conditions météo ou si on part sur une personne suicidaire, on sait que les chances sont faibles de la retrouver vivante. Mais retrouver le corps du disparu et le rendre à la famille fait partie de notre travail. Ce n’est pas la partie la plus plaisante, mais cela contribue à aider les proches à faire leur travail de deuil. Toutes les missions sont différentes, mais toutes sont complexes, c’est ce qui les rend aussi marquantes. »

Certaines le sont d’ailleurs plus d’autres, comme son tout premier engagement, ce 14 juillet 2018 : « non seulement c’était ma première mission après ma sortie de Gramat, dans des conditions qui plus est un peu difficiles au regard de la température qui frôlait les 36 degrés, mais surtout on a retrouvé la personne, certes décédée, mais on a retrouvé son corps. Mais au départ, je me suis retrouvée seule face à la réalité, c’était un peu la panique à bord », avoue-t-elle.

La gendarme se plonge alors dans ses souvenirs de missions, évoquant dans la foulée la recherche, en mars 2019, d’une personne souffrant de schizophrénie, disparue en pleine zone urbaine depuis 27 heures, « un délai très important, sur lequel je n’avais jamais travaillé avec Looba. Je n’avais alors même pas un an d’ancienneté, mais je me suis dit qu’il fallait essayer. Et au bout de 3 km de pistage, on l’a retrouvée dans une chambre d’hôtel devant laquelle Looba a marqué. Ce jour-là, il m’a montré l’étendue de ses qualités olfactives et qu’il fallait que je lui fasse confiance. »

L'adjudante Mélanie et son chien Looba, dans un champ, sous les arbres, face objectif.
© Frédéric Corral

Puis de raconter dans le même élan la recherche de cambrioleurs cette fois, mis en fuite par le propriétaire de la maison dans laquelle ils avaient pénétré. Là encore, la gendarme expérimente une technique qu’elle n’a jamais mise en œuvre en mission : la discrimination d’odeurs. « J’ai utilisé le seul objet que l’auteur avait touché, une taie d’oreiller, mais celle-ci portait aussi l’odeur du propriétaire et de son épouse. J’ai donc demandé à Looba de discriminer ces deux odeurs, pour ne suivre que celle du cambrioleur, qu’on a retrouvé et qui nous a conduits aux autres.

Sur une autre tentative de cambriolage, où l’auteur avait été vu en train de prendre la fuite à travers champ, j’ai tamponné le muret par-dessus lequel il avait sauté, pour prendre son odeur, et on a commencé à pister dans le champ. Le chien a d’abord marqué sur un portable, perdu par l’auteur, avant de remonter la piste jusqu’à un centre pour jeunes, où Looba a marqué un des pensionnaires. Celui-ci a nié, mais l’analyse du téléphone a corroboré le marquage du chien. »

Plus récemment, Looba a participé à la recherche d'un malfaiteur mis en fuite après l'interception d'un go-fast : « J’ai été prévenue une heure après les faits. La zone avait été fouillée en vain, raconte la militaire. J’ai effectué un prélèvement sur la boucle de la ceinture de sécurité du véhicule et on a commencé à pister dans le champ, après le cours d’eau que le mis en cause avait traversé à la nage. Looba a suivi la trace jusqu’à un hangar et a marqué à côté d’un camion que l’auteur avait fracturé pour s’y cacher. Il était là, en hypothermie. »

Elle se souvient aussi de la disparition d’un « papi », début 2022. « Quand je suis arrivée sur place, toute sa famille était présente. Ils m’ont dit que j’étais leur ultime recours, ils voulaient savoir si mon chien était bon. C’étaient des mots forts et durs, la pression était énorme. Mais on a fini par le retrouver, en hypothermie mais en vie. À ce moment-là, voir leur joie a été un moment indescriptible, il faut le vivre ! »

Entre-temps, toujours animée de la même passion du chien et du travail avec ce dernier, Mélanie a également obtenu la qualification de Moniteur Homme d’attaque, au terme d’une formation de 14 semaines à Gramat, fin 2020. Des compétences en cynotechnie qu’elle aimerait compléter grâce à la création du GIC à Balma, à court-moyen terme, ce qui lui permettrait d'avoir un second chien. Et de confier avoir « un attrait particulier pour la spécialité de Recherche de produits accélérateurs d’incendie (RPAI). »

Looba, un malinois de sept ans, court dans un champ, en direction de l'objectif du photographe, une balle dans la gueule.
© Frédéric Corral

Un duo complice

On sent très vite, au fil de ses récits, qu’une profonde complicité unit la militaire et son partenaire à quatre pattes. « Looba, c’est la force tranquille, un gros gabarit de 40 kg, calme et posé. Il est sociable, empathique, très gentil, très affectueux, il va voir tout le monde pour avoir des caresses, décrit la militaire. Mais quand il faut aller travailler, il est toujours volontaire, toujours motivé. Il est en demande perpétuelle de travail. Je dirais qu’il fait preuve d’une grande détermination et d’une bonne abnégation. En revanche, il a du caractère, mais c’est aussi ce que l’on attend d’un chien de piste. »

Et sur le terrain, chacun son travail. « Nous formons une équipe, un duo qui a réussi à se comprendre et qui se comprend de mieux en mieux d’ailleurs. Sur un pistage, on travaille à deux, c’est du 80-20. Looba fait 80 % du travail. Derrière, je vais analyser, comprendre ce qu’il fait et l’aider quand je vois qu’il a des doutes ou qu’il bloque. Je prends le relais quand je sens qu’il en a besoin. Nous sommes vraiment complémentaires. Il m’a démontré tellement de qualités en intervention que je sais pouvoir lui faire confiance, même si, bien sûr, celle-ci ne doit pas être aveugle. »

« Looba, c’est le chien d’une carrière, pas d’après ma jeune expérience, mais d’après le recul de mes camarades, Je n’en aurai pas deux comme lui, on me l’a bien fait comprendre. Il a de fabuleuses compétences olfactives innées, que j’ai pu développer lors des missions, et comme il est très demandeur, j’ai très rapidement pu monter en intensité dans mes exercices. J’ai vraiment eu de la chance d’avoir un premier chien comme lui. Ce sera difficile de passer à un autre », anticipe-t-elle, même si la retraite de Looba n’est pas encore pour demain. « Je souhaiterais qu’il puisse continuer à travailler jusqu’à l’âge de 9 ans, pour qu’il puisse ensuite profiter d’une retraite tranquille », espère-t-elle. Une retraite qui ne sonnera toutefois pas la séparation du duo, car Mélanie entend bien garder Looba à ses côtés : « Il m’a tellement donné, je ne peux pas m’en séparer. C’est un lien indescriptible. « Toi et moi, pour eux, la devise de Gramat, c’est vraiment ça nous deux ! »

Assis dans un champ, Looba, un malinois, donne la patte à l'adjudante Mélanie. La militaire et le chien sont vus de profil.
© Frédéric Corral

Contacter la gendarmerie

Numéros d'urgence

  • Police - Gendarmerie : 17
  • Pompier : 18
  • Service d'Aide Médicale Urgente (SAMU) : 15
  • Sourds et malentendants : www.urgence114.fr ou 114 par SMS
  • Urgence Europe : 112

Sécurité et écoute

  • Enfance en danger : 119
  • Violences conjugales : 39 19
  • Maltraitance personnes âgées ou en situation de handicap : 39 77

Ces contenus peuvent vous intéresser